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L'OEUVRE POÉTIQUE (1820-1839) DE LAMARTINE

Publié le 30/06/2011

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lamartine

Ce n'était pas sans un peu d'inquiétude, de gêne, que Lamartine s'était laissé convaincre de publier les Méditations. Il redoutait que cette réputation de poète ne portât tort à sa carrière de diplomate. Plus tard, il craindra de même qu'un député qui fait des vers ne soit jugé peu capable de traiter les affaires du pays. C'est ce scrupule, finalement, qui l'emportera. A partir de 1839, Lamartine ne publiera plus d'oeuvres poétiques. Sa vie publique de poète aura duré dix-neuf ans. Il avait pourtant conçu un très grand dessein. Les Méditations n'étaient à ses yeux qu'un divertissement, une manière aussi de se faire connaître, de marquer sa place ; un prélude si l'on veut. L'ouvrage qui compterait vraiment — si Dieu lui prêtait vie — ce devait être un poème épique. Il y rêvait depuis des années ; il cherchait sa voie. En janvier 1821 il se persuadera que cette fois enfin, il a trouvé son sujet. Il en informe ses amis, ses correspondants, tout le monde. Il songe même — tant il est ravi de son idée, tant il est sûr que là est bien sa vocation, sa prédestination providentielle — à démissionner, à vivre en Mâconnais, sur ses terres, passant ses jours à composer cette Epopée monumentale qui lui demandera peut-être dix ou quinze années.

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« l'Epître à Uranie.

Chénier, dont les œuvres posthumes ont paru l'année précédente, fait figure d'indépendant,d'irrégulier, de novateur un peu excessif, un peu téméraire et déconcertant, au regard des Méditations, si dociles,au contraire, à la poétique traditionnelle, et si peuplées, même, de réminiscences que certains critiques froncerontle sourcil et dénonceront tous ces « larcins ».

Mais c'était tout de même une révélation et comme unetranssubstantiation.

Ce vocabulaire usuel et déjà presque usé, ces formes poétiques déjà vieilles, tout celareprenait dans les vers des Méditations, une jeunesse miraculeuse.

Lamartine semblait n'avoir modifié rien, et toutétait changé.

Un homme parlait, là où l'on avait coutume de n'entendre, depuis bien longtemps, que des virtuosestrop habiles, des spécialistes sans âme, d'industrieux techniciens.

Ce qu'il disait, avec les mêmes mots cependantqu'employaient ses prédécesseurs, prenait soudain un sens tout neuf, une chaleur de vie.

On l'écoutait enfrémissant, parce qu'il avait, celui-là, tout de bon, quelque et, par reconnaissance pour les honnêtes gens qui teprotègent si fort, parle aussi de son jeune fils...

» Les « honnêtes gens » protégeaient en effet très fort Lamartinequi déployait un beau zèle et donnait des vers au Défenseur, journal d'extrême droite, « dépouillé des rêveriesconstitutionnelles » * * * Un fils lui est né, à Rome, au début de 1821 ; en mai 1822 naît à Mâcon la petite Julia ; pendant quelques moisLamartine a deux enfants ; mais le petit garçon, Alphonse, meurt le 4 novembre de la même année.

Lamartine auraitdésiré un foyer peuplé d'enfants nombreux.

Un accident de grossesse privera bientôt sa femme de tout nouvelespoir.

Leur fille unique, Julia, mourra à dix ans et demi, le 7 décembre 1832.Le souci du Grand Poème emplit toujours sa pensée.

Il en a bien conçu l'idée générale, mais il ne parvient pas à luidonner corps.

Cependant son métier n'est pas ce qui l'empêche de se vouer tout entier à la poésie.

Dès la fin del'année 1820, il a sollicité un congé.

L'air de Naples, paraît-il, lui était nocif ; il souffrait de nouveau, éprouvait destremblements nerveux.

La Savoie, puis son pays natal l'ont rétabli.

Il ne manifeste aucune hâte de prendre unnouveau poste à l'étranger ; mais il faut publier ces Nouvelles Méditations qu'il a eu l'imprudence de promettre en1820 ; et il s'en irrite.

Il aurait voulu garder le silence jusqu'à l'heure où quelques fragments au moins de son Epopéeauraient pu voir le jour.

Recommencer les Méditations, cela lui semble une inutilité, et même, à peu près, une erreur.Force lui est pourtant de s'exécuter, car il a pris des engagements.

Des vers nouveaux —je veux dire postérieurs à1820 — il n'en a pas beaucoup.

La neuvième édition des Méditations, parue en décembre 1822, a déjà révélé uneEpître, écrite en 1821, et qui s'intitule Philosophie.

C'est bon ; il recourra donc, comme la première fois, mais avecbeaucoup moins de discrétion, aux inédits de sa jeunesse.

Il exhumera une « élégie antique », sur Sapho qui a dumoins le mérite d'être d'assez belles dimensions, et trois autres pièces encore qui faisaient partie du recueil de 1816: Tristesse ; Elégie, et A EL...

; Clovis étant abandonné, il est tout indiqué qu'on en utilise les débris, et voici, pourle volume à constituer, cent quatre-vingts vers opportuns qui s'appelleront l'Ange, fragment épique.

Et bienentendu, une nouvelle livre de chair sera découpée sur Saül et fournira un opulent « fragment biblique » :l'apparition de l'ombre de Samuel à Saül. C'était un jeu dangereux ; Lamartine risquait de s'y casser les reins.

L'éditeur Urbain Canel, qui avait payé d'avance— et comptant — les 14.000 francs que lui avait demandés Lamartine, était si mal rassuré qu'il avait rédigé et signéun « avertissement », en tête de l'ouvrage, où l'on pouvait lire : « En donnant au" public le second volume desMéditations Poétiques, nous devons prévenir le lecteur que les incorrections, ou même les vers et les strophes quimanquent dans quelques-uns des morceaux qui le composent ne doivent point nous être imputés...

» Certainespièces, ajoutait-il, « n'ont pas été entièrement terminées ; l'absence de l'auteur ne nous a pas permis de lesrétablir.

Les manuscrits ayant été égarés dans ses voyages, elles ne se sont plus retrouvées entières dans samémoire ».

Piteuse et mensongère excuse, car Lamartine n'était point « absent » ; il avait apporté lui-même, aumois d'août, son manuscrit à Paris.

Il est vrai qu'il y avait passé fort peu de jours.

Etait-ce coquetterie chez lui ?affectation presque insolente d'indifférence ? Dans les Préludes un hémistiche se présentait entre parenthèsescomme si l'éditeur avait été contraint de terminer le vers lui-même, de trouver une rime, au petit bonheur : Cependant, las d'attendre un trépas sans vengeance,Les deux camps à la fois (l'un sur l'autre s'élance). Heureusement, à côté de ces misères, de très beaux textes s'offraient au lecteur.

Lamartine livrait au public LeCrucifix, et ces strophes aussi, enivrées, qu'il avait écrites pour sa jeune femme, dans l'ardeur de leur premièretendresse : Ischia et le Chant d'amour ; il avait même glissé dans les Préludes une « odula » dont il avait faitprésent à Marianne comme offrande du Jour de l'An, le 1er janvier 1823.

Apparaissaient aussi deux pièces politiques,d'un accent neuf et fort : Bonaparte et La liberté (ou une nuit à Rome).

Elles démasquaient en éclair un Lamartineque la foule ne soupçonnait pas, car elle s'habituait déjà à ne voir en lui qu'un langoureux élégiaque.

Il en était dureste partiellement responsable, s'étant donne pour un agonisant dans l'Automne, ayant introduit, dans chacun deses deux recueils, des vers qui le faisaient passer pour un malade prêt à rendre l'âme : Le Chrétien mourant, LePoète mourant.

Ce moribond devait vivre près de quatre-vingts ans ; ce barde débile s'était dénommé naguères, enparlant à ses camarades : « le grand diable de Bourgogne » ; c'était un cavalier fougueux et un bretteur redoutable,Mais il s'était si bien laissé confondre avec quelque dolent rêveur, plein de larmes et sur le point, vraiment, d'expirerque, sur la foi d'on ne sait quel bruit, le Drapeau Blanc avait annoncé, au mois de juillet 1820, sa mort, parconsomption, à Naples.

Bonaparte, La liberté annonçaient le mâle écrivain de la réponse à Némésis et des. »

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