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Le Parapluie de BRASSENS (commentaire)

Publié le 29/03/2011

Extrait du document

   I    Il pleuvait fort sur la grand-route, Ell' cheminait sans parapluie, J'en avais un, volé sans doute Le matin même à un ami. Courant alors à sa rescousse, Je lui propose un peu d'abri En séchant Veau de sa frimousse, D'un air très doux ell' m'a dit oui.    Refrain    Un p'tit coin d'parapluie, Contre un coin d'Paradis. Ell'avait quelque chos' d'un ange, Un p'tit coin d'Paradis, Contre un coin d'parapluie, Je n'perdais pas au change, Pardi!    II    Chemin faisant que ce fut tendre D'ouïr à deux le chant joli Que l'eau du ciel faisait entendre Sur le toit de mon parapluie. J'aurais voulu comme au déluge, Voir sans arrêt tomber la pluie, Pour la garder sous mon refuge, Quarante jours, quarante nuits.    (Au refrain)    III    Mais bêtement, même en orage, Les routes vont vers des pays. Bientôt le sien fit un barrage À l'horizon de ma folie. Il a fallu qu'elle me quitte, Après m'avoir dit grand merci.  Et je l'ai vue toute petite Partir gaiement vers mon oubli.    (Au refrain)    G. Brassens    Commenter Brassens c'est, malgré les apparences, très difficile. Parce que, le plus souvent, c'est transparent, et tout simplement aussi parce que c'est trop connu. Si les élèves (et nous) étaient rompus à l'analyse linguistique, ce problème de la transparence et de la « facilité « tomberait de lui-même, et lire ce serait « lire le travail du sens «. Malheureusement ce n'est pas en une année de première qu'on refait le parcours et il est très difficile de tout reconstruire.   

« Cette introduction-là envisage plutôt le commentaire comme une exploration du monde idéologique de Brassens.

Cecommentaire fera appel à d'autres poèmes ou chansons, parce qu'il n'est pas déraisonnable de penser que les élèvesconnaissent bien d'autres Brassens que le Parapluie. Trouver des idées... Chaque fois que se présente un texte de ce genre, moderne ou trop connu ou trop aimé, c'est à la même objectionque l'on se heurte : « Brassens, "ça" se lit ou "ça" s'écoute, "ça" ne se commente pas.

» Car le commentaire tue lecharme, impose un sens, etc.

L'obstacle psychologique au commentaire est si réel qu'il stérilise! D'où une premièrerecherche, qui vise à aider à trouver...

des idées. 1) Établir le scénario du texte : où se passe la scène? quand? qui est là et qui parle? 2) Si on rapproche ce texte d'autres chansons de Brassens, quels thèmes connus, quelles images peut-on repérer? 3) Pourquoi? Autrement dit, quel univers psychologique, moral, idéologique se trouve ainsi délimité? Le scénario Où? Sur une grand-route (au passage, il faudra faire un sort à l'archaïsme de l'expression).

En tout cas hors dudécor urbain.

La notation finale : « les routes vont vers des pays » est assez vague pour qu'il soit impossible delocaliser la scène.

Peut-être ce refus de la localisation est-il à interroger. Où ? Sous un parapluie.

Le parapluie, c'est un substitut sexuel, le rêve d'un lieu minuscule où l'on se serre.

Dans letexte, il devient : toit, refuge et surtout « coin d'paradis ». Quand? Impossible de le dire avec précision (comme le parapluie a été « volé le matin même », peut-être est-cel'après-midi).

Mais peu importe : c'est le temps non défini du désir. Qui est là? Un homme et une femme.

Un homme prévenant (pourquoi?).

Une femme-enfant, caractérisée par desmots qui appartiennent au code enfantin (frimousse, cheminer) ou au code romantique (ange).

Celui qui parle, c'estl'homme (parce qu'il mène le jeu, en apparence; la femme — c'est suggestif—est réduite à « oui » et à « grand merci», les mots même de l'acceptation et de la passivité).

Le texte distribue ainsi les rôles actif (l'homme invite, garde,rêve..., le « pardi » prouve assez que ce rêve n'est pas sans calculs!) et passif (la femme accepte et ne décide pasde partir : il a fallu qu'elle me quitte).«Le Parapluie» dans l'univers mental de Brassens 1) La femme : elle répond à l'image de la charmante ingénue; pas trop farouche (elle accepte de se faire abriter),mais « pure » (elle se sauve).

Elle ressemble beaucoup à celle de la Claire Fontaine.

Elle est, dans le monde deBrassens, l'ange, la figure inversée de la femme mûre, sensuelle et volontiers garce.

Surtout elle est douce etapparemment soumise, elle offre des instants de bonheur sans paraître même s'en rendre compte, etc. 2) L'amour : ébauché sous le parapluie, le flirt meurt en trois strophes.

L'amour c'est d'abord le désir de ne pas êtreseul; le bonheur facile de la présence physique de l'autre; le moyen de quitter cette terre pour arriver au paradis(qui s'appelle d'ailleurs le septième ciel...).

Mais c'est surtout quelque chose qui passe et qui, comme tel, sera sansdrame et sans conséquence : ainsi il ne s'agit pas de faire sa vie avec la jeune fille rencontrée, mais de passer prèsd'elle « quarante jours, quarante nuits », temps symbolique du déluge, pendant lequel il n'y a plus eu qu'un couplesur la terre, un couple chargé de « refaire le monde », ce dont rêvent tous les amoureux des chansons.

L'amour,pour rendre heureux, ne doit être ni mondain ni fatal.

Il n'y a pas de meilleur commentaire du Parapluie que les versde Brassens lui-même dans les Amours d'antan : Car le cœur à vingt ans se pose où l'œil se pose Le premier cotillon venu vous en impose...

On rencontrait la belleaux puces le dimanche Je te plais tu me plais et c'était dans la manche Et les grands sentiments n'étaient pas derigueur Je te plais tu me plais viens donc beau militaire Dans un train de banlieue on partait pour Cythère On n'étaitpas tenu même d'apporter son cœur Ou encore : Au second rendez-vous y avait parfois personne Elle avait fait faux-bond la petite amazone Mais on ne courait passe pendre pour autant... Ainsi le « dénouement » de cette amourette s'inscrit-il parfaitement dans le monde de Brassens, où un chagrind'amour s'apprivoise quand on l'appelle « une première arête » (Supplique pour être enterré sur la plage de Sète).Quant à la jeune fille évoquée, discrète, timide, elle n'appartient sûrement pas au monde des grandes coquettesmais à cet univers de la bohème du XIXe siècle, aux Fanchons, aux Mimi Pinson, à toutes les grisettes qui faisaientle bonheur des étudiants de Béranger! 3) La bohème : l'homme du Parapluie est un homme de nulle part, un homme des chemins et le malentendu entre luiet elle vient justement de ce qu'elle est de quelque part, d'un pays, d'une famille...

L'homme d'une certaine vie de. »

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