Devoir de Philosophie

Un noyau dramaturgique : Dom Juan-Sganarelle

Publié le 05/08/2014

Extrait du document

juan

deux conceptions du monde divergentes

Le libertinage de Dom Juan

Dom Juan est présenté indiscutablement comme un tenant

du libertinage. Sganarelle le souligne d'ailleurs sans ambiguïté

à la scène 2 de l'acte 1 : « [...) j'ai toujours ouï dire

[. .. ] que les libertins ne font jamais une bonne fin«. Il va donc,

non sans schématisme, voire déformation caricaturale, exposer

les arguments de ce courant de pensée.

Le libertinage scientifique : le matérialisme

Tout ramener à la matière, c'est là le fondement même de

la démarche libertine. Il est remarquable de constater que

cet élément essentiel n'apparaît que sous forme de traces

chez Dom Juan. En fait, une seule affirmation se réclame

de ce postulat primordial : c'est le fameux «Je crois que

deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre

sont huit« de la scène 1 de l'acte Ill. Encore convient-il d'être

prudent : plus que d'une profession de foi matérialiste, il

s'agit d'un ralliement exclusif aux vérités mathématiques,

c'est-à-dire aux résultats de démonstrations rigoureuses et

abstraites; et, exprimée ainsi sous forme de boutade, la

déclaration perd beaucoup de sa signification.

Cette intervention mise à part, seules certaines conduites

de Dom Juan peuvent, et encore de façon indirecte,

157

témoigner de son matérialisme : c'est le refus du surnaturel

qui l'amène à voir dans le commandeur simplement un

ennemi mort : «Et pourquoi craindre? Ne l'ai-je pas bien

tué?« (acte 1, scène 2), qui le conduit à nier tout d'abord

la réalité de l'apparition : «Viens, maraud, viens, je te veux

bien faire toucher au doigt ta poltronnerie« (acte Ill, scène 5).

à en rechercher ensuite des explications matérielles : «c'est

une bagatelle, et nous pouvons avoir été trompés par un

faux jour, ou surpris de quelque vapeur qui nous ait troublé

la vue« (acte IV, scène 1) et «Qui ose tenir ces paroles? Je

crois reconnaître cette voix« (acte V, scène 5). à la combattre

enfin avec des moyens physiques : «Non. non, rien n'est

capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver

avec mon épée si c'est un corps ou un esprit« (acte V.

scène 5). C'est le recours à la logique de la nature qui lui

fait souhaiter la mort de son père : « Il faudrait que chacun

ait son tour, et ï enrage de voir les pères qui vivent autant

que leurs fils« (acte IV, scène 5) ou qui l'aide à justifier la

nécessité du changement en amour. C'est la certitude de

l'inanité des éléments subjectifs qui explique en partie la

froideur de ses calculs, le refus des valeurs morales, et le

recours aux procédés les plus contestables.

Le libertinage religieux: l'athéisme

La conséquence directe du matérialisme, c'est le refus de

Dieu. Tout est matière, l'esprit n'existe pas. Tout se ramenant

à un déterminisme, il est possible de tout expliquer en faisant

l'économie du facteur divin. Ce thème est beaucoup plus

largement sollicité tout au long de la pièce, peut-être

parce qu'il est plus spectaculaire et que, mettant en oeuvre

des éléments plus proches des préoccupations de l'époque, il

permettait des développements plus frappants. Toujours

est-il que le problème est abordé en paroles ou en actions

dans 18 scènes sur les 27 1 que compte l'oeuvre.

• Un refus apparent de Dieu. En première analyse, l'athéisme de

Dom Juan semble évident : il refuse toute croyance qui ne

peut être contrôlée de manière précise; il nie tout ce qui fait

1. Ou 20 scènes sur 38.

158

appel à l'imagination, c'est-à-dire qui relève des apparences;

il repousse donc les superstitions, ne croit pas en lexistence

du «loup-garou« (acte 1, scène 1) ni en la possibilité des

apparitions (acte 111, scène 5; acte IV, scènes 1, 7 et 8;

acte V, scènes 4 et 5); il s'oppose fermement à toutes les

idées reçues de la religion, refusant en vrac ciel, enfer,

diable et vie éternelle, comme nous l'apprend son valet à

la scène 1 de l'acte 1 : « [. .. ] un chien, un diable, un turc, un

hérétique, qui ne croit ni Ciel, ni Enfer [...] «, et comme il le

confirme lui-même en répondant évasivement au véritable

interrogatoire auquel le soumet Sganarelle à la scène 1

de l'acte Ill.

·Il n'accepte de tenir compte que des faits objectifs;

il tire argument de la misère du pauvre, pour nier Dieu,

considérant que, s'il existait, il devrait logiquement récompenser

un serviteur aussi zélé : «un homme qui prie le

Ciel tout le jour, ne peut manquer d'être bien dans ses

affaires« (acte 111, scène 2); ou demande, pour être convaincu,

des preuves certaines : «Si le Ciel me donne un avis,

il faut qu'il parle un peu plus clairement s'il veut que je

lentende « (acte V, scène 4).

Il étend ce refus de ladhésion à d'autres domaines, et

récuse la médecine qui procède comme la religion, en

s'attribuant les mérites de phénomènes lui échappant en fait

totalement : « Et pourquoi non?«, explique-t-il à Sganarelle

déguisé en médecin qui s'étonne de l'engouement que lui

vaut son accoutrement, « Par quelle raison n'aurais-tu pas

les mêmes privilèges qu'ont tous les autres médecins? Ils

n'ont pas plus de part que toi aux guérisons des malades,

et tout leur art est pure grimace. Ils ne font rien que recevoir

la gloire des heureux succès, et tu peux profiter comme eux

du bonheur du malade[ ... ]« (acte Ill, scène 1 ).

• Une habile utilisation de la religion. Mais Dom Juan, en homme

pratique, constate que les apparences ont souvent une

grande force, et qu'il est commode, pour sa tranquillité, d'en

couvrir la réalité des faits. Émule de Tartuffe, il voit en la

religion un moyen pour être en paix avec la société, un

prétexte pratique pour justifier les actions les plus injustifiables.

juan

« témoigner de son matérialisme : c'est le refus du surnaturel qui l'amène à voir dans le commandeur simplement un ennemi mort : «Et pourquoi craindre? Ne l'ai-je pas bien tué?» (acte 1, scène 2), qui le conduit à nier tout d'abord la réalité de l'apparition : «Viens, maraud, viens, je te veux bien faire toucher au doigt ta poltronnerie» (acte Ill, scène 5).

à en rechercher ensuite des explications matérielles : «c'est une bagatelle, et nous pouvons avoir été trompés par un faux jour, ou surpris de quelque vapeur qui nous ait troublé la vue» (acte IV, scène 1) et «Qui ose tenir ces paroles? Je crois reconnaître cette voix» (acte V, scène 5).

à la combat­ tre enfin avec des moyens physiques : «Non.

non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit» (acte V.

scène 5).

C'est le recours à la logique de la nature qui lui fait souhaiter la mort de son père : « Il faudrait que chacun ait son tour, et ï enrage de voir les pères qui vivent autant que leurs fils» (acte IV, scène 5) ou qui l'aide à justifier la nécessité du changement en amour.

C'est la certitude de l'inanité des éléments subjectifs qui explique en partie la froideur de ses calculs, le refus des valeurs morales, et le recours aux procédés les plus contestables.

Le libertinage religieux: l'athéisme La conséquence directe du matérialisme, c'est le refus de Dieu.

Tout est matière, l'esprit n'existe pas.

Tout se ramenant à un déterminisme, il est possible de tout expliquer en faisant l'économie du facteur divin.

Ce thème est beaucoup plus largement sollicité tout au long de la pièce, peut-être parce qu'il est plus spectaculaire et que, mettant en œuvre des éléments plus proches des préoccupations de l'époque, il permettait des développements plus frappants.

Toujours est-il que le problème est abordé en paroles ou en actions dans 18 scènes sur les 27 1 que compte l'œuvre.

• Un refus apparent de Dieu.

En première analyse, l'athéisme de Dom Juan semble évident : il refuse toute croyance qui ne peut être contrôlée de manière précise; il nie tout ce qui fait 1.

Ou 20 scènes sur 38.

158. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles