Ronsard : le prince des poètes
Publié le 17/01/2022
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Pierre de Ronsard (1524-1585) prend la tête du mouvement de régénérescence de la poésie française qu'il veut élever à la hauteur de la poésie de l'Antiquité. C'est l'ambition du groupe de la « Pléiade «, qu'il dirige. Il se réfère aussi au pétrarquisme, une forme de poésie très savante qui joue des sens cachés, avant de se découvrir une veine prébaroque à la fin de son existence.
«
Pierre de Ronsard (portrait
tiré de
Galerie des grands
écrivains
de Sainte-Beuve ;
Paris, 18781.
UN POÈTE
« ENGAGÉ »
A partir de 1560, Pierre
de Ronsard, qui s'intéresse à la
politique alors que s'annonce
la période troublée des
guerres de Religion, se lance
dans la poésie « engagée » en
se livrant à des polémiques
contre les protestants.
Il s'adonne aussi à une carrière
mondaine à travers une
poésie courtisane, tendance
couronnée en 1572 par les
quatre premiers livres de
La
Franciade,
épopée qui
restera inachevée.
Entre-
temps, il y a eu les
Élégies,
Bergerie, Mascarades,
par
lesquelles il s'est fait le chantre
des fêtes et des cérémonies
royales.
Au cours de sa vie,
Ronsard sera le poète officiel
de quatre rois : Henri II,
François II, Charles IX et
Henri 111.
11 ne s'éloigne pas
pour autant de ses exigences
premières : s'ouvrant aux
réalités du monde et aux
difficultés des hommes,
il élargit sa palette aux guerres
et aux conflits.
11 devient
poète civique et satirique :
ainsi en 1562, quand éclate
la première guerre de
Religion, il publie
Discours
des misères de ce temps
et Remontrance au peuple de
France.
modes » sa pensée et ses sen-
timents.
S'il rend hommage à la
beauté parfaite de Cassandre,
il s'attarde aussi sur « ce petit
chien qui sa maîtresse suit »,
consacre des poèmes au rossi-
gnol, à l'alouette, aux fourmis,
s'enchante de « voir couler sur
la Marne les bateaux ».
Toujours
avec la même haute
vision de la poésie, sa pierre
philosophale, Ronsard consi-
dère la rencontre amoureuse
comme une expérience qui
engage l'être tout entier.
Dans
les
Amours de Cassandre,
il opte
pour un ton moins érudit, plus
familier, manie « le beau style
bas » avec une maîtrise parfaite
du vers.
Ce qui caractérise son
oeuvre, c'est un élan vital plein
de sève : il s'entend à déguster
et apprécier pleinement tous
les plaisirs que lui procurent
toutes les formes de beauté.
Il
faut y ajouter le culte qu'il voue
à son art.
Poète complet, il con-
sidère la poésie comme un
moyen d'appréhension de l'uni-
vers, de mise en forme et de
reconstruction du monde.
Si la vocation de Ronsard a été
assez tardive (il n'a commencé
à écrire qu'à l'âge de vingt-cinq
ans, son 'oeuvre n'en est pas
moins abondante, comprenant
plus de cinquante mille vers, et
multiple, couvrant tous les re-
gistres.
Il fait preuve de la
même variété dans sa versifica-
tion, d'une souplesse très no-
vatrice.
Si
ses
audaces susci-
tent de vives résistances, elles
lui attirent aussi de nombreux
disciples, et il sera le chef de
file des jeunes poètes, d'abord
au sein du groupe du collège
de Boncourt, puis de la Pléiade.
En 1555, alors qu'il a à peine
trente ans, Henri II le comble
de faveurs, tandis que la Cour
et
ses
pairs le célèbrent com-
me le « Prince des poètes ».
Dès 1560, il
donne une premiè-
re
édition de ses oeuvres com-
plètes ; cinq autres suivront de
son vivant.
Toute son existence
sera dédiée à la poésie.
De magnifiques
funérailles
En 1553, Ronsard change radica-
lement de registre, abandon-
nant l'amoui
-
idéal et impossible
de Cassandre pour l'érotisme
du
Livret des Folastries,
qui évoque
de façon crue et réaliste la dé-
bauche et les plaisirs des sens.
L'auteur de « Mignonne allons
voir si la rose » écrit aussi :
« Quand en songeant ma folas-
tre j'accole / Laissant mes flancs
sur les siens allonger...
» Avec
les Amours
de Marie,
composés en
1555
et
1556,
il passe à des poé-
sies très personnelles, pleines de
grâce, de sensualité et emprein-
tes de mélancolie devant la
fuite irréversible du temps.
pa
chair et les plaisirs sans lende-
main deviennent malédiction.
L'amour et la nature se font
écho, la beauté des femmes se
confondant avec celle des
fleurs, comme elle éclatante et
éphémère.
Dans le même
temps, le poète compose des
Hymnes cosmiques,
dont la tonali-
té épique rappelle celle des
Odes,
sur des thèmes non plus
futiles, mais nobles : gloire,
héroïsme, grandeur humaine.
En 1578, Ronsard fait un retour
éblouissant à la poésie amou-
reuse pure avec
Les Amours d'Hé-
lène,
couronnement de son oeu-
vre à la fois par leur profondeur
humaine et leur perfection sty-
listique, publiées alors qu'à la
Cour d'Henri III on se prend à
nouveau de passion pour le pé-
trarquisme.
Sa mort, le 28 décembre 1585,
suscite une immense émotion.
Un hommage public lui est
rendu au collège de Boncourt.
On lui fait de magnifiques funé-
: le roi envoie la musique
de sa propre chapelle ; le par-
lement de Paris est représenté
par une députation ; la foule
est si considérable que l'évê-
que d'Évreim, Jacques Davy du
Perron, qui doit prononcer
l'oraison funèbre, ne peut accé-
der à la chaire.
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