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Cours méthodologique Exercice d’analyse littéraire Chapitre n°4 du Rouge et le noir, Stendhal (Portrait de Julien Sorel)

Publié le 03/01/2024

Extrait du document

« Cours méthodologique Exercice d’analyse littéraire “[Premier mouvement] Il avait les joues pourpres et les yeux baissés.

C’était un petit jeune homme de dix-huit à dix-neuf ans, faible en apparence, avec des traits irréguliers, mais délicats, et un nez aquilin. De grands yeux noirs, qui, dans les moments tranquilles, annonçaient de la réflexion et du feu, étaient animés en cet instant de l’expression de la haine la plus féroce.

Des cheveux châtain foncé, plantés fort bas, lui donnaient un petit front, et dans les moments de colère, un air méchant.

Parmi les innombrables variétés de la physionomie humaine, il n’en est peut-être point qui se soit distinguée par une spécialité plus saisissante.

Une taille svelte et bien prise annonçait plus de légèreté que de vigueur. Dès sa première jeunesse, son air extrêmement pensif et sa grande pâleur avaient donné l’idée à son père qu’il ne vivrait pas, ou qu’il vivrait pour être une charge à sa famille.

Objet des mépris de tous à maison, il haïssait ses frères et son père ; dans les jeux du dimanche, sur la place publique, il était toujours battu [Fin du premier mouvement]. [Second mouvement] Il n’y avait pas un an que sa jolie figure commençait à lui donner quelques voix amies parmi les jeunes filles.

Méprisé de tout le monde, comme un être faible, Julien avait adoré ce vieux chirurgien-major qui un jour osa parler au maire au sujet des platanes [Fin du second mouvement]. [Troisième mouvement] Ce chirurgien payait quelquefois au père Sorel la journée de son fils, et lui enseignait le latin et l’histoire, c’est-à-dire, ce qu’il savait d’histoire, la campagne de 1796 en Italie.

En mourant, il lui avait légué sa croix de la Légion d’Honneur, les arrérages de sa demi-solde et trente ou quarante volumes, dont le plus précieux venait de faire le saut dans le ruisseau public, détourné par le crédit de M.

le maire”.

[Fin du troisième mouvement] Chapitre n°4 du Rouge et le noir, Stendhal (Portrait de Julien Sorel) [Situation du texte] : Cet extrait est issu du chapitre 4 du Rouge et le noir et appartient à la première partie de ce roman de Stendhal.

Julien est y est encore un héros relativement pur, même s’il ne peut s’empêcher de choisir la voie oblique et de mentir aux autres, à son père en particulier.

Dans ce passage, ce dernier vient d’apostropher sévèrement son fils, lequel était entrain de lire Le Mémorial de Saint-Hélène, d’Emmanuel de Las Cases.

La mauvaise humeur de Julien n’est pas explicitement racontée mais l’auteur, nous donne ici des indices visibles et sensibles de son mécontentement.

[Traitement stylistique dominant] Sa description se mue en éthopée en ce qu’elle donne à voir, non seulement le portrait physique du personnage mais aussi, plus fondamentalement, son portrait moral et psychologique.

Julien Sorel n’est pas vu à l’aune d’un seul biais.

[Projet de lecture] : Nous nous demanderons ainsi dans quelle mesure cette description fait-elle état du caractère insaisissable du héros stendhalien ? [Mouvement du texte] Dans le premier paragraphe, le narrateur prend prétexte de la situation pour remonter dans le temps et dire la personnalité double de Julien.

Le récit de ce passé se déploie en deux temps : on a d’abord accès au passé proche (second paragraphe) puis dans le paragraphe clausulaire, au passé lointain.

Le tout, laissant soupçonner un personnage au caractère éclaté, au caractère impossible à résumer. 1 Madame TRAN Classe de Seconde - Français, atelier en petit groupe ● Analyse linéaire (oral du bac : on suit les grands mouvements du texte afin de répondre à un projet de lecture) : ainsi, la première partie correspond naturellement, logiquement, au premier paragraphe de l’extrait.

Idem pour la seconde et la troisième. ● Commentaire composé (écrit du bac : on distingue plusieurs parties analytiques servant à éclairer et répondre à la problématique) I. II. III. Une personnalité en dualité 1.

Les contrastes 2.

Une violence larvée 3.

La marginalité Une relation aux autres, sous tension 4.

La relation au père 5.

Un refus de l’autorité 6.

Un séducteur hors pair Une situation symbolique 7.

La charge psychologisante de Julien 8.

Un goût pour la lecture 9.

Des affinités électives Analyse linéaire I.

Ce passage est une description du personnage principal, Julien Sorel.

Contrairement à la démarche réaliste de Balzac, Stendhal donne peu d’indices sur son héros qui, vu de dehors, semble difficile à cataloguer.

Conformément à son idéal de “réalisme subjectif” pour le dire avec les mots du critique Blin, l’auteur pratique ici l’ellipse et assigne à l’écrasante majorité des éléments racontés, une charge symbolique importante. 1.

Le narrateur s’attache d’abord à décrire l’allure générale de Julien, avant de donner à voir un portrait en touche : rapidement, la description se resserre en effet autour du visage du personnage avant de s’éloigner à nouveau pour évoquer sa silhouette.

L’irrégularité des traits (comme l’atteste le segment situé à la ligne 2 “des traits irréguliers”, illustre ainsi, visuellement et symboliquement, la dualité du héros, comme l’atteste/comme le prouve/comme l’illustre/comme le montre la caractérisation de Julien aux lignes 1-2 : “un petit jeune homme (...) faible en apparence, avec des traits irréguliers, mais délicats, et un nez aquilin”.

Ce physique n’a rien de la beauté mièvre et de la joliesse des physionomies romantiques, de leur régularité expressive.

On se situe là dans un tout autre genre de beauté, qui préfigure peut-être l’évolution ultérieure de Julien dans ce roman. 2.

Ainsi, donc, si cette description reprend les caractéristiques exemplaires du héros romantique (caractéristiques qui supposent une silhouette svelte, un air pensif et une grande pâleur), elle les raconte sous un mode dépréciatif, à partir du jugement négatif énoncé par la famille du personnage.

Julien est d’abord défini par la condition de son père.

C’est à travers le regard du vieux Sorel que le lecteur voit le fils et rien ne semble pouvoir effacer ici ce “péché social originel” pour le dire avec les mots de Paul Nizan, cette généalogie fatale. Plus fondamentalement encore, cette description se rapporte aussi, et surtout, à la charge émotionnelle, propre à Julien Sorel.

A cet égard, le narrateur insiste sur la violence larvée du héros, 2 Madame TRAN Classe de Seconde - Français, atelier en petit groupe comme le souligne l’expression changeante de son regard, chargée de souligner sa versatilité de caractères : ses “yeux noirs, qui, dans les moments tranquilles, annonçaient de la réflexion et du feu, étaient animés en cet instant de l’expression de la haine la plus féroce” (l.3 à l.6).

Pour exacerber le portrait de cet homme sombre et colérique, le narrateur intervient, à travers un commentaire en creux.

Il s’agit d’une éthopée.

Et cette description des comportements psychologiques du personnage est d’ailleurs caractéristique des romans du XIXe siècle : par son physique, Julien incarne de manière exemplaire le type même du personnage passionné, capable de prendre d’un coup, des traits mauvais comme on le voit aux lignes 6 et 7 : “Parmi les innombrables variétés de la physionomie humaine, il n’en est peut-être point qui se soit distinguée par une spécialité plus saisissante”.

Il fait peur. 3.

Au-delà de la versatilité de ses traits, Julien se définit aussi par son état social : rejeté par sa famille composée de robustes paysans, il vit dans une forme de marginalité.

Enfant battu, humilié et offensé, il a été façonné par un milieu extrêmement hostile.

Il est incontestablement le personnage incompris de ce roman et endosse par-là le rôle exemplaire du héros romantique.

Mais contrairement à René, le héros de Chateaubriand, lui ne semble pas jouir de la situation, il ne semble pas vouloir s’en tenir à cette forme d’extase passive et contrariée devant le monde.

La haine qu’il voue à ses proches, le désigne au contraire comme un héros éminemment actif, énergétique, passionné.

Ce jeune ambitieux tente de sortir de la scierie paternelle par tous les moyens. Si, à travers le portrait de Julien, Stendhal reprend les caractéristiques fondamentales du héros romantique, propre à son époque, il le réactualise ici profondément : il procède à un retournement des représentations de son temps. I. Cette faiblesse physique est un objet de mépris pour sa famille.

Cet élément revêt ici une charge psychologique et sociologique très importante et éclaire de la manière dont les autres perçoivent Julien. 1.

Le père incarne sur le plan symbolique, la loi, le règne de l’autorité.

L’évocation de ses relations complexes avec son fils donne à voir un personnage en rupture avec les attendus du monde ouvrier, un personnage passionné et révolté, mais aussi traumatisé par les avanies qu’il a dû subir par le passé. Tandis que ses frères épousent strictement leur destin de “fils de charpentier” et écoutent la voix du père et du devoir, Julien ne suit pas exactement l’ordre des choses : il se détache, abandonne sa place pour prendre de la hauteur et sortir de son milieu.

Un milieu masculin, où tout fait signe vers la virilité et la.... »

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