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Seconde préface de la Nouvelle Héloïse (analyse)

Publié le 28/04/2011

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   Nous avons dit que cette seconde préface, achevée en 1759, avait été publiée à part, quelques jours après le roman ; elle ne figure donc pas dans la première édition.    Cette préface est une discussion entre deux interlocuteurs, R (Rousseau) et N qui critique le roman. N commence par déclarer: « Je ne connais rien de si maussade ; ces lettres ne sont point des lettres ; ce roman n'est point un roman ; les personnages sont des gens de l'autre monde «. Discussion un peu confuse et un peu vague sur la vérité humaine des caractères, sur le style des lettres qui n'est pas celui des romans mondains, qui est moins brillant mais plus vrai. « Rien de saillant, rien de remarquable ; on ne retient ni mots, ni tours, ni phrases ; on n'admire rien, l'on n'est frappé de rien.

« propres mains et philosophant sur la nature, ni d'autres pareils êtres romanesques, qui ne peuvent exister que dansles livres ; mais de montrer aux gens aisés que la vie rustique et l'agriculture ont des plaisirs qu'ils ne savent pasconnaître ; que ces plaisirs sont moins insipides, moins grossiers qu'ils ne pensent ; qu'il y peut régner du goût, duchoix, de la délicatesse ; qu'un homme de mérite qui voudrait se retirer à la campagne avec sa famille, et devenirlui-même son propre fermier, y pourrait couler une vie aussi douce qu'au milieu des amusements des villes; qu'uneménagère des champs peut être une femme charmante, aussi pleine de grâces, et de grâces plus touchantes quetoutes les petites maîtresses ; qu'enfin les plus doux sentiments du cœur y peuvent animer une société plusagréable que le langage apprêté des cercles, où nos rires mordants et satiriques sont le triste supplément de lagaieté qu'on n'y connaît plus.

Est-ce bien cela ? R.

C'est cela même.

A quoi j'ajouterai seulement une réflexion.

L'on se plaint que les romans troublent les têtes ; jele crois bien : en montrant sans cesse à ceux qui les lisent les prétendus charmes d'un état qui n'est pas le leur, ilsles séduisent, ils leur font prendre leur état en dédain, et en faire un échange imaginaire contre celui qu'on leur faitaimer.

Voulant être ce qu'on n'est pas, on parvient à se croire autre chose que ce qu'on est, et voilà comment ondevient fou.

Si les romans n'offraient à leurs lecteurs que des tableaux d'objets qui les environnent, que des devoirsqu'ils peuvent remplir, que des plaisirs de leur condition, les romans ne les rendraient point fous, ils les rendraientsages.

Il faut que les écrits faits pour les solitaires parlent la langue des solitaires : pour les instruire, il faut qu'ilsleur plaisent, qu'ils les intéressent ; ils faut qu'ils les attachent à leur état en le leur rendant agréable.

Ils doiventcombattre et détruire les maximes des grandes sociétés ; ils doivent les montrer fausses et méprisables, c'est-à-diretelles qu'elles sont.

A tous ces titres, un roman s'il est bien fait, au moins s'il est utile, doit être sifflé, haï, décrié parles gens à la mode, comme un livre plat, extravagant, ridicule ; et voilà, monsieur, comment la folie du monde estsagesse. Il y a pourtant une objection.

Si le roman peut être utile aux maris, aux femmes, aux mères de famille, que dire desjeunes filles ? La réponse de Rousseau est que la faute de Julie n'est vraiment grave que dans la coupable morale dela société contemporaine, morale qui enlève aux jeunes filles toute liberté, leur impose des mariages odieux etconsidère l'adultère des femmes mariées avec indulgence ou même avec sympathie.

La Nouvelle Héloïse n'enseignepas aux filles à prendre des amants ; elle apprend aux pères qu'il faut les marier selon leur cœur pour qu'ellesrespectent la sainteté du mariage.

N qui représente les « philosophes » ne se déclare pas convaincu.

« Inspirerl'amour aux filles et la réserve aux femmes, c'est renverser l'ordre établi, et ramener toute cette petite morale que laphilosophie a proscrite.

Quoi que vous en puissiez dire, l'amour dans les filles est indécent et scandaleux ; et il n'y aqu'un mari qui puisse autoriser un amant ». La Préface s'achève par quelques chicanes de détail.

Rousseau a-t-il raison de publier le roman sous son nom ?Pourquoi n'avoir pas corrigé des maladresses « que le dernier barbouilleur eût évitées », déclamations, répétitions,contradictions, éternelles rabâcheries.

Peut-être sont-elles la preuve que ces lettres sont vraies.

« Dites que cesdeux femmes ont existé, et je relis ce recueil tous les ans jusqu'à la fin de ma vie ».

Rousseau refuse de seprononcer.

Et il y eut, pendant de longues années, des lecteurs pour croire qu'il n'avait été que l'éditeur d'unecorrespondance authentique.. »

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