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Saison des Semailles. Hugo. Commentaire

Publié le 14/02/2012

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hugo

La nuit d'automne tombe sur la plaine vide. Seul un vieux paysan attardé chemine le long des sillons : il sème son blé. Le poète considère et médite; et voici que, dans une sorte d'aP.othéose, le paysan lui apparaît transfiguré et grandi immensément : de sa silhouette, il couvre un vaste pan du ciel; les lueurs du couchant lui mettent une auréole, et son bras fait un ample geste qui semble atteindre le cieL Et ces étoiles, semées là-haut à profusion, deviennent comme une métamorphose des grains de blé épars sur la terre. C'est donc la glorification du travail des champs....

Victor HUGO   (1802-1885)

 

Saison des semailles. Le soir

 

C'est le moment crépusculaire. 

J'admire, assis sous un portail, 

Ce reste de jour dont s'éclaire 

La dernière heure du travail.

 

Dans les terres, de nuit baignées, 

Je contemple, ému, les haillons 

D'un vieillard qui jette à poignées 

La moisson future aux sillons.

 

Sa haute silhouette noire 

Domine les profonds labours. 

On sent à quel point il doit croire 

A la fuite utile des jours.

 

Il marche dans la plaine immense, 

Va, vient, lance la graine au loin, 

Rouvre sa main, et recommence, 

Et je médite, obscur témoin,

 

Pendant que, déployant ses voiles, 

L'ombre, où se mêle une rumeur, 

Semble élargir jusqu'aux étoiles 

Le geste auguste du semeur.

hugo

« d'une eglise et, par extension, la facade entiere oil elles sont pratiquees. Employe a propos d'une demeure rustique, it produit un effet pittoresque. Ce reste de jour est un tour familier, d'une simplicite expressive, qui convient fort bien aux dernieres minutes du crepuscule.

Dont s'eclaire est mis pour dont est eclairee; le poke anime et personnifie tout, jusqu'aux heures.

Cette tournure, plus elegante que le passif, se recommande d'ailleurs, meme en prose, par sa vivacite.

Un enjambement, a peine perceptible, relie le 30 au 40 vers : dont s'eclaire -- la derniere heure...

La derniere heure du travail...

Ce dernier vers du premier quatrain dirige l'esprit du lecteur vers le veritable sujet.

Encore que le pittoresque joue un role important dans ces strophes, it ne faut pas nous y tromper, it n'en est pas l'essentiel.

Le poke songe moins a exprimer la melancolie des soirs qu'it deerire et a magnifier une scene du labeur humain.

Cette derniere heure n'est pas celle du jour, mais celle du travail.

Pas une seconde a perdre entre l'aurore tardive et la nuit tot venue en septembre ou en octobre. 0*. 20 Strophe.

Tandis que la premiere strophe fixe le moment et le cadre general de la scene, la deuxieme nous presente le semeur, personnage prin- cipal.

Elle marque, en outre, le second temps : de l'admiration de la nature le poke passe a la contemplation de l'homme.

Dans les terres de nuit baignees...

Apres s'etre hien moques des inversions classiques, les Romantiques en commettent sans scrupule.

Et ils ont raison. Baignees devait figurer a la rime, c'est le mot qui fait image, le mot important. Le pluriel les terres semble decouvrir a nos regards l'immensite de la plaine labouree, on le champ succede au champ.

Et, quand vient le crepuscule, rombre que l'on dirait sortir du sol, comme une exhalaison, se repand sur la plaine en ondes impalpables qui s'epaississent et inontent insensiblement; et sous ce flot silencieux, envahissant, on n'apervoit plus e les terres ) qu'in- distinctes, semblables a un corps plonge dans l'eau. Je contemple, emu, les haillons...

La marche du vers est significative.

Je contemple, se detache symetriquement, comme "admire; emu, entre deux virgules, entre le verbe et le substantif evocateur, produit un effet certaine- ment voulu, calcule.

Contempler, c'est regarder attentivement et longuement; l'emotion milt de la contemplation, it y a ici relation de cause a effet.

Et de quoi est emu le poke? Des haillons de ce travailleur obstine.

Celui qui peine encore, tandis que les autres se reposent, c'est un pauvre, non point simple- ment un laboureur en habits de travail usages, mais un homme que son métier nourrit a peine et qui n'a point les moyens de se vetir convenable- ment.

Et notre mknoire nous rappelle le sombre tableau peint par La Bruyere, ces qu'in· distinctes, semblables à un corps plongé dans l'eau.

ü contemple, ému, les haillons ...

La marche du vers est significative.

Je contemple, se détache symétriquement, comme .j'admire; ému, entre deux virgules, entre le verbe et le substantif évocateur, produit un effet certaine­ ment voulu, calculé.

Contempler, c'est regarder attentivement et longuement; l'émotion naît de la contemplation, il y a ici relation de cause à effet.

Et de quoi e!'t ému le poète'! Des haillons de ce travailleur obstiné.

Celui qui peine encore, tandis que les autres se reposent, c'est un pauvre, non point simple­ ment un laboureur en habits de travail usagés, mais un homme que son métier nourrit à peine et qui n'a point les moyens de .se vêtir convenable­ ment.

Et notre mémoire nous rappelle le sombre tableau peint par La Bruyère, ces « animaux farouches ...

noirs, livides ...

attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'ils remuent avec une opiniâtreté invincible '> ...

qui « épargnent aux autres hommes la peine de semer ...

et méritent ainsi de ne pas manquer de ce pain qu'ils ont semé '> • ...

D'un vieillard ...

Autre source d'émotion : ce pauvre est vieux; l'heure de la retraite a sonné pour lui, quand même il travaille avec acharnement.

Il jette ci poignées ...

l'expression qui, parfois est ostentatoire, n'indique pas ici la prodigalité, elle exprime exactement un geste observé.

Là encore, nous rencontrons un de ces enjambements auxquels on ose à peine donner ce nom.

Il jette à poignées - la moisson future ...

La périphrase désignant les grains de blé est belle et naturelle.

Ce qui soutient le courage du semeur, en son labeur tardif, c'est la perspective de la moisson future.

Par delà ces grains nus et inertes, il entrevoit Le brin d'herbe sacré qui nous donne le pain.

(Musset) Ce qu'il jette aux sillons, ce que sa main experte disperse et dissémine, c'est bten la moisson et le pain quotidien.

* ** 3" Strophe.

Sa haute silhouette noire ...

domine les profonds labours.

En deux vers, voici un tableau où tout parle aux sens et à l'âme.

Une silhouette est un dessin représentant un profil tracé autour de l'ombre d'un visage.

Comme d'autres mots : calepin, poubelle, godillot, etc ...

, celui-ci vient d'un .nom propre.

Etienne de Silhouette, seigneur du xvm• siècle, s'amusait à tracer. »

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