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Le théâtre n'est pas le seul lieu où s'éprouve une «émotion collective » à notre époque. Vous direz dans une argumentation logique et à l'aide d'exemples précis quelles réflexions vous inspire cet état et les comportements qu'il peut entraîner.

Publié le 05/02/2013

Extrait du document

La perfection théâtrale repose sur une triple harmonie : entre les différents acteurs sur scène, entre les acteurs et le public, entre ce dernier et la pièce. Les acteurs s'accordent à faire de cette réceptivité du public la condition de leur excellence, et donc aussi de leur appréhension. Car le théâtre ne se fait que dans cet échange : il ne peut exister avec un acteur unique ou pour un spectateur isolé. Cette communion affective tient d'abord à la pièce elle-même, à son écriture, à son idéologie et au sentiment de complicité qu'elle fait naître chez le public ; mais elle est aussi indissociable de phénomènes propres au spectacle comme la proximité physique des participants et surtout un souffle commun...

« RÉSUMÉ -VOCABULAIRE -DISCUSSION a écrit Jouvet1, le frémissement voluptueux que donne /'entonnoir d'une salle de théâtre toute enduite d'humanité, cette amplification 15 de sensibilité, cet émoi dont on ne sait plus s'il est fait de tendresse ou d'horreur, lorsque le rideau se lève enfin dans le silence.

»Jean Vilar 1 va plus loin, et il appelle, pour porter le jeu à sa perfection, un public« croyant unanimement à quelque chose».

Nul doute que le théâtre ne soit par définition un art collectif; il l'est même 20 doublement, parce qu'il est difficile d'imaginer une pièce à un seul acteur (s'il est seul sur le plateau, au moins faut-il que ce qu'il dit ou ce qu'il entend suggère autour de lui des présences mystérieuses ou lointaines, comme c'est le cas avec La Voix humaine de Cocteau 2 ou, par d'autres moyens, avec L'Œuf de 25 Félicien Marceau 2), et surtout parce qu'on n'imagine pas un spectacle dramatique conçu pour un spectateur unique.

Quand Louis de Bavière 3 se paya le luxe de faire jouer une troupe pour lui seul dans une salle vide, on comprit qu'il était fou.

L'émotion propre au théâtre est collective ; elle suppose mais surtout elle 30 accentue une communion.

Celle-ci est obtenue par des moyens de nature fort différente.

Bien sûr, le texte et les idées qu'il porte, l'intrigue et les situations qu'elle crée, appelant les mêmes états de conscience et soulevant les mêmes passions chez les specta­ teurs, sont les facteurs principaux de la communion.

Mais il en 35 est d'autres, d'un caractère physique ou physiologique même, qui sont d'une si grande efficacité que l'on doit les tenir comme immanents à la nature du spectacle.

Dans un amphithéâtre ou dans une salle où des centaines ou des milliers de personnes non seulement regardent et entendent ensemble mais respirent en- 40 semble, il se crée une communauté par la contagion et par les rythmes du corps.

Jouvet disait qu'un texte « est d'abord une respiration».

Le souffle créateur du poète a donné à la phrase dramatique un rythme, une ampleur, une intensité de choc.

La voix de l'acteur la porte, la communique par une sorte de 45 mimétisme au public, et le public la reçoit comme le battement d'une mesure auquel sa propre respiration obéit.

D'ailleurs, l'éclairage particulier au théâtre, en attirant les regards sur un même point, contribue à créer l'obsession des images inventées par l'auteur, concertées par le metteur en scène et incarnées par 50 les acteurs.

Ainsi, le spectateur se voit-il imposer un monde différent du sien et où il est projeté avec une foule ; le mouve­ ment de sa vie intérieure lui échappe pour s'accorder à un rythme collectif.

1.

Jean Vilar, Louis Jouvet: acteurs et metteurs en scène du xx• siècle.

2.

Jean Cocteau, Félicien Marceau : auteurs dramatiques du xx· siècle.

3.

Louis de Bavière: roi de Bavière (1845-1886).

29. »

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