ÉMIGRATION (littérature de l')

ÉMIGRATION (littérature de l') [1789-1815]. « Dans les histoires de la Révolution, on a oublié de placer le tableau de la France extérieure auprès du tableau de la France intérieure, de peindre cette grande colonie d’exilés, variant son industrie et ses peines de la diversité des climats et de la différence des mœurs des peuples. En dehors de la France, tout s’opérant par individu, métamorphoses d’états, afflictions obscures, sacrifices sans bruit, sans récompense; et dans cette variété d'individus de tout rang, de tout âge, de tout sexe, une idée fixe conservée : la vieille France voyageuse avec ses préjugés et ses fidèles, comme autrefois l’Église de Dieu errante sur la terre avec ses vertus et ses martyrs » {Mémoires d'outre-tombe, livre X, chapitre viii).

En ces quelques lignes, Chateaubriand caractérise l’émigration et laisse pressentir ce que fut sa production littéraire : les épreuves de l’exil, les bouleversements de la vie personnelle, la découverte d'autres horizons et d'autres formes de sensibilité — autant de conditions pour un renouvellement qui fera dire au même Chateaubriand : « Le changement de littérature dont le xixe siècle se vante lui est arrivé de l’émigration et de l’exil ».