La littérature espagnole

« LES GRANDES HEURES DE LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE La littérature espagnole est d'une infinie variété ; aussi la présentation qui va suivre ne saurait être exhaustive pour une telle histoire culturelle, intense en quasi-continuité .

Il est bon de noter combien nombre d'auteurs espagnols, farouchement attachés à leur pays , semblent -dans la réussite ou les vicissitudes historiques -accompagner l'histoire de ce dernier.

Voici un aperçu chrono logique de cette littérature , que l'on peut considérer comme un des plus beaux héritages européens.

à la première personne, est l'œuvre d'un Castillan mal connu.

Il mêle récit, poésie et passages didactiques , mettant en scène l'Espagne sur un mode ironique.

Il préfigure le roman picaresque.

Le Poème du Cid (v.

1140) .

Œuvre épique racontant les exploits d 'un seigne ur de guerre.

LES GENRES LITTÉRAIRES MÉDIÉVAUX Le Moyen Âge est à l'origine de plusieurs genres littéraires , notamment poétique, promis à des avenirs plus que flatteurs.

• Les concioneros Les cancioneros sont des anthologies poétiques de cantigas.

Elles ___________ _, apparaissent au xm• siècle et séparent les chansons en trois genres : les cantigas de amor et de amigo qui traitent de l'amour courtois et les cantigas de maldecir, à vocation satirique .

Le cancionero dit de Baena , imposant recueil galicien ­ castillan paru en 1445 est un des plus célèbres .

Les XV' et XVI' siècles connaîtront de nombreux cancioneros , la cantiga étant aménagée sous la plume des meilleurs écrivains : canci6n lyrique , proche de la complainte , villancico, long chant plus populaire , serranilla, pastourelle montagnarde, ou encore zarzuela, épilogue théatral chanté .

i!fH!Œiiiii Le Moyen Âge est une période où la littérature, objet de transmission orale et écrite, relègue les auteurs en arrière-plan.

Les textes fondateurs sont marqués par l'oralité et les différences dialectales propres aux régions (castilla n, galicien).

C'est aussi une époque d'intense création de genres littéraires, à laquelle toute la littérature espagnole à venir se référera.

LA UrrtRATURE MOZARABE (AUAMIADA) Dès le début du Xl' siècle, apparaissent en Andalousie arabe des poème s courts, mêlés de langue arabe et romane, inspirés de la poésie arabe­ andalouse, les jarchas .

Ils sont composés en langue casti llane mais transcrits en caractères arabes ou hébraïques.

Ce sont les prémices de la poésie espagnole .

LES GRANDES ŒUVRES Amadis de Caule (première version) de du même nom, dont on ne connaît pas l'auteur.

Il est un point d'ancrage de la vogue à venir du roman de chevalerie.

Il existe plusieurs versions d'Amadis (celle de 1508 reste la plus connue).

L'Histoire du Chevo/ier de Dieu qui ovoit pour nom Cifor Premier roman de chevalerie, d 'un auteur inconnu.

Datant du début du xiV' siècle, c'est une œuvre de type byzantin, riche en péripéties .

On y conte les déboires du chevalie r Cifar, exilé de l'Inde avec femme, enfants, son écuyer Ribaldo et comment il devint seigneur de Menton.

Livre du bon omour de Juon Ruiz , archiprêtre de Hita (1285 -1350) .

Ce roman d'amour composite, rédigé • Les coplos Ces stances médiévales, à la mélanco lie si part iculière , sont savamment rythmées.

Leurs couplets compte nt douze vers octosyllabiques dont quatre mineurs.

• Les romonceros Le romance est un poème lyrique ou narratif en vers octosyllabiques.

Les romances sont rassemblés dans des romanceros.

L'histoire littéraire distingue le romancero viejo, recueil d'auteurs inconnus du Xlv' siècle ; le romancero nuevo (1580- 1650 ), préservant l'illusi on de l'anonymat, mais plus personnel et enrichi par des écrivains de renom (Lope de Vega , Luis de G6ngora, Francisco G6mez de Quevedo) ; le romancero maderno renouvelé par les poètes des« générations » de 1898 et 1927 .

DES AUTEURS MEoiÉVAUX TARDIFS liiigo L6pez de Mendozo, dit le morquis de Sontil/ono (139& 1458) .

Amateur éclairé, il écrivit une lettre (prohemio) sorte de récapitulatif des genres poétiques de son époque.

On lui doit 19 chanson s, 8 pastourelles et 42 sonnets d'inspiration italienne .

lorge Manrique (1440-1478 ).

Auteur de poèmes d 'amour , de poésie burlesque , Jorge Manrique est connu pour ses stances.

Ses Copias por la muerte de su padre Don Rodrigo (1480 ) sont une œuvre médiévale majeure .

Juan de Mena (1411 -1456) .

Auteur d'un long poème allégorique latinisan~ Loberinto de Fortuno .

C'est un poète plus simple et plus émouvant dans son poème inachevé Copias contra los pecados morales .

i!JMI"BII Le XVI' siècle littéraire espagnol est riche et inventif dans les genres déjà fixés (la poésie), mais apporte des améliorations décisives dans l'art du récit.

Il préfigure aussi l'explosion théatrale du siècle suivant.

La culture espagnole est alors animée d 'une grande piété et d'une immense curiosité pour le monde profane .

LA POÉSIE : UN ART SUBLIME, DES ARTimS D 'EXCEPT ION Juan Boscan Almogaver (1490- 1542) .

Auteur de cancioneros et initiateur avec son ami Garcilaso du sonnet à l 'rtalienne en hend écasyl labes et heptasyllabe s , la lira.

Gorciloso de lo Vego (1501 - 1536) .

Soldat et homme de cour casti llan, né à Tolède.

Entré en 1520 à la Garde royale , il réside à Naples avec l'emper eur en 1532 où il découvre l'Arioste .

Combattant et poète , il chante la douceur , l a nature et la tristes se du sang versé .

Associant l'églogue latine (poème pastoral) à une métrique nouvelle, il y développe un lyrisme raffiné .

Il consacra essentiellement son œuvre à l'amo ur contrarié, imitant le Canzoniere de Pétrarque .

L'ART DU RÉCIT E N PROSE L'Abencéroge Bel exemple de nouvelle édifiante.

Incluse dans Ellnventario (miscellanées de Medina del Campo, 1565), elle met en scène deux seigneurs chrétien et arabe faisant assaut d'honneur l'un envers l'autre malgré leur statut respectif de vainqueur et de prisonnier .

Amodis de Goule Ce cycle, proche du Lancelot en prose, est d'origine inconnue .

Vers 1492, Garcia Rodriguez de Montalvo corrigea les trois premiers livres .

Il leur joignit un quatrième , accompagné du récit des Exploits d 'Esplandian .

Amadis est u n parangon de l'ordre chevale resque et courtois .

Épris d 'Oriane, il combat monstres et enchantements avant de se retirer dans 111e Ferme.

Paru en 1508, l'ouvrage connut un succès européen et fut abondamment adapté.

Lo Vie de Lozorillo de Tormès Datant de 1554 , cette œuvre est un roman picaresque avant la lettre .

Fiction autobiographique, elle narre les aventures immora les d'un parasite dans différents milieux de l'Espagne du XVI' siècle, croqués par l'auteur dans un esprit de satire médiévale .

Mis à l'index en 1559, le livre ne reparait qu'en 1573 .

L'Europe littéraire t irera profit de cette œuvre grace à ses nombreu ses traductions et adaptat ions.

LES RÉCITS DES EXPLORATEURS ET CONQUÉRANTS La littérature rejoint cepe ndant un leitmotiv de la culture espagnole du début du XVI' siècle conce rnant l'ame des Indiens soumis à la conquête .

Bartolomé de Las Casas (1474 - 1566) .

Premier évêque de Chiapa, il est dans son Bref récit de la destruction des Indes (1552) l'un des rares auteurs à s'élever contre les méfaits de l'invasion espagnole.

LA LITTÉRATURE SPIRITUELU Fray Luis de Le6n (1527- 1591 ).

Hum aniste féru de P laton et des poètes latins, commentateur de la Bible, enseignant à l'université de Salamanque, emprisonné par l'Inquisition de 1572 à 1576.

En 1583, parait le commenta ire symbolique des Noms du Christ et son traité La parfaite épouse o ù la prose espagnole atteint son suprême degré d'épure.

Sa sensibili té lyrique s 'épanouit aussi dans ses Odes .

Il inspira maints poètes espagnols .

Saint lean de la Croix (1542-1591 ).

Poèt e mystique , d isciple et compagnon de Sainte Thérèse d 'Avila.

Il recourt aux formes et à l'imagerie de la poésie amoureuse pou r décrire le chemin mystique de l 'ame vers Dieu .

Ses deux premiers recuei ls, La nuit obscure et La vive flamme d 'amour, paraissent en 1618 , le dernier, Cantique spirituel , en 1627.

Il pratique le sonnet de Garcilaso , la lira, le romance et le villancico .

Cette œuvre courte irradie toute la poésie espagnole .

Sointe Thérèse d 'Avilo (1515-1582) .

Réformatrice du Carmel, née dans une famille noble castilla ne.

Sa vie S nous est connue ~ ~ ' grace au Livre de la vie (1562 ) et au Livre des fondations .

Elle expose sa doctrine mystique dans Le Chemin de la perfection (1565- 1570) et le Château intérieur ou Livre des demeures (1577 ).

Son propos n 'est pas exempt d'humour et de saveur , com me il apparaît dans ses Lettres familières.

LES PRÉMICES D U THÉATRE Juan Del Encina (1469 -1529 ).

Musicien , maitre de chapelle à Salamanque et précurseur du théatre du Siècle d'or.

On lui doit l'introduct ion du profane dans le théâtre espagnol et la précieuse invention du gracioso, le bouffon parlant le savagués, le dialecte salamanquais .

Ses pièces se termina ient par des poèmes chantés , à la mode castillane , les villancicos, qui inspireront les futures zarzuelas .

Fernando de Rojas (v.

1465 -1541 ).

La seule pièce qu'on lui connaisse a illuminé le théâ tre de cette période : La Tragi-comédie de Calixte et Mélibée , plus connu sous le titre de La Célest ine.

La pièce raconte la rencontre funeste entre une belle roturière , Mélibée, un jeune noble , Calixte, et une entremetteuse Célestine .

Le charme et les sources éclectiques de ce divertissement annoncent la come dia.

On l'appelle le Siècle d 'or, non sans une certaine ambiguM historique , puisque l'Espagne se fragilise à cette époque.

Mais l'acti vité littéraire est à son apogée : tous les genres littérai res étant formés, les écrivains surent en exploiter les possibilités.

Mateo Aleman (1547 -1615).

Son Guzmtin de Alfa roche (1599 et 1604 ) est une fictio n autobiographique truculente mettant en scène un picar6 marqué par l'infami e .

Se plaisant à survi vre, cet anti-héros développe une pensée égalitariste et négatrice des vale urs de l'ordre social espagnol.

Ce roman picaresque suscitera de nom breuses imitations européennes de grande valeur .

Colder6n de lo Borco (1600 -1681).

Son théatre baroque mêle deux voix essentielles à la culture espagnole du XVII' siècle : celle de la sensualité , incarnée par le gracioso , et celle de l'idéalisme (la paro le de l'aristocratie ).

Après la mort de Lope de Vega (1635 ), il devient favori de la Cour .

Ordon n é prêtre en 1651 , il officie à Tolède sans jamais cesser d'écrire .

Son théâtre illustre les conflits moraux , politiques ,.

amoureux, de son temps , dont il p ropose les solutions (M é decin de son honn eur, Dame ou fant6me , L'Alcade de Zalamea ,. »