Devoir de Philosophie

L'ART DE VOLTAIRE ET VALEUR DE SON OEUVRE

Publié le 04/04/2011

Extrait du document

voltaire

   1° L'ART DE VOLTAIRE    Diderot a dit de Voltaire que c'était un «touche à tout de génie. Il n'avait certes pas l'étendue des connaissances de Diderot, mais sur tout il avait son mot à dire et il l'a dit : poésie, histoire, théâtre, physique, belles lettres, mathématiques, médecine, histoire naturelle, jurisprudence, théologie, exégèse, rien ne lui était inconnu. Il n'était pas profond, mais il était universel. Sa curiosité toujours en éveil se révèle surtout dans sa Correspondance, ce monument extraordinaire de dix mille lettres, qu'il a adressées à plus de sept cents correspondants, pendant près de soixante-dix ans. Comme Mme de Sévigné, il était avide de tout connaître et de tout faire connaître. Il s'y exprimait tout entier avec le plus grand abandon, mais il y relatait aussi tous les événements, petits ou grands, dont il avait été le témoin ou le confident. Il se faisait l'« échotier « de son siècle1. A cette universalité et à cette curiosité de « reporter «, il joignait une variété étonnante de la forme et du ton. N'est-ce pas là le meilleur gage de réussite pour un journaliste?

voltaire

« Dans son ouvrage où il définit les tendances générales de la littérature au XVIIIe siècle, M.

E.

Caro écrit : « Sansmême parler de cet art licencieux qui fut mis au service de l'esprit nouveau, ne doit-on pas regretter cette habitudede rire toujours et de plaisanter à tout propos, qui est le caractère propre de ce qu'on a appelé le Voltairianisme etqui se manifeste par l'absence de sérieux, même dans les sujets les plus modestes ».

Le jugement est sévère, car ily a autre chose chez Voltaire que le désir d'amuser et de faire de l'esprit.

Non seulement on trouve dans son œuvredes pages fort sérieuses, des élans sincères d'admiration ou de protestation indignée, mais encore il blâme larecherche perpétuelle de l'esprit qu'il définit comme une affectation de dire en énigmes ce que d'autres ont dit déjànaturellement, de mêler contre les bienséances le badinage avec le sérieux et le petit avec le grand (Dict.

Phil.,article Esprit).

C'est que pour lui l'esprit n'est pas une fin en soi, mais un moyen. Et ce moyen, il l'a mis au service de sa propagande et il en a fait une arme terrible ; c'est la raison pour laquelle sesadversaires n'ont voulu voir en lui que son « hideux sourire ». Un des buts qu'il se propose en effet le plus volontiers est de ridiculiser ceux qu'il condamne et il met ainsi les rieursde son côté.

Pour y parvenir, les ressources dont il dispose sont infinies.

En voici quelques-unes dans leur ordred'importance. Adversaire de la théorie des idées innées de Descartes, il écrit dans Micromégas : Le cartésien prit la parole et dit :« L'âme est un esprit pur qui a reçu dans le ventre de sa mère toutes les idées métaphysiques, et qui, en sortant delà, est obligée d'aller à l'école, et d'apprendre de nouveau ce qu'elle a si bien su et qu'elle ne saura plus » (chap.VII). Il écrit à Rousseau le 30 août 1755 : Il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. Imitant les images du style oriental, Zadig dit à ses juges : Étoiles de justice, abîmes de science, miroirs de véritéqui avez la pesanteur du plomb, la dureté du fer, l'éclat du diamant et beaucoup d'affinité avec l'or......

(chap.

III). Le Discours aux Welches oppose plaisamment la vanité des Français, qui se croient le premier peuple de la terre, etl'humilité de leurs origines, la barbarie de leurs ancêtres. Un ermite qui vient de recevoir une généreuse hospitalité confie à Zadig : « Je veux laisser à cet homme untémoignage de mon estime et de mon affection ».

En disant ces mots, il prit un flambeau et mit le feu à la maison. Imitant la grâce et les inversions du style marotique, à qui emprunte également le décasyllabe, il dit de nos premiersparents dans Le Mondain : Sobres étaient.

Ah! je le crois encor.

Martialo n'est point au siècle d'or.

D'un bon vin frais, ou la mousse, ou la sèveNe gratta point le triste gosier d'Ève. Candide fut fessé en cadence pendant qu'on chantait (Candide, chap.

vi — cf.

également L'Ingénu baptisé; chap.iv.)Ou bien il les accumule {Lettre pour la défense de la langue française à M.

Déodati, 24 janvier 1761); ou bien ilutilise une métonymie d'un effet grotesque (Potsdam est habité par des moustaches, dit-il des soldats de Frédéric.Lettre à Madame Denis du 13 octobre 1750), ou encore il imagine un nom de ville aux rauques consonances : La villede Valdberghoff-tzarbkdikdorff (Candide, chap.

11) pour se moquer de la langue allemande.

Parfois il donne à un motune étymologie fantaisiste : On écrivait autrefois deu ou dub, parce que dû est toujours dubium, mais dû, ou deu,ou dub il faut qu'il paye (Lettre du 25 novembre 1758 à Cideville). J'ai des chênes droits comme des pins, qui touchent le ciel et qui rendraient grand service à notre marine, si nous enavions une (Ibid.). N'hésitant pas à faire rire aux dépens de sa santé et de sa mine, il répand sur tout ce qu'il dit une grâce inimitable.Ce n'est pas seulement du badinage ou de l'humour, cette plaisanterie du « pince sans rire », si fréquente chez unMontesquieu; c'est un jaillissement, un feu d'artifice perpétuel et toujours naturel des inventions les plus imprévues.Il fallait être suprêmement intelligent pour écrire ainsi, et l'intelligence était la qualité maîtresse de Voltaire. Pourtant, en dépit de cet art et de toutes ces éblouissantes qualités qui lui ont valu l'immortalité, l'œuvre deVoltaire est de valeur inégale. 2° VALEUR DE SON ŒUVRE Chez Voltaire, en effet, le souci de variété répond moins à des préoccupations d'art qu'à une exigence de lapropagande.

C'est là qu'était l'écueil; car, malgré son universalité, Voltaire n'a pas tous les dons requis pour excellerdans tous les genres; d'autre part, il a trop une arrière-pensée de polémique et des partis pris philosophiques pourgarder toujours la sérénité ou l'impartialité nécessaires.

Voilà pourquoi, à côté de pages remarquables, il y a dansson œuvre, en vers comme en prose, une part importante de déchets.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles