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SAINT-DENYS-GARNEAU, Poésies complètes

Publié le 25/02/2011

Extrait du document

Un poème a mijoté tout le jour  Et n'est pas venu  On a senti sa présence tout le jour  soulevante  5 Comme une eau qui gonfle  Et cherche une issue  Mais cela s'est perdu dans la terre  Il n'y a plus rien.  On a marché tout le jour comme des fous  10 Dans un pressentiment d'équilibre  Dans une prévoyance de lumière possible.  Comme des fous tout à coup attentifs  A un démêlement qui se fait dans leur cerveau  A une sorte de lumière qui veut se faire  15 Comme s'ils allaient retrouver  ce qui leur manque  Mais ils s'affolent de la lenteur  du jour à naître  Et voilà que la lueur s'en re-va  20 S'en retourne dans le soleil hors de vue  Et la porte de l'ombre se referme  Sur la solitude plus incompréhensible  Comme une note qui persiste, stridente,  Annihile le monde entier.    SAINT-DENYS-GARNEAU, Poésies complètes (1949) Poète québécois (1912-1943)    Ce texte pourrait être lu comme une définition implicite de ce que peut être écrire de la poésie. Vous pourrez vous intéresser, entre autres, à l'ensemble des sujets grammaticaux, à la transformation des images, à la composition du poème.    Vous organiserez votre commentaire selon le plan qui vous paraîtra le plus propre à mettre en relief les résultats de votre étude.   

remarques préalables    La facture de ce poème étonne par une écriture inhabituelle. La forme très libre, l'emploi de néologismes risquent de dérouter l'élève qui a étudié des textes plus classiques. Cependant, en lisant attentivement ces vers, on s'aperçoit qu'ils portent sur un thème assez traditionnel : l'inspiration poétique.   

« 1.

un vers : « Un poème a mijoté tout le jour », espoir d'une création. 2.

un vers : « Et n'est pas venu », échec.

Puis cette opposition s'amplifie : 1.

quatre vers (v.

3-6) : « On a senti...

Et cherche une issue », annonce d'une création. 2.

deux vers (v.

7-8) : « Mais cela...

plus rien », échec. Enfin le contraste s'équilibre suivant un ensemble de vers plus nombreux. 1.

huit vers (v.

9-16) : « On a marché...

Ce qui leur manque », l'intuition créatrice. 2.

huit vers (v.

17-24) : « Mais ils s'affolent...

Le monde entier.

» On constate donc que ce texte peut se diviser en trois parties, mais le rythme binaire prime.

Nous avons desséquences croissantes de un à huit vers. Enfin, pour relier l'espoir à l'échec, la première coordination se fait « neutre » avec « et », puis l'opposition s'accentue avec « mais » employé dans les deux dernières parties. Un plan en trois mouvements laisse souvent entendre que le texte évolue.

S'il y a retour en arrière à la fin, il se produit après le détour de la deuxième partie. Ici, ce n'est pas le cas : le texte ne progresse pas. Tout est dit dès les deux premiers vers : la préparation du poème et sa non-venue.

Les autres parties reprennent exactement cette opposition, l'approfondissent mais sans rien ajouter, sans faire évoluer le sentiment ou l'idée. A l'appui de cette remarque, nous noterons la similitude des vers qui terminent chaque échec : « Et n'est pas venu» correspond à « Il n'y a plus rien »...

qui trouve une équivalence dans le dernier vers du poème « Annihile le mondeentier ».

On peut dire simplement que le sentiment d'échec s'amplifie, passant de la non-venue, à la négation, au «nihilisme » de la fin (mouvement qui concorde, bien évidemment, avec la séquence croissante des vers). Cette structure particulière, répétitive, jouant sur l'opposition, « favorise », pour le commentaire, un plan en deuxparties.sujets grammaticaux et comparaisons 1.

« Un poème...

comme une eau qui gonfle » (v.

1-5) a) Le sujet est précédé par un article indéfini.

Cette imprécision se comprend de deux manières : il s'agit den'importe quel poème, et les lignes qui vont suivre valent comme définition de l'écriture poétique. Mais on peut dire aussi que l'indéfini crée une sorte d'indétermination qui s'explique par l'échec de la création : le «poème » ne trouve pas de réalité, il reste à l'état virtuel comme une intuition, comme un « pressentiment ». b) La comparaison de l'eau suggère que l'inspiration est semblable à un fleuve.

Par la relative, on pense à une crue,avec ce que cela suppose de force, de violence même. Le mot « soulevante » (v.

4) appelle une explication plus détaillée.

Normalement cette forme en -ant ne devrait pasavoir de féminin et l'expression attendue est « se soulevant ».

Le passage, inusité, à l'adjectif féminin donne à laprésence de l'eau une permanence beaucoup plus forte : « soulevante » devient une qualité définitive del'inspiration.

Celle-ci cherche à s'exprimer, à devenir réalité pour l'écriture...

Mais Saint-Denys-Garneau développel'image : « cela s'est perdu dans la terre » (v.

7).

L'eau ne peut s'épandre à la surface du sol.

Il resterait à imaginerce que représente la terre sur un plan symbolique.

C'est peut-être l'image du subconscient, de ce qui est enfouidans l'esprit humain et qui ne trouve donc pas à s'exprimer, le plein jour signifiant au contraire ce qui est conscient. 2.

« On a marché...

comme des fous » (v.

9). »

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