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LE MONDE DES IMAGES

Publié le 01/11/2011

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                Dans Tintin au Congo, dessiné par Hergé en 1931, lorsque les habitants d'un petit village du Congo belge visionnent un film sur lequel on voit le sorcier local, manipulé par un colon, jeter un sort à Tintin, ils lancent leurs armes sur l'écran, pensant ainsi atteindre l'indigne sorcier et son complice.  Le cinéma procure un « effet de réel «, manifeste du pouvoir de l’image sur notre monde. Le monde des images et notre monde réel coexistent, chacun influant sur l’autre. Du latin imago « imitation «, l’image est la représentation plus ou moins exacte d’une réalité, elle est l’imitation du réel qui résulte de l’imagination reproductrice ou une représentation crée par l’esprit, fruit de l’imagination créatrice. Le débat autour de l’image se porte donc sur ce double sens de l’imagination : simple redoublement du réel ou découverte de la réalité de l’irréel ?

Ainsi quels liens se nouent entre le monde des images et le monde réel ?

Ce rapport peut être interprété comme une imitation imparfaite du réel, mais l’image peut permettre l’accès à la connaissance du monde réel et enfin permettre une maitrise du réel.

« L'image artistique n'est bien sûr pas la seule à être utile à notre compréhension du monde.

Le philosophe FrançoisDAGOGNET voit ainsi dans DIDEROT le « maître de l'image » parce qu'il a compris tout ce que celle-ci pouvait apporter à laconnaissance.

Les 3 129 planches de l'Encyclopédie mettent en œuvre un projet iconique ambitieux : transmettre les savoir-faire techniques grâce à l'image.

Dans le Prospectus qu'il publie en 1750 pour faire connaître le projet de l'Encyclopédie,Diderot explique que l'on comprend mieux les techniques par une figure que par un écrit.

Loin d'être de simples doublessuperflus, les gravures permettent d'aller à l'essentiel.

En mettant en évidence d'un coup d'œil l'architecture d'une machine,elles en disent par là bien davantage qu'un long discours.

Elargissant la réflexion de Diderot, Dagognet veut montrercomment l'image est apte à instaurer une nouvelle intelligibilité : « Aucune discipline, en effet, qui ne bénéficie de l'iconicité: depuis la physique, la cinématique, jusqu'à la technologie ou même la physiologie.

Partout s'imposent des dessins, destrajectoires, des courbes de niveau, des cartes, bref, des figures structurales et géométriques.

L'erreur serait de les tenir pourdes auxiliaires didactiques, de commodes illustrations, alors qu'elles constituent un instrument heuristique privilégié : nonpas un embellissement, une simplification, ou encore un moyen pédagogique de transmission facilitée, mais une véritablenéo-écriture, capable, à elle seule, de transformer l'univers et de l'inventer.» (Écriture et iconographie).

L'image permet delivrer l'essentiel, la structure, de manière immédiatement lisible.

Le dessin anatomique qui représente le cœur, en sedétachant de la réalité complexe de l'organe, donne à voir sa structure fonctionnelle que cachait son volume charnu etcomplexe.

Il y a une véritable fécondité heuristique de l'image. Si l’image permet d’atteindre une connaissance du monde réel, elle est également la source d’une maîtrise du réel.L’imagination est au cœur de la liberté de l’esprit et l’artiste nous invite à voir l’invisible du monde réel. Dans ses œuvres, L’Imagination (1936) et L’Imaginaire (1940), Jean-Paul SARTRE fait l’analyse critique des conceptionsde l’image dans la philosophie classique ainsi que dans les théories psychologiques à fondement empirique, et propose unethéorie de la conscience intentionnelle qui irréalise le monde dans un écart rendu possible par la création d’images.

L’image,définie comme acte de la conscience et non comme une chose par Sartre, irréalise les représentations prises dans les piègesdes conventions, pour nous ouvrir au champ du possible.

L’image est l’acte de la conscience qui pose son objet commeabsent, comme un irréel.

Le problème de l’image est donc celui d’une « conscience imageante » dont l’objet se donne enimagination et non pas dans sa présence réelle.

L’objet en image existe dans l’irréalité où le constitue l’imaginaire du sujetimageant.

C’est en ce sens que la conscience peut échapper au monde, en s’en libérant, dans une position de retrait parrapport au réel qu’elle nie.

C’est à ce titre que les hommes peuvent manifester leur liberté dans l’égalité. L’imagination est également créatrice en permettant une maitrise du réel, ou comme le disait BACHELARD, en étantune « fonction de l’irréel » tt aussi utile que la fonction de réel.

Selon Bachelard l’image renvoie alors à un irréel qui puise sesracines dans le réel.

« On veut toujours que l’imagination soit la faculté de former des images.

Or elle est plutôt la faculté dedéformer les images formées par la perception, elle est surtout la faculté de nous libérer des images premières… Si uneimage présente ne fait pas penser à une image absente… il n’y a pas imagination.

Le vocable fondamental qui correspond àl’imagination, ce n’est pas image, c’est imaginaire ».

L’imagination ne crée pas vraiment, elle ne fait qu’inventer descombinaisons nouvelles avec des éléments donnés.

Cependant les combinaisons sont complètement libres.

L’imaginationmanifeste donc la liberté de l’esprit.

Elle se confond avec cette faculté que nous avons d’aller au-delà du donné, de penserl’absent, la passé, le futur, et le possible. L’image ne manque pas de briser le perçu et renouvelle notre vision du monde.

Le photographe Atget rend visiblel’invisible.

Il ne cherche plus à saisir ce que nous voyons mais s’attache à ce que nous ne voyons pas ou ce que nous neverrons plus.

L’image créatrice nous oriente vers l’absence et surtout nous délivre du réel.

Atget devait photographier desmétiers d’artisan en voie de disparition, mais plus encore les rues de Paris, les Champs Elysées, au petit matin, quand nousn’y rencontrons aucun passant.

D’autres photographes tentent d’appréhender un seul instant, le presque rien, le momentauquel se lève telle ou telle scène qui va aussitôt cesser.

L’artiste détache l’imprévu, le rare ou l’instant.

Baudelaire, hostile àla photographie mécanisée, demande son portrait à Nadlar.

« Quand je vois un bon portrait je mesure tous les efforts del’artiste qui a dû voir d’abord ce qui se faisait voir mais aussi deviner ce qui se cachait ». Le monde des images est semblable à un reflet du monde réel.

En tant qu’imitations, les images peuvent être sourced’erreur et tromper l’homme, mais paradoxalement elles sont un moyen pour faciliter la compréhension de notre monde.

Lesimages libèrent notre esprit des conventions du monde réel et nous ouvrent les yeux sur l’invisible.

Le pouvoir des imagessur l’homme influe notre vision du monde. Le 28 décembre 1895 à Paris eut lieu la première projection en public d'un film des frères Lumière, L'Arrivée d'un train en garede la Ciotat.

Cette séance devint vite célèbre, car on rapporte que les spectateurs s'affolèrent devant les images du trainfonçant dans leur direction, et que certains d'entre eux se cachèrent sous leur siège alors que d'autres s'enfuirent enhurlant...

Cette histoire révèle l’ « effet de réel » produit par les images de cinéma, bien supérieur à toutes les autres formesde représentations, car elles seraient les plus proches de la vision « naturelle » de l'œil humain.. »

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