Rousseau : DESTINÉE DE JEAN-JACQUES

1. — Jean-Jacques Rousseau a été un être exceptionnel : sensibilité ardente et déréglée, imagination de feu, orgueil monstrueux et maladif, âme essentiellement romanesque, génie orienté vers l'utopie. 2. — Son enfance et sa première jeunesse l'avaient gâté. A l'âge d'écolier, il s'enchantait de promenade et de musique; il passait, avec son père, des nuits presque entières à lire des romans contemporains et des biographies héroïques de Plutarque; ces lectures lui exaltaient l'imagination, elles lui donnèrent le goût de la rêverie dans la solitude et dans l'irréel. Il aima de très bonne heure la nature, la liberté dans les champs, la beauté des choses. La nature satisfaisait son goût de la rêverie solitaire. La pauvreté, dans ces conditions, était un malheur. Orphelin de sa mère, élevé par un père trop léger, puis abandonné par lui, Jean-Jacques, après quelques années insouciantes chez des parents, chez des amis, céda à l'appel du vagabondage, fit toutes sortes de métiers, connut l'humiliation et la faim, passa avec délices des nuits à la belle étoile, ne put jamais se résoudre à prendre quelque honnête emploi.