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Électre, Acte II, scène 9 : le récit du mendiant. Giraudoux

Publié le 13/07/2010

Extrait du document

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La MENDIANT Alors voici la fin. La femme Narsès et les mendiants délièrent Oreste. Il se précipita à travers la cour. Il ne toucha même pas, il n'embrassa même pas Électre. Il a eu tort. Il ne la touchera jamais plus. Et il atteignit les assassins comme ils parlementaient avec l'émeute, de la niche en marbre. Et comme Égisthe penché disait aux meneurs que tout allait bien, et que tout désormais irait bien, il entendit crier dans son dos une bête qu'on saignait. Et ce n'était pas une bête qui criait, c'était Clytemnestre. Mais on la saignait. Son fils la saignait. Il avait frappé au hasard sur le couple, en fermant les yeux. Mais tout est sensible et mortel dans une mère, même indigne. Et elle n'appelait ni Électre, ni Oreste, mais sa dernière fille Chrysothémis, si bien qu'Oreste avait l'impression que c'était une autre mère, une mère innocente qu'il tuait. Et elle se cramponnait au bras droit d'Égisthe. Elle avait raison, c'était sa seule chance désormais dans la vie de se tenir un peu debout. Mais elle empêchait Égisthe de dégainer. Il la secouait pour reprendre son bras, rien à faire. Et elle était trop lourde aussi pour servir de bouclier. Et il y avait encore cet oiseau qui le giflait de ses ailes et l'attaquait du bec. Alors il lutta. Du seul bras gauche sans armes, une reine morte au bras droit avec colliers et pendentifs, désespéré de mourir en criminel quand tout de lui était devenu pur et sacré, de combattre pour un crime qui n'était plus le sien et, dans tant de loyauté et d'innocence, de se trouver l'infâme en face de ce parricide, il lutta de sa main que l'épée découpait peu à peu, mais le lacet de sa cuirasse se prit dans une agrafe de Clytemnestre, et elle s'ouvrit. Alors il ne résista plus, il secouait seulement son bras droit, et l'on sentait que s'il voulait maintenant se débarrasser de la reine, ce n'était plus pour combattre seul, mais pour mourir seul, pour être couché dans la mort loin de Clytemnestre. Et il n'y est pas parvenu. Et il y a pour l'éternité un couple Clytemnestre-Égisthe. Mais il est mort en criant un nom que je ne dirai pas. LA VOIX D'ÉGISTHE, au-dehors. Électre... LE MENDIANT J'ai raconté trop vite. Il me rattrape.

Situation du texte

À la fin de l'avant-dernière scène de la pièce, il rapporte le meurtre justicier de Clytemnestre et Égisthe par Oreste. C'est le dénouement de l'action dramatique.

Composition du passage

Le texte raconte une action unique, le meurtre, mais on peut cependant distinguer deux centres d'intérêt successifs : la mort de Clytemnestre (jusqu'à «sa seule chance désormais dans la vie de se tenir debout«) et celle d'Égisthe (de «Mais elle empêchait Égisthe de dégainer...« jusqu'à la fin).

Enjeu du texte

Moment attendu, le dénouement est souvent violent. Il dot le mouvement de la pièce vers la justice. Cependant, il révèle d'Égisthe une image magnifiée, en décalage avec les modèles tragiques antérieurs.

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« Depuis le début de la pièce, le mendiant, personnage créé par Giraudoux, tient le rôle qui revenait au choeur dans latragédie antique.

Mais, plus qu'un simple récitant, le mendiant apparaît comme un intermédiaire avec les dieux, il voitce que les autres ne voient pas.

L'étude des temps dans cet extrait montre que le mendiant est un personnage quipossède les attributs surnaturels d'un devin.

En effet, son récit mêle le passé (énumération d'actions au passésimple : «délièrent», «il se précipita», «il atteignit...», temps du récit), le présent (»il y a pour l'éternité un coupleClytemnestre-Égisthe», temps du commentaire, du jugement, de la vérité) et le futur (. »

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