Devoir de Philosophie

DE L'ESCLAVAGE DES NÈGRES (Montesquieu : L'Esprit des Lois », livre XV, chapitre V).

Publié le 04/12/2010

Extrait du document

esclavage

Les Lettres Persanes nous avaient montré un Montesquieu rationaliste. L'Esprit des Lois vient confirmer cette opinion. En rejetant les explications métaphysiques et en éliminant le hasard, Montesquieu s'attache à démontrer que tout a sa raison d'être, même les lois. Mais s'il comprend des institutions injustes, il se garde de les accepter ou même de les excuser.

De l’esclavage des nègres

Si j’avais à soutenir le droit que nous avons eu de rendre les nègres esclaves,voici ce que je dirais :

Les peuples d’Europe ayant exterminé ceux de l’Amérique, ils ont dû mettre enesclavage ceux de l’Afrique, pour s’en servir à défricher tant de terres.

Le sucre serait trop cher, si l’on ne faisait travailler la plante qui le produit pardes esclaves.

Ceux dont il s’agit sont noirs depuis les pieds jusqu’à la tête ; et ils ont le nez si écrasé qu’il est presque impossible de les plaindre.

On ne peut se mettre dans l’esprit que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme, surtout bonne, dans un corps tout noir.

Il est si naturel de penser que c’est la couleur qui constitue l’essence de l’humanité, que les peuples d’Asie, qui font les eunuques, privent toujours les noirs du rapport qu’ils ont avec nous d’une façon plus marquée.

On peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux, qui, chez les Égyptiens, les meilleurs philosophes du monde, étaient d’une si grande conséquence, qu’ils faisaient mourir tous les hommes roux qui leur tombaient entre les mains.

Une preuve que les nègres n’ont pas le sens commun, c’est qu’ils font plus de cas d’un collier de verre que de l’or, qui, chez les nations policées, est d’une si grande conséquence.

Il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des hommes ; parce que, si nous les supposions des hommes, on commencerait à croire que nous ne sommes pas nous-mêmes chrétiens.

De petits esprits exagèrent trop l’injustice que l’on fait aux Africains. Car, si elle était telle, qu’ils le disent, ne serait-il pas venu dans la tête des princes d’Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d’en faire une générale en faveur de la miséricorde et de la pitié ?

Montesquieu, De l’esprit des loisLivre XV, chapitre V.

Liens utiles