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STENDHAL: RACINE ET SHAKESPEARE (1823 et 1825). — LA VIE DE ROSSINI (1823). — MÉLANGES D'ART (1824-1837). — D'UN NOUVEAU COMPLOT CONTRE LES INDUSTRIELS (1825). ANALYSE D'OEUVRES

Publié le 23/06/2011

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stendhal

Par Racine et Shakespeare Stendhal, quatre ans avant la Préface de Cromwell, fait figure de novateur et de protagoniste dans la querelle des romantiques et des classiques. L'ouvrage sortait tout vivant des discussions chez Delécluze, et cette incursion dans la bataille littéraire vaudra à son auteur le surnom de « hussard du romantisme «. Stendhal, qui avait eu quelque mal dans sa jeunesse à délaharpiser son goût, avait sur ses partenaires un avantage : il se trouvait à Milan lorsqu'en 1816 Mme de Staël, imbue du romantisme allemand, y attise le différend par sa lettre sur la manière de traduire et l'utilité des traductions. Le « romanticisme « s'identifiait en Italie avec le libéralisme politique et patriotique et avait pour tribune le Concidiatore. Henri Beyle sera séduit par le débat. Ses réflexions sur le comique l'avaient préparé à la critique littéraire. Les idées qu'il va exposer ont servi de base à ses premiers livres. L'écrivain doit être l'interprète de son temps en créant du neuf : le beau est relatif, évolue de siècle en siècle, et la vis comica elle-même est mortelle.

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« qu' « une suite d'odes entremêlées de narrations épiques ».

Chassant, avec les trois unités, l'usage du vers à lascène, il exigeait comme les romantiques italiens des drames historiques en prose sur des sujets nationaux.Songeait-il à l'épopée napoléonienne ? Il ne s'inquiète point de la réforme du style et du vers et dédaigne le lyrismesentimental.

Mais jusque dans la comédie française devenue « depuis Destouches et Collin d'Harleville une épîtrebadine, fine et spirituelle », il souhaite de voir rétablir l'élément dramatique qui en a disparu.

Stendhal nes'incorporera jamais tout à fait à la cohorte de ses cadets qui prendront position dans la Muse française, en 1824,autrement et plus complètement qu'il ne le fit en 1823.

Son style répugnera toujours au romantisme.

Son âme, plusromanesque que proprement romantique, se complaira à la lenteur des analyses raffinées.

Comment se contenterait-il d'opposer l'ombre à la lumière, alors que la vérité et la vie sont dans les nuances qui les séparent et les diversifient? Ce double manifeste nous amène à nous demander quelles furent les limites d'engagement de Stendhal.

S'est-iljamais peint sous les traits d'un écrivain-mage planant au-dessus des nuées, d'un conducteur de peuples, «puissant et solitaire », trônant sur quelque Sinaï, devançant les foules ou remontant leur courant ? Eloigné de toutepose comme de toute sensiblerie, de toute grandiloquence, il a le sens de l'authentique dans le domaine dessentiments.

Il a tôt fait de déceler chez autrui ce qui est sincère et ce qui est « plaqué ».

Sa perspicacité discernequ'un sentiment sincèrement éprouvé peut être en même temps un sentiment faux : « Se sacrifier à ses passions,passe, mais à des passions qu'on n'a pas !...

O triste XIXe siècle ! » proclamera bientôt une épigraphe du Rouge etNoir.

Est-ce seulement sa calvitie précoce et son toupet d'emprunt qui l'empêchèrent de jamais jouer au beauténébreux ? Sans doute, la véhémence des passions qu'il analyse, le romanesque des situations, le culte del'énergie, le goût des fortes émotions, un certain accent parfois de roman de cape et d'épée, le rattachent-ils auromantisme ; et aussi le culte du héros, l'individualisme forcené, l'égotisme, le non-conformisme et jusqu'à unecertaine apologie du dérèglement.

Mais ce qui, le distingue, c'est une clairvoyance psychologique sans pareille, unstyle alerte et sans complaisance.

Après avoir failli imposer en France ce mot de « romanticisme », il a fait cavalierseul, plus soucieux d'écrire en « français » qu'en « littérature française ».

Il se sépare des poètes, ne prend pointfeu et flamme pour Hernani, qui le déçoit.

Il ne veut ressembler à personne.

Une lente maturation s'opère en lui.

Ils'évade de la discussion critique et la dépasse, considérant les beaux-arts à côté de la littérature.

Son Racine etShakespeare va au-delà de la prise de position oratoire de la Préface de Cromwell.

Sa grande affirmation, c'est queles arts doivent évoluer et que la beauté est relative.Son engouement romantique le rendra-t-il plus indulgent à l'égard de Byron qu'il ne l'est à l'égard de Racine ? Il ne luipardonnera pas de préférer son titre à son génie, de vouloir être à la fois grand homme et grand seigneur commeRacine voulait être grand poète et bon courtisan.

Il verra en lui « un homme d'orgueil qui finira par se brûler lacervelle parce qu'il ne peut pas être roi ».

N'exagérons ni les sympathies littéraires, ni les antipathies de Stendhal.

Ilfut un peu, à l'égard du romantisme, ce qu'il fut à l'égard du carbonarisme — spectateur séduit, puis réticent.

Ildonna une des premières chiquenaudes à la discussion et prit position ; puis il se détacha d'un groupe qui, au cultede l'individu, joignait celui de la forme, et chez qui le culte de la forme, parfois, masqua assez mal le peu deconsistance de l'individu.

Fondée sur une expérience vécue et sur une curiosité sincère de l'homme, cette probité unpeu sèche d'apparence le rejette hors des cadres de 1830.Hormis le culte de la passion et de l'individu — qu'il entend d'une façon différente — il n'a que les négationscommunes avec les romantiques.

Cette vérité psychologique, cette vérité sociale qu'il exige de la littérature, maisqui requiert un outil intellectuel de haute précision, pouvait-elle être le fait d'un romantisme épris de vague à l'âme,de l'à peu près des passions, et qui décrira d'autant plus le monde extérieur qu'il aura souvent moins à dire sur leplan du monde intérieur ? Peut-on imaginer l'écrivain des Chroniques italiennes dans le genre frelaté du drameromantique ? Enfin n'oublions pas qu'en pleine vogue de Walter Scott, Stendhal, si cosmopolite de tendance et siouvert aux idées d'Outre-Manche, s'éleva contre l'influence envahissante d'un écrivain à succès, aussi pauvred'idées que riche de bric-à-brac historique, en qui il vit avec méfiance un promoteur de la littérature commerciale.Au fond, il n'est ni romantique, ni classique au sens ordinaire des termes, mais pour la génération de 188o et lesgénérations suivantes il sera, comme Barrès l'a justement défini, « un classique d'âme », de sensibilité.La Vie de Rossini, qui révèle un autre aspect de Stendhal mélomane, eut du succès pour son allant et sonopportunité.

Conçue dans l'atmosphère des réceptions chez la Pasta, elle est toute de premier jet.

L'ouvrageparaissait quand Rossini faisait la conquête de Paris.

Allait-il disputer à Cimarosa et à Mozart la première place dansle coeur de l'écrivain ? Non point ; et Stendhal l'eût moins prôné s'il ne l'eût entendu qu'à Milan.

C'est par oppositionavec la musique française, si médiocre, du début du siècle qu'il s'intéressa à Rossini.

Dès 1818, il était persuadé quele goût français raffolerait du Barbier de Séville.

Il ne s'agit donc pas d'un engouement aveugle.

Stendhal accordeque Rossini est « léger, piquant, jamais ennuyeux », qu'il est « vif, généreux, brillant, rapide, chevaleresque, aimantmieux peindre peu profond que s'appesantir ».

Mais son style musical, annonciateur de l'inspiration romantique, luiparaît « trop peu poétique ».

Rossini lui donna toujours du plaisir, rarement de la joie, et jamais de bonheur divin.

Ilregrette qu'on abandonne la musique du xviiie siècle pour un compositeur qui « a voulu se rapprocher du fracas de lamusique allemande ».

Faite pour peindre les seules « passions tendres », la musique fie saurait exprimer l'esprit.Rossini n'est jamais parvenu à peindre la passion, son amour n'est que de la volupté ».

Stendhal avait rencontré lecompositeur dès 1816, chez Elena Vigan?), chez les soeurs Monbelli.

A Paris la Pasta, à l'apogée de son talent,imposait le musicien.

Stendhal lui reprochait sa faconde et appréciait peu en lui une certaine grossièreté ducaractère et des façons.Il avait d'abord songé à écrire une histoire de la musique au commencement du XIXe siècle.

Il s'en tint finalement auRossini de la première manière dont il limite l'étude à la date de 1819.

Écrivant à bâtons rompus et comme dans lahâte de l'improvisation, Stendhal, par un véritable mimétisme, use de ces « fioritures » qui pouvaient le mieux donnerla sensation du talent du compositeur en renom.

Le chicanerons-nous sur son goût exclusif de la musique vocale etde l'opéra-bouffe ? L'absence de formation technique l'empêche de parler « en orfèvre » de la musique, niais il enparle en dilettante éclairé.

Berlioz, Saint-Saëns se sont moqués de lui à la légère.

Berlioz parle d'un « Monsieur. »

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