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Commentaire de texte - Montesquieu, De L'esprit des Lois, livre XV, chapitre V.

Publié le 04/01/2013

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Au XVIIIè siècle, siècle des Lumières durant lequel des idées nouvelles apparaissent, Montesquieu s'impose comme une figure incontournable des philosophes les incarnant et les défendant. C'est notamment dans son oeuvre majeure, De l'esprit des lois, qu'il exprime ses pensées sur la monarchie, système politique de l'époque, en fait en la satire et lui oppose des alternatives. Ainsi, dans le chapitre V du livre XV de cette même oeuvre, Montesquieu formule ses réflexions au sujet de l'esclavage, qui était une coutume courante durant cette période. Nous pouvons donc nous demander comment Montesquieu cherche à convaincre le lecteur de l'atrocité de cette pratique. Pour tenter de répondre à cette interrogation, nous montrerons en premier lieu l'apparence logique de l'argumentation, puis nous étudierons l'ironie dissimulée dans le texte, et nous chercherons enfin à comprendre la visée de la démonstration. L'argumentation déployée par Montesquieu peut sembler, lors d'une première lecture, logique et cohérente. Nous pouvons d'abord étudier le raisonnement par analogie qui permet à l'auteur d'appuyer ses propos. L'écrivain justifie notamment l'esclavage en prenant pour exemple les Égyptiens, « les meilleurs philosophes du monde, [qui] étaient d'une si grande conséquence, qu'ils faisaient mourir tous les hommes roux «. Ainsi, Montesquieu, par l'exemple d'une nation qu'il considère, et qu'il nous incite à considérer, comme une nation policée, tente de convaincre le lecteur par un cheminement des plus logiques. De la même manière, il mentionne « les peuples d'Asie, qui font les eunuques, [et qui] privent toujours les noirs du rapport qu'ils ont avec nous d'une façon plus marquée «. Montesquieu cite des exemples qui étayent son raisonnement en justifiant les arguments qu'il avance. Le raisonnement par analogie contribue donc à rendre cohérente et véritable sa démonstration. Nous pouvons étudier, dans un second temps, l'ordre établi des preuves que l'auteur mit en place dans le but de décider le lecteur à rejoindre son idée. Les paragraphes deux et trois sont d'ordre historique et économique. S'ensuivent deux paragraphes qui traitent du physique des esclaves. Puis deux autres paragraphes citent des exemples historiques. Enfin, les deux paragraphes suivants mêlent raisons culturelles et religieuses. Il y a donc une progression logique dans cette démonstration : de raisons pratiques, l'auteur invoque d'abord les différences supposées entre esclaves et gens libres, puis les contradictions apparentes entre<...
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« incomplet présent dans cette phrase « si nous les supposions des hommes, on commencerait à croire que nous ne sommes pas nous-même chrétiens » permet de justifier de façon irrévocable la condition des esclaves en s'appuyant et sur la religion, et sur la construction logique de la preuve.

C'est donc grâce à ces constructions basées sur la déduction que l'argumentation apparaît comme réelle.

Cependant, le développement logique du raisonnement semble être une façade imparfaite : comment un homme, et surtout un philosophe des Lumières, pourrait-il fonder une partie de sa démonstration sur des critères physiques, sur des déductions peu convaincantes et principalement spéculatives ? La démonstration de Montesquieu semble constituer la surface émergée d'une idée plus profonde.

Pour la comprendre, l'auteur a laissé des indices.

Premier signe : de courts paragraphes.

En effet, le bref texte est divisé en de multiples sous-parties, qui, chacune, représente une idée.

C'est cet enchaînement d'arguments, assenés, très peu développés et surtout non prouvés, agissant comme des vérités absolues, qui permet au lecteur de comprendre l'implicite caché.

C'est ainsi que dans le quatrième paragraphe, alors que le texte semble dénigrer les esclaves physiquement, il fait comprendre au lecteur l'atrocité de ces affirmations et le paradoxe résidant dans cette haine physique.

De plus, ces vérités sont renforcées par l'utilisation en début de phrase d'affirmations insistantes : « Une preuve que », « Il est impossible que », etc., soulignent de plus en plus les arguments qui deviennent de plus en plus absurdes.

Voilà donc un premier moyen qui permet à l'auteur de faire passer ses idées avec plus de force et en évitant l'explicite. Au tout début du texte, Montesquieu semble se préserver du développement qui suit.

En effet, au moyen d'une prétérition, il présente le raisonnement qui semble être favorable à l'esclavage comme la défense de cette coutume par un esclavagiste.

C'est ainsi qu'il se défend d'être favorable à l'esclavage, dès le début du texte : « Si j'avais à soutenir le droit que nous avons eu de rendre les nègres esclaves, voici ce que je dirai : » ; Montesquieu ne donne a priori pas son avis sur la question : l'argumentation qu'il tient n'est en fait qu'une sorte de jeu de rôle, dans lequel il prend la place d'un esclavagiste.

Sans cette première phrase qui met en garde le lecteur, le texte pourrait prendre un sens bien différent.

Et c'est ce sens que souhaite éviter Montesquieu : grâce à elle, le lecteur peut comprendre plus aisément que le texte cache un sens implicite derrière les propos tenus par l'esclavagiste.

L'argumentation peut donc être remise en cause par le lecteur : mis en garde, il sait lire le sens vrai du texte. Montesquieu utilise quelques hyperboles qui permettent de caricaturer certains points pour en mieux montrer la face tacite.

Dans le paragraphe huitième, qui s'énonce ainsi « Une preuve que les nègres n'ont pas le sens commun, c'est qu'ils font plus de cas d'un collier de verre que de l'or, qui, chez les nations policées, est d'une si grande conséquence.

», la mise en relief exagérée du mot « or », et donc de son concept, l'argent, montre que la valeur que l'or prend dépend des coutumes, et non de l'avancement d'une nation, ni même de la grandeur, aussi subjective soit elle, de sa civilisation.

Ainsi, Montesquieu ridiculise de façon sous- entendue l'argument qui visait à mettre en exergue la non conformité à l'espèce humaine des esclaves, et donc la légitimité, plus que la légalité, de les exploiter.. »

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