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Vous ferez de ce texte de Malraux, extrait de l'Espoir, un commentaire composé, en insistant sur les différents thèmes mis en œuvre par l'auteur.

Publié le 22/02/2011

Extrait du document

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(Pendant la guerre civile espagnole, en 1937, un avion a été abattu. Les membres de l'équipage sont descendus dans la vallée parles paysans; l'un est mort, les autres blessés).  A mesure que la gorge approchait de Linares, le chemin devenait plus large ; les paysans marchaient autour des civières. Les femmes noires, fichu sur la tête et panier au bras, s'affairaient toujours dans le même sens autour des blessés, de droite à gauche. Les hommes, eux, suivaient les civières sana jamais les dépasser ; ils avançaient de front, très droits comme tous ceux qui viennent de porter un fardeau sur l'épaule. A chaque relais, les nouveaux porteurs abandonnaient leur marche rigide pour le geste prudent et affectueux par lequel ils prenaient les brancards, et repartaient avec le han ! du travail quotidien, comme s'ils eussent voulu cacher aussitôt ce que leur geste venait de montrer de leur cœur. Obsédés par les pierres du sentier, ne pensant qu'à ne pas secouer les civières, ils avançaient au pas, d'un pas ordonné et ralenti à chaque rampe ; et ce rythme accordé à la douleur sur un si long chemin semblait emplir cette gorge immense où criaient là-haut les derniers oiseaux, comme l'eût empli le battement solennel des tambours d'une marche funèbre. Mais ce n'était pas la mort qui, en ce moment, s'accordait aux montagnes : c'était la volonté des hommes. André Malraux, L'Espoir.

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« La dernière phrase donne une impression différente : celle de la volonté.

Le mouvement de foule, dans sa marchefunèbre, manifeste cet effort pour dépasser la fatalité tragique. André Malraux a participé aux grandes luttes du XXe siècle.

L'expérience chinoise lui inspire La condition humaine.

Ilparticipe, aux côtés des républicains, à la guerre civile espagnole.

Il combat dans les brigades internationales.L'Espoir relate ces moments historiques.

Dans ce passage, rendu plus célèbre encore par les images du film, l'auteurdécrit la lente procession des villageois qui accompagnent les aviateurs blessés.

La simplicité de la foule paysanneaccède à une solennité grandiose.

Il sera intéressant d'étudier comment l'extrait témoigne d'une techniquedescriptive et narrative élaborée puis accède, grâce au thème de la fraternité, à la majesté de l'épopée.L'ensemble du texte se présente avec une grande sobriété : une phrase suffît à décrire le lieu de l'action.

La plusgrande partie du passage s'attache à décrire la foule : les femmes «s'affairaient».

Les hommes accompagnent leconvoi et portent les brancards.

Quant aux blessés, objets de toute cette sollicitude, ils ne sont qu'évoqués.

Ladernière phrase donne la tonalité générale.L'impression qui domine à la lecture de la page est celle du mouvement.

La brève description du cadre suggère lamobilité : «à mesure que la gorge approchait de Linares, le chemin devenait plus large».

Plus nettement encore c'estla marche qui domine ici.

Les verbes de mouvement sont nombreux : «marchaient, suivaient, repartaient,avançaient».

Les substantifs accentuent le fait : «le relais» ou «la marche rigide».

Il est facile de comprendrepourquoi une telle scène a pu donner des images si efficaces au cinéma.Il reste à déterminer le rythme de cette avancée.

Il pourrait être chaotique, désordonné, compte tenu du nombredes participants et des difficultés du terrain.

Il n'en est rien.

Ces paysans marchent «au pas», «d'un pas ordonné».Une lente procession se forme.

L'auteur la décrit comme «une marche funèbre» ponctuée par les cris des oiseauxcomme « le battement solennel des tambours».

Le souci de ne pas accroître la douleur des blessés, la gravité dumoment impliquent la lenteur.

Ainsi toute la page s'anime d'un mouvement, mais ce mouvement est celui du ralenti. ** * Derrière toute cette scène, un élément domine : la fraternité.

Les aviateurs ont combattu pour les républicains.

Lepeuple des humbles témoigne, en échange, de gestes humanitaires.

Certes le chemin, périlleux, nécessite un relaisentre les porteurs.

Mais il est tout à fait symbolique de voir les civières portées par tant de mains.

Les hommes sechargent des brancards avec «des gestes prudents et affectueux».

Leur préoccupation principale est de ne passecouer les blessés.

Il faut remarquer, en outre, que cette «tendresse» s'accompagne de respect : la population asoin de ne pas avancer plus vite que les blessés.La générosité déployée se manifeste simplement.

C'est bien normal pour cette population habituée à souffrir, às'endurcir et à ne pas toujours témoigner d'une tendresse trop évidente.

Ainsi, « les femmes noires, fichu sur la têteet panier au bras » retrouvent les gestes ancestraux d'attentions et de soins.

Rien d'ostentatoire dans cesmanifestations.

La pudeur tend à «cacher aussitôt ce que leur geste venait de montrer de leur cœur».

La scène sepasse d'ailleurs de paroles.

Là aussi dominent la sobriété et l'efficacité. ** * La simplicité de la scène accède pourtant à une grandeur épique : dans l'épopée, l'individu, en tant que tel, necompte pas.

Il représente une notion, une religion, une civilisation.

Dans ces lignes, aucun personnage particuliern'est mis en vedette.

Il est tout à fait caractéristique que les blessés ne soient pas longuement décrits.

L'héroïsmeest celui de tout un peuple.

La foule, anonyme et pauvre, participe à l'histoire.

Aucun geste ne ressort, aucuneparole.

Tous contribuent à l'effort collectif.Mais le désordre apparent du mouvement des femmes est compensé par le rite qu'elles établissent spontanément :elles s'affairent «toujours dans le même sens...

de droite à gauche».

Cet ordre populaire s'accorde au paysageaustère et grandiose, i La gorge immense » et ses habitants vivent alors en symbiose. La descente vers Linares fait penser à un chemin de croix.

La mort, la souffrance, la foule, la marche, tout est là.Pourtant le mouvement semble inversé : la route descend vers la vallée et surtout la foule est loin d'invectiver ceuxqui souffrent.

Dans leur calvaire, les blessés ne sont pas seuls, mais portés et aimés par toute une population.Enfin dans la dernière phrase, André Malraux écarte la dimension fatale de la mort.

La volonté se substitue à lasoumission devant l'irrémédiable : l'effort de la population pour vivre au sein d'une nature rude et aride rejointl'accord général qui s'établit autour des combattants. ** * La page permet donc plusieurs lectures.

La progression du tableau imprime un mouvement particulier, fait de lenteuret de solennité.

De la description se dégage une leçon de fraternité simple, efficace, sans gestes ni paroles inutiles.Par le roman, André Malraux remonte aux meilleures sources de l'épopée.

L'histoire de l'Espagne revit ici, avec ses. »

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