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Tristan et Iseut, Béroul La Traversée du Mal Pas (v.3912-3940) - Littérature

Publié le 14/09/2011

Extrait du document

Leur complicité se lit aussi à travers plusieurs signes de connivence, comme dans plusieurs passages du texte de Béroul. Tout d’abord, nous savons que Tristan a accepté et joue à merveille le rôle que lui a proposé Iseut. Ils savent tous deux qu’il s’agit d’un jeu destiné à tromper, tout comme Dinas (v.3874, à propos de Dinas : « De l’uel li guigne, si l’esgarde « : clin d’œil complice avec l’un de leur adjuvant). Tristan commence par sourire : lorsqu’Iseut lui dit qu’elle le montera « conme vaslet «, il comprend ce qu’elle a derrière la tête. Ensuite, Tristan accentue son jeu : il fait semblant de tomber à chaque pas, il exagère vraiment son jeu. Tous ces signes de complicité entre les amants sont surtout des signes destinés à tromper, comme toujours.   

« Tristan est donc réduit à une simple bête de somme.

Tristan est un « asne » ; comme un mulet il va porter la reinesur son dos.

Si l’on prend le discours d’Iseut au premier degré, on peut voir une sorte d’humiliation de sa part.

Eneffet, elle a déjà choisi de donner un déguisement de lépreux à Tristan.

Au Moyen-âge, tout comme aujourd’hui, lalèpre est vue comme une maladie dégradante.

Elle parle de son « mal » (v.3924), c’est un « malades ».

Elle luidonne des ordres, comme le montrent les impératifs « diva » (v.3929), « tor » (v.3933) ou l’adverbe « cuite »(v.3923).

En chevauchant Tristan, Iseut peut être vue comme une femme dominatrice : elle réduit l’homme à unstatut de bête, perdant toute virilité.

Cette image de la femme fait peur au Moyen-âge.

Iseut est donc unpersonnage ambigu : elle est à la fois une femme noble, une reine, et pourtant elle grimpe à califourchon, enhumiliant Tristan, en étant dominatrice. Pour finir, penchons nous sur deux motifs récurrents dans l’œuvre : la lèpre et les vêtements.

Comme nous m’avonsdit plus haut, Iseut choisit un déguisement de lépreux pour Tristan.

Il aurait pu revêtir un autre masque, commecelui du fou comme dans les Folies, celui de marchand comme dans la saga norroise.

Ce n’est donc pas par hasardqu’elle choisit ce déguisement là.

La lèpre est depuis le début associée à l’idée de luxure : elle représente leur amourpassionnel.

La lèpre est aussi symbole de pêché pour l’Eglise, d’après l’Evangile selon Luc.

D’après Vincent deBeauvais, la lèpre est une maladie que la femme transmet par voie sexuelle : c’est elle qui aurait donné sa maladie àTristan ; c’est pour cela qu’elle n’a pas peur d’attraper son mal (v.3924/3925 : « Quides tu que ton mal me prenge ?/ N’en aies doute, non fera »).

Le deuxième motif récurrent est celui des vêtements.

Au vers 3917, Iseut évoqueses « dras » qu’elle ne veut pas salir.

« Dras » peut avoir plusieurs sens : ce mot signifie à la fois les draps d’un lit,et les vêtements.

Ce motif est déjà présent lors de l’épisode de la « flor de farine ».

Tristan a déjà sali les draps dela reine, avec son sang.

Iseut ne veut pas salir ses vêtements : peut-on y lire qu’elle ne veut pas à nouveau souillerses « dras » ? Ce mot doit être lu dans les deux sens.

Les tâches de sang sur le lit d’Iseut ont trahi leur amouradultère, on peut donc penser qu’ici elle ne veut pas trahir à nouveau leur relation. Iseut est donc une reine, une femme noble, maîtrisant parfaitement la « mètis », la ruse.

Cependant, elle est aussiune femme ambigüe, en utilisant Tristan comme une bête de somme, dans une position très crue.

Elle est donc à lafois divine, tirée vers le Haut, et infernale, tirée vers le Bas.

Toute cette mise en scène, sur le ton de la farce, sertà sa justification future.

Rien n’est donc du au hasard, tout est préparé.

Cet extrait nous présente donc unenouvelle scène de complicité entre les amants, surtout centrée sur la figure d’Iseut, qui s’avère être une figure del’ambiguïté.. »

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