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LA LITTÉRATURE FRANÇAISE DU XVIIIe SIÈCLE : LA POÉSIE

Publié le 18/10/2011

Extrait du document

UN SEUL GRAND LYRIQUE CHENIER (1762-1794)

Le fait est bien connu : la poésie ne fut jamais aussi pauvre en France qu'au siècle des lumières, comme si tant d'esprit, tant de savoir et de raisonnement eussent effarouché les muses amies du mystère. Et pourtant, l'on n'y versifia jamais autant. Presque tous les prosateurs s'exprimèrent aussi en vers. Le maître de la prose française, Voltaire, ne donnait-il pas l'exemple en se répandant dans tous les genres poétiques ?

« que peu.

Encore faut-il souligner que ce culte des Grecs ne venait pas seulement au poète de ses propres origines hellènes mais qu'il se conformait là à un golit extrêmement ré­ pandu chez ses contemporains.

Au surplus, sa science en ce domaine n'avait rien de super­ ficiel.

Il ne s'était pas contenté de s'enivrer du Jeune Anacharsis mais s'était pénétré de savants ouvrages, tels que L'Histoire de l'art dans l'An­ tiquité de Winckelmann.

Du reste, dans les Bucoliques et les Idylles, parmi lesquelles figu­ rent quelques-uns de ses morceaux les plus célèbres - Nérée , La Jeune Tarentine -, une émotion très personnelle, sensible surtout par la musique du vers et le choix quasi sensuel des termes, se marie à l'imitation systémati­ que des Anciens.

Que le disciple un peu ronsardisant de Tibulle et d'Horace ne nous fasse pas méconnaitre qu 'il y eut aussi, chez Chénier, un penseur.

Hermès est un vaste chant à la gloire des progrès récents de la science.

Il nous en reste seulement des fragments.

Faut-il croire, avec Emile Fa­ guet, que ce poème elit été « vraisemblablement le plus beau poème philosophique de toute la littérature française » ? On hésite.

Il y a là du didactisme.

Mais cette ambitieuse entre­ prise montre à quel point Chénier fut péné­ tré de l'idéologie et des rêves de son siècle.

« Sur des pensers nouveaux, faisons des vers antiques ».

La poétique dont il nous livre les principes, précisément dans le poème qui devait servir de préface à Hermès, nouvelle théorie de l'invention qui rappelle curieusement les idées de du Bellay, répondait chez lui à un dessein très profondément réfléchi.

Dessein qu'il n'eut pas le temps de réa­ liser.

Les Iambes, composés à Saint-Lazare, nous livrent le dernier mot, ou plutôt le dernier cri de cette fulgurante carrière poé­ tique.

Dans ce pamphlet déchirant, tout em­ preint d'une fière colère de palen rebelle à la résignation, le poète qui chaque jour s'attend à mourir : Au pied de l'échafaud j'essaye encor ma lyre, Peut-être est-ce bientôt mon tour, rejette sans plus y songer toute servitude poétique hors celle du nombre et du rythme - et quel rythme 1 -; il n'est plus qu'un pur lyrique, certainement le plus conscient, le plus virilement équilibré de notre litté­ rature, et qui, peut-être, en elit été le plus accompli si un absurde destin n'avait fau­ ché cette tête si bien construite à la fleur de l'âge et du talent ! Citations NICOLAS GILBERT ..

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Au banquet de la vie, Infortuné convive, J'apparus un jour, et je meurs ; Je meurs, et sur la tombe où lentement j'arrive, Nul ne viendra verser des pleurs.

Salut, champs que j'aimais, et vous, douce verdure Et vous, riant exil des bols 1 Ciel, pavillon de l'homme, admirable nature, Salut pour la dernière fols 1 Ah ! Puissent voir longtemps votre beauté sacrée Tant d'amis sourds à mes adieux 1 Qu 'lis meurent pleins de jours, que leur mort soit fleurie Qu'un ami leur ferme les yeux 1 JACQUES DE MALFILATRE Narcisse 0 belle nuit 1 Nuit préférable au jour Première nuit à l'amour consacrée ! En sa faveur prolonge ta durée , Et du soleil retarde le retour.

Et toi, Vénus, qui présides sans cesse A tous les pas de tes chastes enfants, Qui les unit, sans témoins , sans promesses, (Précaution dont ces heureux amants N'ont pas besoin pour demeurer constants) Tendre Vénus, lorsque sous tes auspices , De tes plaisirs, ils cueillent les prémices , Descends , allume, et rallume leurs feux, Et dans leurs sens, invisible auprès d'eux, Verse les flots de tes pures délices .

ANDRE CHENIER Iambes Comme un dernier rayon, comme un dernier zéphyre Anime la fln d'un beau jour, Au pied de l'échafaud j'essaye encor ma lyre, Peut-être est-ce bientôt mon tour 1 Peut-être avant que l'heure en cercle promenée Ait pesé sur l'émail brillant, Dans les soixante pas où sa route est bornée, Un pied sonore et vigilant ; Le sommeil du tombeau fermera ma paupière Avant que de ses deux moitiés Ce vers que je commence ait atteint la dernière, Peut-être en ces murs effrayés Le messager de mort, noir recruteur des ombres, Escorté d'Infâmes soldats, Ebranlant de mon nom ces longs corridors sombres, Où, seul dans la foule à grands pas J ' erre aiguisant ces dards persécuteurs du crime, Du juste trop faible soutien, Sur mes lèvres soudain va suspendre la rime; Et, chargeant mes bras de liens , Me traînant, amassant en foule à mon passage Mes tristes compagnons reclus, Qui me connaissaient tous avant l'affreux message, Mals qui ne me connaissent plus.

Eh bien 1 j'al trop vécu ! Quelle franchise auguste, De mâle constance et d'honneur , Quel& exemples sacrés doux à l'âme du juste, Pour lui quelle ombre de bonheur, Quelle Thémis terrible aux têtes criminelles, Quels pleurs d'une noble pitié, Des antiques bienfaits quels souvenirs fidèles, Quels beaux échanges d'amitié, Font dignes de regrets l'habitacle des homme s La peur fugitive est leur Dieu; La bassesse ; la feinte 1 Ah 1 lâches que nous sommes, Tous , oui, tous.

Adieu, terre, adieu .

Vienne, vienne la mort ! Que la mort me délivre ! Ainsi donc, mon cœur abattu Cède au poids de mes maux ? Non, non, pulssè-je vivre Ma vie Importe à la vertu .... »

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