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Zola, critique d'art

Publié le 09/03/2014

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Le champ artistique proprement dit s’est constitué au xixe siècle, dans un double mouvement de refus des déterminations usuelles et de quête identitaire. Zola critique d’art fut un acteur important de cette mutation symbolique et sociale et, comme on pouvait l’attendre des hommes de lettres les plus prometteurs, il a mis son talent de journaliste et d’écrivain au service de peintres, réalistes et naturalistes, bientôt « impressionnistes «, qui, impliqués dans leurs recherches, acceptèrent avec reconnaissance les éloquents manifestes en faveur de la modernité. L’Œuvre, en 1886, ressuscite cette effervescence créatrice contrariée sous le Second Empire, mais témoigne aussi, avec le recul, des ambiguïtés de cette délégation discursive, des incompréhensions et des écarts entre les postures, celle de l’écrivain naturaliste et celle du peintre. Roman de l’échec, le quatorzième volume des Rougon-Macquart entérine la faillite de l’illusion artistique à travers le destin tragique de Claude Lantier, le grand peintre avorté, mais surtout victime expiatoire de l’élan vers l’absolu que chaque créateur doit apprendre à juguler, si l’on en croit les recommandations du romancier pédagogue. Le chapitre IX prépare le dénouement. Par un processus d’involution, le propos narratif se concentre sur le personnage de Claude, de plus en plus impliqué dans sa passion. Christine, qui incarne la vie, l’amour et le dévouement, tente d’inscrire sa présence dans l’acte créateur. Mais, tenue à l’écart, dépossédée, anéantie sous le poids d’un Art d’autant plus puissant qu’il est divinisé, elle incarne pour le lecteur un personnage expérimental, inscrit dans la fiction à la fois comme « sujet « et comme témoin. Il conviendra d’ailleurs dans un premier temps d’examiner les modalités de cette mise en scène actancielle par laquelle l’écrivain naturaliste gauchit les fonctions traditionnelles du personnage à des fins démonstratives. Mais le propos, qui mêle subtilement les points de vue dans un récit incertain et sans progression véritable, fait entendre une voix souveraine, qui s’attache à dire, pathétiquement, les tentations et les dangers d’une conception radicale de la représentation artistique. 7 Le personnage, en régime naturaliste, n’est pas doté d’une autonomie susceptible de ménager la surprise, l’hésitation, l’incertitude, la profondeur en un mot. Le refus de l’« homme métaphysique «[1]  « L’homme métaphysique est mort, tout notre terrain...[1], de la psychologie stendhalienne, est constant chez un Zola qui milite pour un matérialisme à la fois philosophique et littéraire. Pour exprimer la détresse de Christine, point n’est besoin d’en faire une héroïne en proie aux imaginations romantiques et à la rêverie impalpable, si caractéristiques de la manière des romanciers mondains, Jules Sandeau, Octave Feuillet, « qui tiennent de George Sand et de Lamartine, les doux, les élégants, les idéalistes et les moralistes «[2]  « Les Romanciers contemporains «, article paru dans...[2]. À la modalité assertive dominante dans le passage sont conjoints d’autres procédés stylistiques qui préviennent tout risque d’extrapolation. La régie du narrateur est constante, que ce soit par le recours à la focalisation zéro ou par le discours indirect libre, dont l’ambiguïté est préférable, sans doute, à l’introspection de la focalisation interne. Une fausse question comme « N’était-ce donc pas de l’amour, cela ? « convertit la « torture « et le sacrifice (physique) de la pose en preuve tangible mais connote aussi, dans la médiocrité énonciative du niveau de langue, la réaction somme toute ordinaire d’un personnage foncièrement prosaïque. Les réactions de Christine sont donc clairement et strictement contrôlées par le narrateur, qui choisit les dénominations les plus adaptées à son réalisme. Remarquons par exemple la distinction entre ce qui est et ce qui semble être. La confusion entre ces deux niveaux n’est jamais réalisée, à l’image de cette « muraille infranchissable « du « tableau immense « qui sépare l’artiste parti dans un autre monde et la femme toujours présente ici-bas. L’idée du « ménage à trois «, de la « maîtresse «, la « jalousie « envers une rivale restreint considérablement l’intelligence compassionnelle du personnage féminin ; son aptitude à partager l’aventure spirituelle de son mari est déniée. Comme la plupart des autres héroïnes zoliennes, Thérèse, Gervaise, Séverine…, elle produit des idées « simples «, elle écoute battre son sang et vibrer sa chair, son univers mental est peuplé de clichés, les issues vers l’infini sont bloquées. Si la puissance de sacrifice est ici connotée par le prénom, il faut noter tout de suite que la dimension religieuse du passage est dégradée en superstition. 8 Que ce soit le « tabernacle farouche « ou les « puissants dieux de colère «, les images de la religion renvoient à une conception archaïque, celle d’un Ancien Testament approximativement pensé comme collection de rituels primitifs et encombré de tabous. Zola a souvent mis en scène dans ses romans le scandale d’une religion qui accable l’homme et l&rsquo...

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« l'hésitation, l'incertitude, la profondeur en un mot.

Le refus de l'« homme métaphysique »[1]  « L'homme métaphysique est mort, tout notre terrain...[1], de la psychologie stendhalienne, est constant chez un Zola qui milite pour un matérialisme à la fois philosophique et littéraire.

Pour exprimer la détresse de Christine, point n'est besoin d'en faire une héroïne en proie aux imaginations romantiques et à la rêverie impalpable, si caractéristiques de la manière des romanciers mondains, Jules Sandeau, Octave Feuillet, « qui tiennent de George Sand et de Lamartine, les doux, les élégants, les idéalistes et les moralistes »[2]  « Les Romanciers contemporains », article paru dans...[2].

À la modalité assertive dominante dans le passage sont conjoints d'autres procédés stylistiques qui préviennent tout risque d'extrapolation.

La régie du narrateur est constante, que ce soit par le recours à la focalisation zéro ou par le discours indirect libre, dont l'ambiguïté est préférable, sans doute, à l'introspection de la focalisation interne.

Une fausse question comme « N'était-ce donc pas de l'amour, cela ? » convertit la « torture » et le sacrifice (physique) de la pose en preuve tangible mais connote aussi, dans la médiocrité énonciative du niveau de langue, la réaction somme toute ordinaire d'un personnage foncièrement prosaïque.

Les réactions de Christine sont donc clairement et strictement contrôlées par le narrateur, qui choisit les dénominations les plus adaptées à son réalisme.

Remarquons par exemple la distinction entre ce qui est et ce qui semble être.

La confusion entre ces deux niveaux n'est jamais réalisée, à l'image de cette « muraille infranchissable » du « tableau immense » qui sépare l'artiste parti dans un autre monde et la femme toujours présente ici-bas.

L'idée du « ménage à trois », de la « maîtresse », la « jalousie » envers une rivale restreint considérablement l'intelligence compassionnelle du personnage féminin ; son aptitude à partager l'aventure spirituelle de son mari est déniée.

Comme la plupart des autres héroïnes zoliennes, Thérèse, Gervaise, Séverine..., elle produit des idées « simples », elle écoute battre son sang et vibrer sa chair, son univers mental est peuplé de clichés, les issues vers l'infini sont bloquées.

Si la puissance de sacrifice est ici connotée par le prénom, il faut noter tout de suite que la dimension religieuse du passage est dégradée en superstition. 8 Que ce soit le « tabernacle farouche » ou les « puissants dieux de colère », les images de la religion renvoient à une conception archaïque, celle d'un Ancien Testament approximativement pensé comme collection de rituels. »

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