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STENDHAL: DE L'AMOUR (1822). — MÉLANGES DE POLITIQUE ET D'HISTOIRE (1804-1837). — MÉLANGES DE LITTÉRATURE (1797-1841). — COURRIER ANGLAIS (1822-1829). ANALYSE D'OEUVRES

Publié le 23/06/2011

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stendhal

Le livre De l'Amour est un plaidoyer secret auprès de Métilde. Au lieu de recourir à une affabulation romanesque, Stendhal compose un ouvrage qui, dans la première partie, est un traité d'idéologie ou plutôt un « discours sur les sentiments «, et dans la seconde, une sorte d'illustration. Métilde pouvait bien lui défendre de parler d'amour. Il n'était pas au pouvoir de « la petite tête la plus altière de Milan « de lui interdire d'aimer en silence et de s'analyser. Ni de noter dans un angle de salon, sur un programme de concert, sur des bouts de papier, sur des cartes à jouer, ses observations. Cette matière, rassemblée sans ordre et sans but défini, peu à peu s'amplifia. Ayant remis son manuscrit à un ami, qui devait l'expédier de Strasbourg à Paris, l'envoi s'égara et Stendhal, anxieux car il ne possédait pas de double, mit un an et demi à le récupérer ! « Perdu sous les grands marronniers des Tuileries «, il pense inlassablement à Métilde. Quand la souffrance devient trop cruelle, il hante les salons. S'il répugne à être distrait par le monde, la solitude de Montmorency l'accueille.

stendhal

« réfléchissants ».

Il eut la terreur des bas-bleus.

Mais il savait que l'éducation de la femme telle qu'il l'entendait «doublerait les forces intellectuelles du genre humain et — (ce qui importait bien davantage) — ses chances debonheur ».

Nous rejoignons, après vingt années, les idées du temps où il initiait Pauline à l'idéologie.

C'est dans cebréviaire du beylisme, peut-être, qu'il découvre le mieux les conditions du bonheur : « Quel excellent conseiller unhomme ne trouverait-il pas dans sa femme si elle savait penser » Ainsi l'analyse de l'amour-passion aboutit, quelquesarcasme qu'il doive encore décocher par la suite au « matrimonio », à cette pensée apaisée qui prouve que cetépicurien plaça toujours l'émoi du rêve amoureux bien au-dessus de l'acharnement de la possession : « On dit que lavieillesse, changeant nos organes, nous rend incapables d'aimer ; pour moi je n'en crois rien.

Votre maîtressedevenue votre amie intime vous donne d'autres plaisirs, les plaisirs de la vieillesse.

C'est une fleur qui, après avoirété rose le matin, dans la saison des fleurs, se change en un fruit délicieux le soir, quand les roses ne sont plus desaison...

» Que devient, devant cet aveu, le prétendu cynisme de Stendhal ? Tel est le rêve qu'il eût aimé vivreavec Métilde.La première partie du recueil, qui considère l'amour du dedans et en poursuit, par une idéologie passionnée, la subtileanalyse, reste de beaucoup la plus attachante.

La seconde partie, écrite loin de Milan, considère du dehors la «maladie » nommée amour : Fauriel procura à Stendhal dix pages d'aventures arabes et le chapitre sur l'amour dans laProvence du XIIe siècle ; Raynouard, les appendices sur l'amour au Moyen âge ; Cadet de Gassicourt, le chapitresur l'amour allemand ; le colonel Weiss, les anecdotes sur la Suisse.

En 1825 Jacquemont lui remettra le chapitre surl'Amour en France dans la classe riche.

Les sensualistes et les idéologues lui avaient fourni l'essentiel de ses idées.

Iladmirait Lavater et la science des physionomies ; ses opinions sur le mariage et l'éducation des femmes rejoignentcelles de Destutt de Tracy.

Dans ce domaine, Stendhal était redevable aussi à un article de 1810 de ThomasBroadbent dans l'Edinburgh Review.

Mainte pensée de nos moralistes se trouve incorporée à son texte.

Il n'en a pasmoins marqué ces pages de son sceau.

L'exactitude des descriptions ne l'écarte pas de la décence.

Ses idées noustouchent par ce qu'elles dévoilent de son âme ardente, discrète et blessée.

Par la seule délicatesse de sasensibilité, Stendhal s'élève à l'idéalisme quasi mystique du dolce stil nuovo.

Métilde, par moments, a bien pul'exaspérer, mais elle l'a pacifié aussi — « son fantôme tendre, infiniment triste » l'apaisera plus encore après 1825.Elle lui a révélé que la noblesse du coeur est nécessaire à la naissance d'un sentiment élevé.

Métilde restainaccessible et cela valut mieux pour l'oeuvre future du romancier.

En fait, plus qu'une amoureuse, elle était unemère tendre et une grande patriote.

La malchance d'Henri Beyle voulut qu'il s'éprît éperdument, entre mille, d'unefemme revenue de bien des choses, et en particulier de l'amour.

A en juger par certaines allusions des Promenadesdans Rome, il ressentit à son égard, rétrospectivement et en imagination, une sorte d'exaspération sensuelle etjusqu'au désir furtif de la vengeance, dernière preuve de la véhémence de son attachement.Dans ce traité, aimé des délicats, le logicien, le clinicien s'impose moins que l'artiste et le psychologue.

Uneimpression musicale émane des meilleures pages, comme il arrive chaque fois que l'écrivain atteint ce degréd'exaltation et de mesure qui est la forme de prédilection de son lyrisme.

On a noté que s'il parle de musique commeun amoureux, il parle d'amour comme un musicien : « Je viens d'éprouver ce soir que la musique quand elle estparfaite, met le cœur exactement dans la même situation où il se trouve quand il jouit de la présence de ce qu'ilaime ».

Il s'abandonne aux images du passé, douces ou cruelles.

Bientôt, transposant ses souvenirs et les adaptantaux tempéraments de ses héros, il trouvera la tonalité fondamentale d'un amour qui restera le même dans chaquelivre.

Ce ne sera pas le roman vécu de Stendhal, mais son roman rêvé — et qui est plus vrai que sa vie.

Ce recueild'idéologie passionnée, dans un cadre d'apparence assez rigide, renferme les vérités particulières les plus nuancées,les plus rares et les plus difficiles à exprimer.

Rarement hommage masculin à la beauté fut plus exquis et plus total.Ce don chevaleresque de soi-même a le goût religieux d'une véritable consécration.Les Mélanges posthumes et le copieux Courrier anglais révèlent un Stendhal politique.

On sait que ce libéral est, parla sensibilité et le raffinement, un aristocrate auquel -il eût répugné, sous un régime républicain, de faire la cour aupeuple.

Le régime des deux chambres et un roi constitutionnel sont à ses yeux le moins mauvais des gouvernements; mais la vie politique de la Restauration est la platitude même.

Les progrès de l'industrialisme ne le persuadent pasque la richesse doive brimer l'intelligence.

Contra-dicteur-né, c'est en réaction contre les idées, les régimes et leshommes qu'il se comportera.La terreur blanche lui fit encore plus d'horreur que les excès révolutionnaires.

Attaché à l'ordre social, il lui eûtsacrifié allègrement quelques petites commodités particulières.

S'il raille la vanité française, il a, sans chauvinisme, lesouci de l'honneur et de la grandeur de son pays.

Il critique les hommes qui ne lui paraissent pas toujours mériterl'élévation où les circonstances les ont hissés ; mais l'expérience guerrière ne lui a pas fourni seulement desexemples d'arrivisme éhonté ; il reconnaît le courage de la race, le génie du chef, et rend hommage au soldatfrançais : « Nous qui l'avons vu de près, nous savons qu'il est plein d'esprit et de délicatesse.

» On songe auTambour Legrand, de Henri Heine.

Ces Mélanges de politique et d'histoire tirent parti des articles, souvent frondeurs,des périodiques d'Outre-Manche.

Car son anglomanie s'accroît à mesure que baisse sa foi jacobine.Les fragments en vers qui se trouvent dans les Mélanges de Littérature sont négligeables, mais on y rencontre à ladate de 1819 l'ébauche, brève, délicate, du Roman de Métilde qu'il est d'usage de reproduire en appendice à Del'Amour.

C'est toujours le vain subterfuge d'une confession romanesque destinée à toucher l'indifférente.

Un autredébut de roman retient l'attention : Une Position sociale (1832).

Stendhal n'en compose que trois chapitres.Pouvait-il en tant que consul peindre le monde diplomatique de Rome ? Son ambassadeur devenait M.

de Vaussay ;M1,18 de Saint-Aulaire était Mme de Vaussay et empruntait quelques traits à la comtesse Curial.

Sous le nom deRoizand, l'auteur campait une sorte de « Dominique idéalisé ».

Cette ébauche lui eût fourni plus d'un élément pour lafin, non rédigée, de Lucien Leuwen qui devait avoir pour cadre les milieux de la diplomatie dans la Ville Éternelle.On découvre dans ces Mélanges de Littérature, échelonnés sur plus de trente années, bien des études sur lesmoeurs et la société qui sont déjà la matière du Courrier Anglais. Le récit d'un Voyage à Brunswick met en scène Mina de Grisheim.

Tels jugements sur Mue de Staël montrent à lafois ce que Stendhal reprochait à « cet esprit qui prétend aux honneurs du génie », et dont il trouve parfois, sous la. »

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