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Qu'est-ce que le Romantisme ?

Publié le 15/02/2012

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Alfred de Musset a conté quelque part les hésitations de Dupuis et Cotonet, deux bourgeois de La Ferté-sous-Jouarre, qui cherchent vainement à se définir ce que c'est que le « romantisme, la poésie romantique. «. Vous imaginerez qu'un jour qu'ils se promènent à leur ordinaire devant le jeu de boules, discutant des derniers livres venus de Paris, un jeune homme les aborde; épris de l'école nouvelle, il essaiera de leur montrer ce qu'elle a apporté de jeune, d'émouvant, de généreux, etc., à la littérature française, et leur proposera sa définition du romantisme....

« moulin, des sacs, un gue, une vache et des oies sans etiquette qui les rattache A Racine ou a Shakespeare. LE C.

- C'est, monsieur Cotonet, que cette demoiselle a des yeux jeunes et neufs, des yeux de vingt ans.

Je n'irai point jusqu'a soutenir que ce paysage est specifiquement romantique, que dirions-nous des bords du Rhin, des lacs ecossais, de Naples et du Vesuve, de Grenade et de la Sierra Nevada? Mais it peut tres bien se faire qu'une harmonie preetablie existe j entre cette ame juvenile et ces lieux pour vous sans charme.

Le Roman- tisme, voyez-vous, est en nous plus Tie dans les choses.

C'est pour d'aucuns un don de sympathie quasi universelle qui les attire vers l'arbre et vers l'oiseau, - ici Cotonet approuve de la tete - vers la mer et in montagne, vers les scenes les plus simples et les plus sublimes. D.

- Il me semble commencer a comprendre.

Mais ce n'est point IA, vous nous l'avez dit, tout le Romantisme; qu'est-ce donc encore? LE C.

- Le Romantisme, Messieurs, ne saurait tenir en une definition, ni meme dans un art poetique.

C'est un kat Warne, c'est un mouvement, un élan, un essor.

Ce n'est pas un type figs et immobile, it est au fond du poke, de l'ecrivain, de I'artiste, un perpetuel devenir.

Il est la Beaute fatiguee du tartan, excedee de sa prison, qui cherche a se liberer, a s'affranchir. 11 est la jeunesse saturee des vieilles formules et qui, douloureusement par- Lois, s'essaie a en trouver de nouvelles... C.

- Je vois.

Ce n'est pas encore, ce sera quelque chose.

C'est, pour l'instant, le rave insaisissable, la vision immaterielle impuissants a s'expri- mer.

Ou, pour emprunter une comparaison a la noble science qui fait mes (Hikes, c'est l'oiseau dont les ailes poussent, mais qui n'a point encore vole. LE C.

- Pardon, monsieur Cotonet, le Romantisme a déjà produit des chefs-d'oeuvre en tous les genres; it est une realite vivante.

Ne comptez- vous pour rien les Meditations et les Harmonies poetiques, les Orientates et les Fealties d'Automne, les deux Nuits de M.

de Musset, Hernani et Chat- terton...

Chatterton, Messieurs, ce sublime plaidoyer en faveur du poke meconnu, martyrise par une societe sans entrailles... D.

- Ta...

ta...

ta...

Permettez-moi, monsieur le Clerc, de ne vous point suivre en ces divagations.

J'ai lu a tete reposee le drame de M.

de Vigny, tandis que, grise par une atmosphere d'enthousiasme, vous n'avez fait que l'entendre a Paris.

Croyez-m'en, it ne Taut pas trop encourager les vocations poetiques.

Le vrai Chatterton n'avait rien produit, poetiquement parlant, qui meritat des faveurs speciales et, humainement parlant, it n'etait nulle- ment design& pour conduire, en se guidant sur les astres, le vaisseau de l'Angleterre.

Le Romantisme serait-il donc l'illusion, l'imagination l'empor- tant sur la raison, le sentiment se substituant au bon sens? LE C.

- Ramenons a ses justes proportions le cas de Chatterton.

Avouez, monsieur Dupuis, que la bourgeoisie n'est pas tendre, en general, pour les artistes et qu'elle prend le plus souvent pour des fainéants ceux qui meditent des oeuvres destinees a honorer leur pays.

Reconnaissez egalement que la raison et le bon sens ne sont point des facultes creatrices, et que trop long- temps on a tenu en suspicion la sensibilite et l'imagination, sans lesquelles it n'est point de poesie.

Le Romantisme, c'est la protestation de ces deux reines reduites en esclavage. C.

- .Vous parlez d'or, monsieur le Clerc, mais je me mefie des extrava- gances de vos reines emancipees; je leur reproche, moi Francais de I'Ile- de- France, d'user de leur liberte recouvree pour s'enchainer a l'etranger. On ne jure plus chez nous que par l'Angleterre, Shakespeare, Ossian et Byron; que par 1'Allemagne, Goethe, Schiller et Kant.

L'Espagne et l'Italie nous ont egalement envahis.

Je ne prise pas plus I'Anglais qui passe ses jours a broyer du noir dans un pot que l'Allemand dont les phrases sont longues d'une aune, que 1'Espagnol qui coupe la gorge de son voisin comme on boit un verre d'eau, que l'Italien qui passe sa journee couche a plat-ventre deviant un a site romantique ).

Je ne saurais sentir et imaginer comme ces gens. LE C.

- Vous n'etes pas le premier, monsieur Cotonet, A protester contre ces importations indiscretes.

M.

de Chateaubriand qui, malgre Iui, est bien le pare du Romantisme, a fustige vigoureusement nos anglomanes et nos ger- manophiles.

Mais IA encore, faisons la part des choses.

Ces pays, que vous jugez un peu sommairement, ont contribue a l'elargissement, it l'enrichisse- moulin, des sacs, un gué, une vache et des oies sans étiquette qui les rattache à Racine ou à Shakespeare.

LE C.

-C'est, monsieur Cotonet, que cette demoiselle a des yeux jeunes et neufs, des yeux de vingt ans.

Je n'irai point jusqu'à soutenir que ce paysage est spécifiquement romantique, que dirions-nous des bords du Rhin, des lacs écossais, de Naples et du Vésuve, de Grenade et de la Sierra Nevada? Mais il .Peut très bien se faire qu'une harmonie préétablie existe entre cette âme Juvénile et ces lieux pour vous sans charme.

Le Roman­ tisme, voyez-vous, est en nous plus qùe dans les choses.

C'est r.our d'aucuns un don de sympathie quasi universelle qui les attire vers.

1 arbre et vers l'oiseau, - içi Cotonet approuve de la tête - vers la mer et la montagne, vers les scènes les plus simples et les plus sublimes.

D.

- Il me semble commencer à comprendre.

Mais ce n'est point là, vous nous l'avez dit, toùt le Romantisme; qu'est-ce donc encore? LE C.

- Le Romantisme, Messieurs, ne saurait tenir en une définition, ni m{l!me dans un art poétique.

C'est un état d'âme, c'est un mouvement, un élan, un essor.

Ce n'est pas un type figé et immobile, il est au fond du poète, de l'écrivain, de l'artiste, un perpétuel devenir.

Il est la Beauté f;ltiguée du carcan, excédée de sa prison, qui cherche à se libérer, à s'affranchir.

Il est la jeunesse saturée des vieilles formules et qui, douloureusement par­ fois, s'essaie à en trouver de nouvelles ...

L:.

- Je vois.

Ce n'est pas encore, ce sera quelque chose.

C'est, pour l'instant, le rêve insaisissable, la vision immatérielle impuissants à s'expri­ mer.

Ou, pour emprunter une comparaison à la noble science qui fait mes délices, c'est l'oiseau dont les ailes poussent, mais qui n'a point encore volé.

LE C.

- Pardon, monsieur Cotonet, le Romantisme a déjà produit des chefs-d'œuvre en tous les genres; il est une réalité vivante.

Ne comptez­ vous pour rien les Méditations et les Harmonies poétiques, les Orientales et les Feuilles d'Automne, les deux Nuits de M.

de Musset, Hernani et Chat­ terton...

Chatterton, Messieurs, ce sublime plaidoyer en faveur du poète méconnu, martyrisé par une société sans entrailles ...

D.

- Ta ...

ta ...

ta ...

Permettez-moi, monsieur le Clerc, de ne vous point suivre en ces divagations.

J'ai lu à tête reposée le drame de M.

de Vigny, tandis que, grisé par une atmosphère d'enthousiasme, vous n'avez fait que l'entendre à Paris.

Croyez-m'en, il ne faut pas trop encourager les vocations poétiques.

Le vrai Chatterton n'avait rien produit, poétiquement parlant, qui méritât des faveurs spéciales et, humainement parlant, il n'était nulle­ meut désigné pour conduire, en se guidant sur les astres, le vaisseau de l' Ang.leterre.

Le Romantisme serait-il donc l'illusion, l'imagination l'empor­ tant sur la raison, le sentiment se substituant au bon sens? LE C.- Ramenons à ses justes proportions le cas de Chatterton.

Avouez, monsieur Dupuis, que la bourgeoisie n'est pas tendre, en général, pour les artistes et qu'elle prend le plus souvent pour des fainéants ceux qui méditent des œuvres destinées à honorer leur pays.

Reconnaissez également que la raison et le bon sens ne sont point des facultés créatrices, et que trop long­ temps on a tenu en suspicion la sensibilité et l'imagination, sans lesquelles il n'est point de poésie.

Le Romantisme, c'est la protestation de ces deux reines réduites en esclavage.

C.

-.vous parlez d'or, monsieur le Clerc, mais je me méfie des extrava­ gances de vos reines émancipées; je leur reproche, moi Français de l'Ile­ de-France, d'user de leur liberté recouvrée pour s'enchaîner à l'étranger.

On ne jure plus chez nous que par l'Angleterre, Shakespeare, Ossian et Byron; que par l'Allemagne, Goethe, Schiller et Kant.

L'Espagne et l'Italie nous ont également envahis.

Je ne prise pas plus l'Anglais qui passe ses jours à broyer du noir dans un pot que l'Allemand dont les phrases sont longues d'une aune, que l'Espagnol qui coupe la gorge de son voisin comme on boit un verre d'eau, que l'Italien qui passe sa journée couché à plat-ventre devant un «site romantique».

Je ne saurais sentir et imaginer comme ces gens.

LE C.

-Vous n'êtes pas le premier, monsieur Cotonet, à protester con!re ces importations indiscrètes.

M.

de Chateaubriand qui, malgré lui, est bien le père du Romantisme, a fustigé vigoureusement nos anglomanes et nos ger­ ma:'lophiles.

Mais là encore, faisons la part des choses.

Ces pays, que vous jugez un peu sommairement, ont contribué à l'élargissement, à l'enrichisse-. »

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