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Plaisir de l’aube de Colette, Sido. Commentaire

Publié le 12/11/2016

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Plaisir de l’aube

 

J’aimais tant l’aube, déjà, que ma mère me l’accordait en récompense. J’obtenais qu’elle m’éveillât à trois heures et demie, et je m’en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues.

 

À trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par son poids baignait d’abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensibles que tout le reste de mon corps ... C’est sur ce chemin c’est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d’un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion...

 

Ma mère me laissait partir, après m’avoir nommée « Beauté, Joyau-tout-en-or ; elle regardait courir et décroître sur la pente son œuvre, « chef-d’œuvre », disait-elle...

 

Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d’avoir mangé mon saoul, pas avant d’avoir, dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l’eau de deux sources perdues, que je révérais. L’une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L’autre source, presque invisible, froissait l’herbe comme un serpent, s’étalait secrète au centre d’un pré où des narcisses, fleuris en ronde, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe... Rien qu’à parler d’elles, je souhaite que leur saveur m’emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire.

Colette, Sido.

Mère qui comprend sa fille : « me laissait partir ».

 

Amour exceptionnel : trouvaille des qualificatifs débordant d’admiration passionnée pour son enfant.

 

C’est le créateur et sa créature, « son œuvre »•

 

Montée admirative : « œuvre », puis « chef-d’œuvre » ; le premier terme est l’expression de Colette, le second très fort, de Sido.

 

Le geste le plus caractéristique d’amour maternel est le bonheur de Sido dans la contemplation, le plus longtemps possible, de sa petite : « elle regardait courir et décroître ... ». Présentation presque cinématographique.

 

Troisième partie : « Je revenais à la cloche... cette gorgée imaginaire. » (§ 4)

 

L’espèce de béatitude, de bonheur premier détaché des valeurs humaines, éprouvé à l’aller, Colette les complète encore au retour, car elle « revient » .

 

Réactions d'un petit animal familier et indépendant à la fois, « chien qui chasse seul ».

 

Jouissance animale d'une faim (au réveil) assouvie : « avoir mangé mon saoul » .

« 40 Pré paration au bac 87 • L'explic ation orale commencera par une rapide mise en place de ce texte dans Je thème où il s'inscrit.

[Voir la construction de l' étude thématique sur les quatre éléments (no 6).] A.

Bases parmi lesquelles seront choisis les dét ails permettant la situation de l'ex plic ation de texte • Présentation et situation du texte dans l'œuvre d'ensemble • Colette est femme ; elle en a le bon sens et la solidité.

• C'est une campagnarde, amoureuse de la vie.

• Amour profond pour sa mère, Sido.

C'est elle qui a fait comprendre à cette " Reine de la Terre , (ainsi Colette s'intitule­ t-elle elle-même) tout ce qu'il faut voir, entendre, écouter dans la nature, " tout ce qui frémit et bruit "· • Véritable surimpression entre sa mère et la Terre-mère.

• Enfance très libre en Bourgogne ...

celle d'une petite païenne qui goûte la nature sensoriellement, les cinq sens en efferve scence.

• Reste très proche des éléments : côté instinctif, même animal des perceptions de l'enfant.

• Page extraite de la première partie de Sida, une des plus belles œuvres de l'abondante production de Colette, un " éblouissant chef-d'œuvre "· • " Sida ou Les points cardinaux "• méditation poétique ; chant d'amour en l'honneur de sa mère et retour mélancolique et joyeux à la fois vers son enfance paysanne.

B.

Idée et structure générales du passage à expliquer • Le titre indique déjà deux aspects essentiels : - " plaisir " : très proche du bonheur païen.

Entrée en contact di rect avec les forces élémentaires.

Hédonisme ; - " aube " : primeur du jour, même dans son toucher (" hu­ mide »).

Naissance de l'être renouvelée avec la naissance du jour.

• La structure est équilibrée autour du petit paragraphe central (le 3e) consacré à " Ma mère "• déjà énoncé en première ligne et repris ici en tête.

Elle est placée au centre : c'est la maternité humaine, entourée avant et après de toutes les possibilités de. »

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