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Léopold Sédar SENGHOR : Femme noire Femme nue, femme noire

Publié le 22/02/2012

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Femme noire Femme nue, femme noire

Vêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté! J'ai grandi à ton ombre; la douceur de tes mains bandait mes yeux. Et voilà qu'au cœur de l'Eté et de Midi, je te découvre Terre promise, du haut d'un haut col calciné Et ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l'éclair d'un aigle. Femme nue, femme obscure Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma bouche Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d'Est Tam-tam sculpté, tam-tam tendu qui grondes sous les doigts du Vainqueur Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l'Aimée. Femme nue, femme obscure Huile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l'athlète, aux flancs des princes du Mali Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau Délices des jeux de l'esprit, les reflets de l'or rouge sur ta peau qui se moire A l'ombre de ta chevelure, s'éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux. Femme nue, femme noire Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l'Éternel, Avant que le Destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie. Léopold Sédar SENGHOR (Poète et chef d'État Sénégalais) Chants d'Ombre.  

Faites de ce texte un commentaire composé où vous pourrez, par exemple, faire apparaître les formes que prend ici réloge et les correspondances établies entre la femme et l'Afrique. plan détaillé Introduction Léopold Sédar Senghor reprend une longue tradition poétique qui lie la nature et la femme. Mais le lecteur sent fort bien qu'il ne s'agit pas, dans ce poème, d'une simple convention littéraire. La symbiose est totale. La force de la nature africaine, la sensualité, le lyrisme, tout concourt à faire de ce texte un bel hymne à la négritude. Il sera possible d'étudier la correspondance avec le continent et l'éloge vibrant de l'amour.

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« — Une correspondance par contraste On insiste surtout sur l'ombre et la lumière, le calme et le tourment. Toutefois, les thèmes ne se combattent pas, l'impression est plutôt celle de la complémentarité. • Deuxième partie : l'éloge de l'amour — La mort, la vie Toutes deux ne sont que les facettes de l'amour.

En effet, la vie anime tout le texte par l'intermédiaire de lasensualité.

Ainsi «savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d'Est».

Il faut noter, à propos de cette phrase,la confusion entre l'Amour de la femme et celui de la nature.

En outre, «ferventes» exprime bien une ardeur, maisaussi un aspect quasi religieux.

Rien de dégradant dans ces plaisirs parce qu'ils sont le triomphe de la vie. La mort, présente à la fin de la première strophe, n'a rien de désespéré.

L'amour «foudroie», mort d'autant plusviolente qu'elle touche «en plein cœur».

Rien de la sensualité morbide de Baudelaire; on penserait plutôt à l'extasede sainte Thérèse par Le Bernin.

A la fin du texte, la notion du temps qui passe ou plutôt de la beauté éphémèreintroduirait comme une nostalgie. L'image du feu, pur, de la foudre qui ne laisse pas de traces fait place aux cendres.

Pourtant, le poème se termine ànouveau sur l'espoir puisque cette disparition servira à « nourrir les racines de la vie ».

Que ce soit dans les airs,avec «l'éclair de l'aigle» ou sous terre, avec «les racines», la vie triomphe toujours.

Même le destin jaloux de labeauté, comme les dieux grecs le sont aussi des hommes, se plie au mouvement universel. — L'amour ferment de l'inspiration poétique Là encore, Senghor renouvelle un thème traditionnel : «bouche qui fais lyrique ma bouche».

La neutralité du verbe«faire» accentue la valeur de l'adjectif, la phrase s'encadre par les deux mêmes mots qui s'appellent.

Le lyrismeimprègne tout le texte marqué par une vaste incantation.

La disposition «femme nue, femme noire», «femme nue, femme obscure » est construite en chiasme.

A chaque strophe le thème est posé et les images,souvent longue suite d'appositions, se succèdent comme autant d'illuminations. Le rôle du poète est assigné : «forme que je fixe dans l'Eternel».

La polysémie de «fixe» laisse une ambiguïté :s'agit-il d'une contemplation, d'un regard fasciné sur cette beauté céleste ou d'une forme que l'auteur rend fixe.

Al'appui de la première hypothèse, la foudre qui s'abat.

A l'appui de la seconde, le vocabulaire conquérant :vainqueur, athlète, les princes du Mali et, surtout, le caractère en apparence éphémère de la beauté. Le poème donne à la femme tous les traits de l'éternité : la plus grande généralisation est atteinte grâce à l'absencede déterminant : «Femme nue.

» En outre, on note le bref retour au passé «j'ai grandi à ton ombre»; le textechante l'amour mais aussi toutes les femmes qui ont élevé, protégé l'écrivain.

La sensualité devient idéale : «lechant spirituel de l'Aimée».

Car le poème réussit à mêler la réalité la plus physique à la forme la plus mythique.Comme la Vénus de Milo, perfection grecque, la Femme noire, perfection africaine, atteint le type universel debeauté. Enfin, la louange de la femme n'abaisse pas l'homme, comme le veut une tradition qui part de la courtoisie pouraboutir même aux surréalistes.

Le poète qui retrouve vie grâce à la femme fait souvent figure d'être faible, d'enfant.Ici l'auteur revendique la force et la puissance. première partie rédigée Le poème établit des analogies très étroites entre la femme et la nature.

Chaque strophe commence par «Femmenue».

Mais cette nudité n'est pas exempte de noblesse, de dignité.

L'apposition «vêtue de ta couleur qui est vie»allie la culture et la nature, simplement «le vêtement» ne renvoie pas à une appartenance sociale, il ne sert pas àvoiler, il est «vie».

Le corps ressemble à un tam-tam sculpté : la nature est œuvre d'art.

Certains points de comparaison rappellent immédiatement l'Afrique : «savane, gazelle».

Toutes deux évoquent lesvastes espaces, la course, la légèreté.

Les allitérations en 5 et z chantent la douceur.

Les attaches font penser audélié de l'animal, et l'adjectif «célestes» ajoute la perfection à la finesse, à la délicatesse.

Il introduit aussi l'imagede la déesse dont les dieux seront jaloux.

Si la similitude avec le fruit et le soleil peut être soulignée sous d'autrescieux, il est évident que les indications de l'Été, de Midi, tout le vocabulaire de la brûlure font penser au climatafricain.

De même que le paroxysme de la chaleur est atteint, de même le fruit mûr suggère l'épanouissementtriomphant (à la chair ferme). Si le texte offre des correspondances directes, il joue aussi sur les contraires.

L'ombre et la lumière dominent.

Lesadjectifs «noirs, obscure, sombre» reviennent à plusieurs reprises.

On notera l'interprétation double de l'adjectif. »

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