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Le personnage d'Égisthe d'Electre de Giraudoux

Publié le 07/01/2020

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UN AUTHENTIQUE CHEF D'ÉTAT

Ce portrait peu flatteur se modifie toutefois à partir de la scène 7 de l'acte II. Égisthe connaît une véritable mutation intérieure. Par amour pour Argos, il se transfigure en un roi digne de ce nom et d'une incontestable élévation morale.

La naissance d'un roi

Revenant d'inspecter son armée déployée pour contrer les Corinthiens, Égisthe contemple Argos depuis une colline qui la surplombe. La découverte de ce panorama agit sur lui comme une illumination. Il comprend soudain ce qu'est une ville (II, 7, p. 105). « C'est un immense corps à régir, à nourrir » (II, 8, p. 118). Voilà qu'il se prend à l'aimer et, en l'aimant, qu'il a la révélation des responsabilités qui sont les siennes. Le pouvoir, saisit-il, ne doit pas satisfaire la vanité, l'ambition et les caprices de celui qui l'exerce, mais il est service des autres et, s'il le faut, sacrifice de soi. Cette illumination, Égisthe la nomme un « don » : le « don » qui lui a été fait d'Argos pour qu'il la sauve.

Si elle éclate comme un coup de théâtre qui étonne tous les personnages, cette transfiguration morale ne relève pourtant pas du miracle absolu. Elle était prévisible. Le mendiant la pressentait : « Je savais que cela arriverait! Je vous l'ai dit hier. Je sentais que le roi allait se déclarer en vous » (II, 7, p. 100). Elle marque en effet l'aboutissement d'un travail obscur et intérieur. Dès l'acte I, quand il n’était encore que régent profitant des commodités du pouvoir, Égisthe se posait des questions, témoignait d'une inquiétude intellectuelle sur la finalité du pouvoir : à quoi sert-il ? A-t-on des comptes à rendre sinon aux hommes, du moins aux dieux (1,3, p. 28 et 29) ? Dans l'évolution d'Égisthe, Électre a également sa part, même si elle ne s'en est pas aperçue. Par son exigence de justice1, elle lui a appris que le « devoir »

giraudoux

« Ce renversement des données légendaires, Jean Giraudoux le justifie par des raisons généalogiques et politiques, jusqu'à lui fort peu exploitées.

Égisthe est l'oncle d'Électre, et le cousin ger­ main d'Agamemnon.

En l'absence d'Oreste, héritier légitime de son père, et dans l'impossibilité où se trouve une femme de gou­ verner1, c'est donc à l'homme le plus proche par la naissance du roi défunt de diriger Argos.

Cet homme est Égisthe.

Ses talents sont indéniables.

Depuis « sept ans i> qu'il gou­ verne, Égisthe a maintenu Argos dans l'opulence et la paix, alors que, dans la région, « les autres villes se consument dans les dis­ sensions » {I, 3, p.

30).

Lorsque les Corinthiens menacent puis envahissent Argos, Électre lui concède volontiers qu'il est Je seul capable de rétablir la situation (Il, 8, p.

115).

Un pouvoir cynique Régent légitime et efficace, Égisthe n'est pas toutefois exempt de vices et de défauts, du moins dans le premier acte.

S'il gouverne en fonction de l'intérêt général, il se montre peu scrupuleux sur les moyens.

Sa justice est arbitraire:« J'ai toujours feint, dit-il, d'attribuer une importance énorme aux délits et déri­ soire aux crimes ii (1, 3, p.

32).

Même s'il se donne l'excuse de protéger ainsi la ville des réactions des dieux qui n'aiment pas le désordre et qui châtient en bloc coupables et innocents 2, sa concep­ tion de la justice n'a rien de juste.

En effet, l'appareil judiciaire, représenté par le président, est à ses ordres.

Par ailleurs, les manières expéditives ne le rebutent pas : il exile ou fait exécuter quiconque transgresse gravement les lois.

Égisthe intervient jusque dans la vie privée de ses sujets : « J'ai ordonné, dit-il, le mariage des rêveurs, des peintres et des chimistes )} (p.

32).

Lui-même s'avère d'une moralité douteuse.

Amant de Clytemnestre et d' Agathe 3, Égisthe se reconnaît « jouisseur » et débauché.

Personne ne nourrit d'illusion sur sa nature.

Clytemnestre le considère comme un > puisqu'il la trompe; Électre, comme un « impie )), puisqu'il ne croit pas vraiment dans la bonté des dieux; Agathe comme un« infidèle)), puisqu'il la trompe avec 1.

L'armée, dit un officier,. »

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