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Paul Valéry - Léonard et les philosophes - Oeuvres, tome 1, Paris, Gallimard, bibliothèque de la Pléiade, p.1243-1246 (commentaire)

Publié le 27/04/2011

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   Si le philosophe se sent qu'une autre « essence « qu'une âme d'artiste a-t-il une légitimité à établir des règles esthétiques?  Paul Valéry est un philosophe et poète né en 1871 et mort en 1945. La portée philosophique et épistémologique de son oeuvre est méconnue.  C'est un penseur du constructivisme (courant de pensée reposant sur l'idée que nos représentations ne sont que le produit de l'entendement humain et non le reflet exact de la réalité ou alors d'après Besnier le constructivisme est « la théorie issue de Kant selon laquelle la conscience des phénomènes résulte d'une construction effectuée par le sujet «.  A à peine 24 ans (jeune âge pour une première publication) il publie le manifeste Introduction à la méthode de Léonard De Vinci dans La Nouvelle Revue. Ce manifeste est un texte clé de l'esthétique valéryenne.  Valéry reste cependant indifférent à cet homme historique qu'est Léonard De Vinci dans son oeuvre, il reconnaitra lui même que « En réalité j'ai nommé homme et Léonard ce qui m'apparaissait alors comme le pouvoir de l'esprit « (Oeuvre, I, 1155). Ceci montre le peu d'intérêt de Valéry dans les recherches historiques. Cependant, tout comme De Vinci, Valéry est possédé par la fureur du précis, dans son oeuvre prend forme le projet toujours inachevé d'un texte qui tente de parvenir à la claire conscience d'elle-même. C'est ainsi qu'il reviendra plusieurs fois sur son manifeste. 

« Ces oeuvres d'arts « accidentelles » sont donc l'effet d'une « sensibilité active et industrieuse » c'est à dire unesensibilité immédiate et bien construite qui se rapprocherait aveuglement de la perfection esthétique.Le philosophe ne trouve pas pour lui la création d'une oeuvre d'art « nécessaire ».

Ceci rappelle l'orgueil de «l'homophilosophicus » (« Je Pense, donc je suis le seul philosophe » peut bien formuler la maxime de l’homophilosophicus et traduire adéquatement son narcissisme théorique.) qui se croit supérieur à l'artiste car il daigneappliquer aux arts son esprit.« Cette activité ne lui semble pas nécessaire , puisque son objet suprême , doit appartenir immédiatement à lapensée philosophique, lui être directement accessible par une attention appliquée à la connaissance de laconnaissance, ou à un système du monde sensible et du monde intelligible conjugués » (ligne 7 à 10)« la connaissance de la connaissance » : la connaissance est l'objet le plus incertain de la connaissancephilosophique ce qui est une évaluation critique du savoir. Il évoque le « monde sensible » et le « monde intelligible » qu'il dit « conjugués ».

Ceci rappelle l'un des thèmes de laphilosophie platonicienne qui est la séparation de la réalité en deux mondes : le sensible et l'intelligible, le premierétant l'image, le reflet, la copie du second.

L'oeuvre d'art philosophique devrait alors rendre compte également dumonde sensible.

Or il faut distinguer pour Platon le monde des apparences sensibles, changeant, insaisissable et enperpétuel devenir, et le monde intelligible, celui des Idées éternelles et immuables, qui serait le lieu du Vrai en soi.Valéry introduit donc la notion « d'Idée » qu'il développera plus loin car l'idée est objet de pensée qui sert de modèleidéal pour connaître et agir sur le monde sensible.

Ainsi prenons par exemple une chaise en bois.

Je perçois cettechaise qui a été fabriqué par un artisan à partir d'un certain modèle idéal de chaise qui, lui, existe indépendammentde toute matière.

Cette forme intelligible( ou idée de la chaise), parfaite et immuable, ne peut se confondre ni avecles autres idées ou archétypes, c'est-à-dire modèles idéaux qui possèdent chacun leur propre définition et essence,ni avec leur réalisation concrète dans le monde sensible comme objets qui en sont nécessairement les copiesimparfaites, soumises au temps et à la dégradation. Le philosophe accorde également peu d'importance aux modes matériels de « l'Idée », il les distingue même.

Onentend ici par « Idée » au sens philosophique une représentation de l'esprit.

C'est un objet de l'univers intérieurhumain qui s'appuie et se construit à travers des images diffuses.L'art conceptuel contredit cette théorie.

L'art conceptuel est apparu dans les années 60, c'est un art qui n'aspireplus à l'ivresse des sens mais à la joie de l'esprit, il va droit au sens et ne se réjouit plus de le mystifier des codes,des symboles ou des affects.

Ce que l'oeuvre d'art conceptuelle nous montre en tant que spectateur c'est dulangage mis en forme au même titre que n'importe quel matière (ex: tôle, peinture,...)L'Idée ne se distingue donc pas du mode d'exécution de l'Idée, les modes matériels ont une importance pondérabledans la signification de l'oeuvre d'art.Or le mode de représentation et la mise en forme du langage dans le langage sont de différentes natures de cellespar exemple d'un cube en acier.Valéry refuse l'idée que l'oeuvre d'art soit qu'une expression, un simple médium de l'Idée et que si l'Idée atteint l'âgede raison et apprend à se dire elle même, elle peut alors se passer d'oeuvre d'art. Le philosophe esthétique a des règles esthétiques bien définies.

Il refuse de mélanger des concepts qui peuventparaître contradictoire.

Tout d'abord entre « ce qu'on veut et ce qu'on peut » c'est-à-dire entre la volonté et lacapacité à produire une oeuvre.

Puis entre « accident » et « substance ».

La substance est ce qu'il y a depermanent dans les choses qui changent.

Aristote lui distingue aussi le substrat (une chose) et l'accident c'est-à-dire les propriétés d'une chose.Le philosophe ne conçoit également pas d'échange égalitaire, entre « la forme » et « le fond », il n'accepte pas quela forme d'une poème par exemple puis avoir la même importance que le fond.

Le fond fait donc référence à l'Idée etla forme aux moyens d'exécution.La conscience et l'automatisme ne peut pas non plus d'après lui échanger.

La conscience est la connaissance qu'àl'Homme de ses pensées, de ses sentiments et de ses actes.

C'est elle qui fait de l'Homme un sujet, capable depenser le monde qui l'entoure.

La conscience, elle, se retire quand l'action cesse d'être spontanée pour devenirautomatique (par exemple lors de la répétition d'un mouvement, au départ le sujet est concentré puis cela devientautomatique).Le philosophe oppose également « la matière » et « l'esprit ».Couramment, la matière désigne l'inerte, par opposition au vivant : c'est la pierre, le bois, la terre, ce qui estinanimé, la matière manque alors de détermination car elle est par définition sans forme.Si la matière est ce qui manque de détermination, l'homme est par excellence l'être qui va lui donner forme par sontravail.

Or, ce travail de transformation n'est possible que parce que l'homme, comme le dit Hegel, « est esprit ».Parce qu'il a une conscience, l'homme peut sortir de lui-même et aller vers le monde, pour le ramener à lui et sel'approprier, ne serait-ce que dans la perception. Le philosophe ne conçoit également pas que « l'artiste passe presque indifféremment de la forme au contenu et ducontenu à la forme ».

Valéry ajoutera à son texte que le philosophe ne conçoit pas « qu'un type de phrase luivienne et qu'il cherche ensuite à la compléter et justifier par un sens; que l'idée d'une forme vaille pour lui l'idée quidemande une forme...etc »Pour l'esthéticien l'artiste doit suivre des règles précises d'élaboration de l'oeuvre d'art, l'Idée doit venir avant laforme. Dans la dernière phrase du paragraphe Valéry se montre radical « Si l'esthétique pouvait être, les artss'évanouiraient devant elle, c'est-à-dire devant leur essence ». »

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