Jean GIONO - Le hussard sur le toit
Publié le 08/12/2013
Extrait du document

[Durant la grande épidémie de choléra qui sévit en Provence au milieu du
XIXe siècle, le héros du Hussard sur le toit, Angelo, perché sur les toits de
Manosque, assiste à une procession destinée à conjurer les forces du mal.]
Bien longtemps avant que le soleil se lève, une petite cloche se mit à
sonner dans les collines. Il y avait de ce côté-là, sur une éminence
couronnée de pins, un ermitage semblable à un osselet. La lumière
encore relativement limpide permettait de voir un chemin qui y
montait en serpentant à travers une forêt d'amandiers gris.
Le petit vitrail commença à transmettre par le tremblement de ses
verres dans leurs cercles de plomb une sorte d'agitation qui bougeait
dans les profondeurs de l'église. Les grandes portes sur lesquelles on
avait vainement frappé la veille s'ouvrirent. Angelo vit s'aligner sur la
place des enfants vêtus de blanc et qui portaient des bannières. Les
portes des maisons commencèrent à souffler quelques femmes noires
comme des fourmis. D'autres venaient par les rues qu'il voyait en
enfilade. Au bout d'un moment, en tout et pour tout, ils devaient être
une cinquantaine, y compris trois prêtres recouverts de carapaces
dorées qui attendaient. La procession se mit en marche en silence. La
cloche sonna longtemps des coups espacés. Enfin, les bannières
blanches apparurent sous les amandiers gris, puis les carapaces qui,
malgré l'éloignement, restèrent dorées, puis les fourmis noires. Mais,
pendant que tous ces petits insectes gravissaient lentement le tertre, le
soleil se leva d'un bond. II saisit le ciel et fit crouler en avalanche des
plâtres, des craies, des farines qu'il se mit à pétrir avec ses longs
rayons sans iris. Tout disparut dans cet orage éblouissant de blancheur.
Il ne resta plus que la cloche qui continua à sonner à grands
hoquets; puis elle se tut.
Cette journée fut marquée par une recrudescence terrible de la
mortalité.
Vous ferez de ce texte un commentaire composé, à l'occasion duquel vous pourrez montrer par exemple par quels procédés l'auteur, en s'aidant du regard de son personnage, donne à voir et à juger la réalité. Mais ces indications ne sont pas contraignantes et vous avez toute latitude pour organiser votre commentaire à votre guise. Vous vous abstiendrez seulement de présenter une étude juxtalinéaire ou séparant artificiellement le fond de la forme.

«
DIFFICULTÉS...
CONSEILS...
PROPOSITIONS ...
• On peut faire une double lecture de ce texte : au premier degré,
on peut y voir l'exaltation du paysage provençal cher à Giono.
Mais
on peut aussi
lire cette évocation, sous l'angle ironique du regard
d'Angelo, le « hussard sur le toit ..
, comme la mise à mort d'une
procession, c'est-à-dire comme
la description de l'échec de l'homme
à maîtriser l'univers qui l'entoura.
•
Dans cette perspective, commentez l'expression : « en tout et
pour tout,
ils devaient être une cinquantaine ».
• Suggestions : 1.
Étudiez le rythme et les sonorités de la phrase
qui marque
la victoire du soleil : « Il saisit le ciel.
..
,.
2.
Comparez cette page au passage de la procession dans Manon
des sources de Marcel Pagnol.
Quelle différence observez-vous?
(Autre comparaison
possible : cf.
le chapitre consacré à la cérémonie
religieuse de Bray-le-Haut dans le Rouge et le Noir de Stendhal I, 18.)
CORRIGÉ ...
CORRIGÉ ...
CORRIGÉ...
CORRIGÉ ...
PLAN DÉTAILLÉ-----------------
Introduction
• Le choix de Giono dans le Hussard sur le toit, roman publié en
1951 : placer un homme (Angelo) dans une totale solitude, le
préserver du destin commun (le choléra qui sévit à Manosque) et
lui offrir l'avantage d'une
« vision » supérieure (du toit où il est
réfugié, Angelo assiste aux allées et venues des habitants de la ville
et ici à la procession par laquelle ils entendent conjurer la maladie).
• D'une contrainte narrative (la« vision » d'Angelo ), le roman
cier tire une double liberté : celle de voir le monde autrement
et
celle de le juger avec le détachement et la distance que permet la
situation du héros.
• Ce qui est vu (les préparatifs puis la procession elle-même)
prend donc une dimension insoupçonnée (par ceux qui vivent
« normalement », c'est-à-dire en bas) : en effet, des toits, Angelo
voit plus loin et plus haut que tous.
Il
va donc assister au combat
perdu d'avance que livrent les hommes contre les forces de la
nature.
• Deux aspects seront donc abordés :
1.
Le monde vu des toits.
2.
Une bataille perdue..
»
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