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L’ACCUEIL DE LA CRITIQUE ET LA POSTÉRITÉ: Madame Bovary de Gustave Flaubert

Publié le 22/01/2020

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bovary

que lui ferait l’auteur de son projet, il en retrouve les intentions, et montre enfin comment il voit l’héroïne de Flaubert :

« ... je marcherai appuyé sur l’analyse et la logique, et je prouverai ainsi que tous les sujets sont indifféremment bons ou mauvais selon la manière dont ils sont traités, et que les plus vulgaires peuvent devenir les meilleurs.

« Dès lors, Madame Bovary - une gageure, une vraie gageure, un pari, comme toutes les œuvres d’art - était créée. Il ne restait plus à l’auteur, pour accomplir le tour de force dans son entier, que de se dépouiller (autant que possible) de son sexe et de se faire femme. Il en est résulté une merveille; c’est que, malgré tout son zèle de comédien, il n’a pas pu ne pas infuser un sang viril dans les veines de sa créature, et que Madame Bovary, pour ce qu’il y a en elle de plus énergique et de plus ambitieux, et aussi de plus rêveur, Madame Bovary est restée un homme. Comme la Pallas armée, sortie du cerveau de Zeus, ce bizarre androgyne a gardé toutes les séductions d’une âme virile dans un charmant corps féminin. »

Duranty, « l’un des pionniers du Naturalisme », au dire de Zola, avait créé en novembre 1856 la revue Le Réalisme. C’est là que ce jeune écrivain, qui parlera bien, plus tard, des Impressionnistes, fait paraître, le 15 mars 1857, son article sur Madame Bovary. On le sent un peu contraint :

« Pas une main, pas un pied ne bouge, qu’il n’y ait deux ou trois lignes pour les décrire. Il n’y a ni émotion, ni sentiment, ni vie dans ce roman, mais une grande force d’arithméticien qui a supputé et rassemblé tout ce qu’il peut y avoir de gestes, de pas ou d’accidents de terrains dans des personnages, des événements et des pays donnés. Ce livre est une application littéraire du calcul des probabilités. »

George Sand ne pouvait admettre l’impersonnalité en art. Et elle posera de nouveau le problème du but de l’art, déjà évoqué dans l’article de Sainte-Beuve, dans sa lettre du 12 janvier 1876 à Flaubert :

« Il faut écrire pour tous ceux qui ont soif de lire et qui peuvent profiter d’une bonne lecture. Donc il faut aller tout droit à la moralité la plus élevée qu’on ait en soi-même et ne pas faire mystère du sens moral et profitable de son œuvre. On a trouvé celui de Madame Bovary. Si une partie

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« l'attention par sa prescience, eu égard à l'évolution du roman français dans la deuxième moitié du siècle : " L'affectation de langage s'allie mal à la dureté du trait.

Drapés dans cette défroque du romantisme, les personnages de Monsieur Flaubert, si peu flattés du côté moral, ressem­ blent parfois à ces intrigants des vieilles comédies, qu'on voit, courant les ruelles, couverts de paillettes et de broderies d'emprunt.

Dans Madame Bovary, si elle peut vieillir, il y a tout l'avenir d'une marchande à la toilette.

" Ces deux articles ne furent sans doute pas jugés assez sévères par un certain Aubineau, qui écrivit dans l'Univers du 26 juin 1857, prenant bien soin de ne pas salir sa plume en citant le titre de l'ouvrage ou le nom de l'auteur : cc L'alarme du ministère public, l'arrêt de la justice, l'applaudissement du Moniteur et les réserves du Journal des débats ne peuvent donner de la valeur à l'œuvre laborieuse, vulgaire et coupable, dont nous parlons.

[ ...

] " Commençons par déclarer que le livre est de telle nature qu'il est impossible d'en donner ici une analyse.

L'art cesse du moment qu'il est envahi par l'ordure.

" La partialité et la sottise poussées à ce point amusent.

Flaubert s'en réjouit.

" Les mânes d'Homais se vengent >>, écrivit-il à un ami.

Que pensaient les écrivains de Madame Bovary? Dans le Pays du 6 octobre 1857, Barbey d'Aurevilly -qu'on ne peut s'attendre à voir reprocher son immoralité au livre -met l'accent sur l'impassibilité de l'auteur et sur sa prétendue indifférence : " Monsieur Flaubert est un moraliste, sans doute, mais il n'a point d'émotion, -il n'a point de jugement, du moins appréciable.

C'est un narrateur incessant et infatigable, c'est un descripteur jusqu'à la plus minutieuse subtilité, mais il est sourd-muet d'impression à tout ce qu'il raconte.

Il est indifférent à ce qu'il décrit avec le scrupule de l'amour.

Si l'on forgeait à Birmingham ou à Manchester des machines à raconter ou à analyser, en bon acier anglais, qui fonctionne­ raient toutes seules par des procédés inconnus de dynamique, elles fonctionneraient absolument comme Monsieur Flau­ bert.

» Baudelaire lui rend beaucoup plus finement justice dans l' Artiste du IO octobre 1857.

Feignant d'écouter l'exposé - 16 -. »

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