SEGRAIS (Jean Régnault de)
Publié le 14/05/2019
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«
SEGRAIS, Jean Regnauld (ou Ren aud) , s ieur de (1624-170 1).
De Segrai s La Br uyère disai t : «Il fait
revivre Virgile parmi no us, transm et dans notre langue
les grâces et les richesses de la latine, fait des rom ans
qui ont une fin, en bannit le pro li xe et l'in croy ab le pour
y substituer le vra is emblable et le naturel >>, rés uma nt
parfaite ment l'œ u vre d'un écrivain en qui Voltaire
saluera « u n très bel esprit et un véri ta ble homme de let tres».
Le Virgile fran çais
« Une belle et jeu ne Clymène qui a n imerait le peu de géni e qui est en moi et un grand maître savant connais seur qui le soutiendrait et le dirigerait me pourraient faire
p arvenir à quelque gloire si, comme je vous l'ai dit, il y
en a, en France, à faire des églogues».
Par ces lignes , en préface à son poème Athys , pu blié en 1653 , Segrais défi nit avec esprit les limi tes du ge nre dans leq uel il f ait, avec succès , ses première s ar mes.
Dans ce poème « épi que et bucolique » il cha nte ber ge rs et bergères qu i s'ai ment sur le s rives de «l'Orne délicieuse aux tortueux détours», éle vée au rang de «Ce ltique Méand re».
Six autres églogues, publiées en 1660, succ édero nt à l'A th ys.
L oués en latin par s es amis Ménage et Huet, ces venustis sima poemata abondent en « li eux sauvages et solitai res » , « an tre s affreux », « noires forêts », « grot te s
obscures ».
Ogier, d ans une longue et sava n te disse rta
tion, publiée en annexe des « Églogues» (dans les Poé sies dive rses, 1658) , se demande s'il ne conviendra it pas d'améliore r« pais ibles marais »e n «humides marais» .
Le jeune Segrais bai gne alors avec bonheur dans le
milieu parisien de la création littéraire.
n est arrivé de
Caen, où il est né, da ns la sui te du comte de Fiesque ,
au près duquel il fait profes sio n de poésie, en gentil homme pauvre contraint de monnaye r ses talents.
A vingt
ans, il avait déjà écrit une tragédie su r la Mort d'Hi ppo
lyte et un long roman, B érénice, qui fut publié en L648.
La mode e st à la poésie bucolique et galante , suivant le mo dè le de l'Astrée, et les« poètes de rue lles» riva l isent à qui prod ui ra élégies, épîtres, stances et sonnets.
Si Segrais affirme que ses poés ies sont «plus amou re use s
que champest res », i l a u ne faço n bi en à lui de traiter les
th èmes imposés par la mode, et possède assez d'esprit et
de sen sib ili té pour manier les poncifs avec habileté, voire
avec humour.
Son «Épître à une dame qui aim a it un
vieillard » est pleine de malice et de tr aits digne s de Molière , son so nnet allégoriq ue « A la mer » ( « Dange reux élément, mer trompeuse et changeant e ») a des
accents quasi baudelairiens.
Le père du roman moderne
En 1648, Segrais entra co mme secrétaire des com ma nde ments au serv i ce de Mademoise lle, nièce de Louis Xlli.
Ell e venait de produire deux romans à clés
- publiés sans nom d'auteur en 1646 -, la Relati on de l'île imaginaire et l'Histoire de la prin cesse de Pa phla goni e.
Ces deux courts récits se déroulaie nt dans un
cadre de f an taisie.
Av ec le désenchantement qui suivit la Fro n de , la littérature allai t pre ndre le tournant du réa lisme.
Le doux et craintif Seg rais, qui avait songé un moment , avec Scarro n, à s'ex pa trier pour fuir l'incerti tude des temps , avai t per du le goût de la pa storale.
La nouvelle orientation de son art appa rut avec la publica
tion, en 1656, des Nouvelles frança ises ou Divertisse men t de la pri nc esse Aurélie.
Six récits , racontés tour à tour par Mademo iselle et c inq de ses amis, à la faço n de 1 'H ept am é ron o u d e B occace, sont séparés par des
inte rmèdes de discussions sur la théorie du roman, ses genre s, ses lois, sa composition, l a peintu re de s senti ments, le dénouement.
On reconnaît au roman le droit à la poésie , à l'inv ention à plaisir, mais on réclame pour la nouve lle cel ui d'exploiter l'hi sto ire , de se situer en
des lieux précis, de décrire des mœurs existantes.
Le s Nouvell es sont ch argées d'illustre r ces principe s esthéti que s [v oir NOUVELLES].
Cer tes, c'est un fait qu'elles se sit uent dans la Normandie médiév ale, dans la Turqui e du
xvne siècle et même dan s le Paris de la F ron de, mais on
ne saurait parler de vérité historiq ue.
Quant à l'in trigue ,
on se dema nde ce qu 'elle serait si elle ne visait pas à la vr aisemblance.
L'i mbrog l io de «M athilde» commence
avec un enlèvement qui a lieu dan s l'intervalle de la n aissance de deux jumeaux.
Ces récits foi so nnant d' évé nements ont le char me de la concision et su rtou t une fin à la fo is « souha i table » e t « surprenante », car l'art doit
être « un agréable mensonge ».
C'est peut -être avec
« Floridon ou J'Amou r imprudent» qu'o n mesure le mieux l'enjeu des amb ition s de Segrais.
R acine , e n e ffet,
en a repri s l'argumen t dans Bajazet.
Seg rais c riti quera
les h éros de Racine , disant qu • « ils ont tous, sous un
h abi t tur c, les sentimen ts qu'on a au milieu de la Fran ce».
Les mœurs , dans sa nouvelle, sont, de tout e
évidence, plus bi zar res que turque s; mais, en m ême temps, est posée la fonction de l'exotism e dan s le roman
m odern e, double dépassement de la réalité vers le p ara-.
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