Devoir de Philosophie

Rossignol: Verlaine, Poèmes Saturniens

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

verlaine

Comme un vol criard d'oiseaux en émoi, Tous mes souvenirs s'abattent sur moi, S'abattent parmi le feuillage jaune De mon cœur mirant son tronc plié d'aune Au tain violet de l'eau des Regrets Qui mélancoliquement coule auprès, S'abattent, et puis la rumeur mauvaise Qu'une brise moite en montant apaise, S'éteint par degrés dans l'arbre, si bien Qu'au bout d'un instant on n'entend plus rien, Plus rien que la voix célébrant l'Absente, Plus rien que la voix -ô si languissante !-De l'oiseau que fut mon Premier Amour, Et qui chante encore comme au premier jour ; Et dans la splendeur triste d'une lune Se levant blafarde et solennelle, une Nuit mélancolique et lourde d'été, Pleine de silence et d'obscurité, Berce sur l'azur qu'un vent doux effleure L'arbre qui frissonne et l'oiseau qui pleure.

Introduction    ■ Les Poèmes Saturniens :    ■ Influence parnassienne...    ■ Mais aussi révélation d'une poétique neuve.    ■ Annonce des 2 thèmes.    Première partie : Les Souvenirs.    ■ Renouvellement d'un thème traditionnel.    ■ Images.    ■ Musique.    ■ Voix célébrant l'absente. Deuxième partie : « Mélancholia «    ■ Le « Présent « du « Saturnien «.    ■ Paysage/Etat d'âme.    ■ Rythmes. Allitérations. Harmonies imitatives. Conclusion    ■ Ce n'est pas encore la subtilité des Romances sans Paroles...    ■ ...Mais déjà « de la Musique avant toute chose «.   

verlaine

« début est volontairement vulgaire, commun ; il catalogue les oiseaux comme une bande agitée et brouillonne.

Ainsiles souvenirs apparaissent-ils dans la mémoire du poète, non doux, attendrissants (comme ceux dont se consoleRousseau), mais en « rumeur mauvaise ».

Pourtant Verlaine n'a que 22 ans, il ne s'est pas encore abandonné auxturpitudes qui l'aviliront plus tard.

Mais le malheur est déjà entré dans sa vie : mort de son père, puis d'une cousinetendrement aimée le désaxent, et il s'adonne à la boisson depuis 1863 probablement.

Souvenirs aussi de tout ce quilui déplaît dans les existences sans poésie, de toutes les agitations qui troublent la paix de l'âme.

Et avec quelleviolence elle est troublée.

Les « souvenirs s "abattent » : verbe aux consonnes vibrantes (labiale b, dentales tt),répété 3 fois, dont 2 avec des effets métriques marqués : enjambement « s'abattent sur moi S'abattent parmi...

» ou rejet spectaculaire : « S'abattent,/ et puis...

» ; ce verbe nous impose presque la sensation de cette nuée qui se jette soudain sur l'âme.C'est ce passé qui a la couleur mélancolique des Regrets, triste miroir au « tain violet », simple reflet de ce qui futet où, même en se mirant, le cœur ne trouve plus « rien ».

Images à la fois précises et fluides, concrètes etimmatérielles, qui sont elles-mêmes et autre chose, en même temps vol d'oiseaux et souvenirs, eau violette qui «coule auprès », et regret.

Ce sont les images d'automne qui suggèrent ces Regrets, teintes aux harmonies étouffées: « feuillage jaune », et « violet » des ondes ; mais aussi le rythme qui, après la violence de la répétition et desheurts des 2 premiers « abattent », devient un lent écoulement, dans un mouvement uniforme : « De mon cœur mirant son tronc plié d'aune Au tain violet de l'eau des Regrets Qui mélancoliquement coule auprès...

», ensemble flottant, sans une coupe sur 3 vers où ne sait se poser la voix.

C'est alors que l'arythmie du vers suivant :« S'abattent, / et puis la rumeur mauvaise » ...vient désagréger de façon presque grotesque le bercement de l'âmequi espérait pouvoir « se laisser aller ».

Mais la « langueur » (mot très verlainien) du poète se dérobe à ces coups debutoir.

Les souvenirs ne sont plus qu'une glu molle qui en 3 vers apporte un simulacre de paix, traduite par laparfaite symétrie du dernier vers de l'ensemble : ...« la rumeur mauvaise (Régularité) Qu'une brise moite en montant apaise, (Arythmie) S'éteint par degrés dans l'arbre,/si bien (Régularité) Qu'au bout/d'un instant/on n'entend/plus rien,...

». L'âme est devenue toute « languissante », silencieuse et recueillie, comme ce qui l'entoure, et la répétition (3 fois)de « Plus rien » et même de tout l'hémistiche (2 fois) : « Plus rien que la voix...

», la régularité absolue du rythme lefont bien entendre.

Avec l'imprécision du rêve, le « Premier Amour », symbolisé par l'oiseau (le poème a en réalité untitre, supprimé dans l'épreuve, et c'est : Le Rossignol), vient chanter dans le souvenir, et malgré la douleur de sonrejet dans le passé, il apporte la note de pureté, car il demeure inaltéré, « encore comme au 1er jour ». * * * Mélancolie, nostalgie...

: tout se trouve alors baigné dans la demi-teinte de son état d'âme et non, véritablement,celle du paysage.

C'est d'un véritable paysage intérieur que ce poème est tissé.

Comme le souvenir, la mélancolieengendre les images ; l'âme avec ses regrets, ses nostalgies, devient elle-même paysage.

Qu'elle est doucementtriste, l'âme de ce poète « Saturnien » ; né sous « une influence maligne », il affirme — et ce n'est point par jeu —avoir reçu des astres « Bonne part de malheur et bonne part de bile ». Aussi, tous ces Paysages Tristes sont-ils de crépuscule et d'automne, qui « Blessent [son] cœur D'une langueur Monotone » (Chanson d'automne). C'est parce qu'il « [se] souvien[t] Des jours anciens », qu'il pleure « mélancoliquement ».

La place recherchée de cet adverbe : « Qui mélancoliquement coule...

». »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles