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Le bonheur est-il dans la suppression ou dans la modération des désirs ?

Publié le 27/01/2004

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Tant de choses peuvent arriver...En revanche, il est une chose qui ne dépend que de moi, sur laquelle j'ai un pouvoir absolu : c'est ma volonté. Moi seul décide de ce que je veux. Par exemple, si je ne veux pas aller à un endroit, on peut m'y contraindre par la force, mais on n'aura pas pu changer ma volonté. Je découvre, par cette réflexion, que je possède, comme chaque homme, une volonté absolument libre, ou encore un libre-arbitre, comme disent les philosophes. Je dispose donc d'un domaine de pouvoir et de liberté, qui est tout intérieur à moi-même. Le secret du bonheur. A partir de ce constat, je peux raisonner de la façon suivante :_ certes, je n'ai pas le pouvoir de faire tout ce que je veux ;- mais je peux choisir librement ce que je veux ;- donc, je peux ne vouloir faire que ce que je peux faire, ou ce que je suis en train de faire (je peux limiter ma volonté à mon pouvoir) ;- dès lors, je fais exactement ce que je veux ;- donc, selon la définition, je suis libre, pleinement. La liberté intérieure de ma volonté assure, si j'en use bien, la liberté extérieure de tout mon être.Je peux raisonner de même au sujet de ce que je possède :- je n'ai, apparemment, pas tout ce que je veux, et j'en suis malheureux ;- mais je peux ne vouloir que ce que j'ai ;- dès lors, j'ai tout ce que je veux ;- donc je suis heureux.

« L'exaltation de la volonté et l'erreur des Orientaux. Nous constatons aussi que ce n'est pas une extinction de la volonté individuelle qui mène au bonheur, commele pensent les bouddhistes, mais au contraire une apothéose de la volonté.

Il nous faut avoir une grande forcede volonté pour ne vouloir que ce qui convient.

Il ne faut pas tuer la volonté individuelle, comme un principede mal et de souffrance, il faut au contraire l'exalter, la renforcer, pour se dominer parfaitement.

La maîtrisede soi ne passe pas par une extinction de soi, un renoncement à être, mais par une exaltation de sa forcemorale personnelle.

L'erreur des orientaux est de confondre deux choses différentes, le désir et la volonté.Plus exactement, ils ne discernent pas, dans ce qu'ils appréhendent comme désirs irrationnels, l'entité originalequ'est la volonté raisonnable.

Ils ne perçoivent donc pas ce qui fait la vraie identité et la vraie grandeur del'homme.

Ils le ravalent au rang d'un pur être de désir : l'animal.

C'est pourquoi ils ne voient pas d'objection àsupposer qu'une même âme puisse s'incarner indifféremment dans un corps d'homme ou d'animal, au gré desmétempsycoses.

Les penseurs grecs, et parmi eux les stoïciens, ont identifié clairement le principe del'humanité de l'homme : la possession d'une volonté raisonnable et libre. La maîtrise de la pensée. Dès lors mon bonheur dépend uniquement de la pente que je donnerai à ma volonté et à mes idées, à mesreprésentations des choses, qui sont essentiellement au pouvoir de ma volonté.

C'est ce que nous ditEpictète : « Souviens-toi que ce qui te cause du tort, ce n'est pas qu'on t'insulte ou qu'on te frappe, maisl'opinion que tu as qu'on te fait du tort.

Donc, si quelqu'un t'a mis en colère, sache que c'est ton proprejugement le responsable de ta colère.

Essaye de ne pas céder à la violence de l'imagination: car, une fois quetu auras examiné la chose, tu seras plus facilement maître de toi.

»En effet, si je suis vexé de l'insulte qu'un individu m'adresse, c'est que j'accorde une certaine valeur à sonestime.

Mais si je pense que ce n'est qu'un imbécile, ses propos ne m'atteignent plus.

De même, s'il m'arriveun accident et que j'en reste handicapé, si en outre je me pense victime d'un sort injuste et que je désireéchapper à cet état, j'en souffrirai.

Mais si j'accepte mon état et ne désire rien d'autre, je ne serai pasmalheureux.

Cette maîtrise de ma volonté, de mes pensées, de mes désirs est une règle de vie fondamentaleà laquelle Epictète nous exhorte : « Si quelqu'un livrait ton corps au premier venu, tu en serais indigné ; maisde livrer toi-même ton âùe au premier qui t'insulte en le laissant la troubler et la bouleverser, tu n'en as pashonte ? » (Pensée 28). Aimer son destin. Néanmoins, comment parvenir à maîtriser complètement mes désirs ? Ma volonté est-elle toujours assezpuissante ? Là encore, une juste vision des choses, cad une bonne connaissance métaphysique du réel, peutnous aider.

Les stoïciens affirment que tout ce qui arrive est nécessaire.

Rien ne pouvait arriver autrement.

Eneffet, chaque événement est le fruit d'une longue série de causes.

Et la relation de la cause à l'effet estnécessaire : un autre effet ne peut pas naître d'une même cause, ou d'un même ensemble de causes.

Il nesert donc à rien de désirer autre chose que ce qui advient ou de se révolter contre ce qui est, car tout estnécessaire.

On ne ferait que se rendre inutilement malheureux.

Cette conception métaphysique juste de lanécessité qui règne dans toutes les choses du monde contribue à annuler mes désirs.

Tel est le principe :admettre ce qui nous arrive comme inéluctable, pour ne plus s'en affliger.

Mais pour les stoïciens, les hommessont comme des enfants ou des fous puisqu'ils désirent sans cesse autre chose que ce qui est et se rendentpar eux-mêmes malheureux : « Il ne faut pas demander que les événements arrivent comme tu le veux, mais ilfaut les vouloir comme ils arrivent ; ainsi ta vie sera heureuse » (pensée 8).C'est l'amour du destin, l' « amor fati » auquel il faut parvenir pour être sage. La providence. Les stoïciens allaient même encore plus loin dans cette réflexion sur l'ordre des choses.

Ils ne s'en tinrent pasà cette simple conception de la nécessité absolue du rapport de cause à effet, idée qu'ont partagée tous lessavants qui ont fondé la science moderne.

Cela ne serait qu'une nécessité aveugle.

Mais les stoïcienspensaient que la Nature est un être divin et intelligent, qui ne fait rien en vain.

Tout est fait pour quelquechose, tout a un but, tout est finalisé.

Le but ultime que poursuit la nature, c'est évidemment le Bien.

Ledestin qui règne dans le monde est donc bon, il est une Providence.

Mais ce Bien, c'est la vie et le Bien duTout, de la nature elle-même, non de chaque créature qui la compose.

Chaque homme n'est qu'un rouage dugrand mécanisme universel, et c'est par une folle présomption que chacun s'imagine être le centre du mondeet voudrait que tout conspire à son bonheur.

En revanche, cette idée que le monde est dirigé par laProvidence, que chaque événement concourt à un Bien pour le Tout, même si la petite partie que noussommes ne l'aperçoit pas, cette idée est beaucoup plus puissante que celle de la simple nécessité pourincliner notre volonté à vouloir ce qui advient.

Telle est précisément l'attitude du sage qui peut ainsi goûter lebonheur.

Dès lors , chaque homme doit se persuader que la Providence lui a assigné un rôle à jouer sur laterre.

Il ne doit pas désirer changer de rôle ou de condition, mais il doit s'efforcer de jouer correctement sonrôle ; « Souviens-toi que tu joues dans une pièce qu'a choisie le metteur en scène: courte, s'il l'a vouluecourte, longue, s'il l'a voulue longue.

S'il te fait jouer le rôle d'un mendiant, joue-le de ton mieux; et fais demême, que tu joues un boiteux, un homme d'Etat ou un simple particulier.

Le choix du rôle est l'affaire d'unautre.

» (Pensée 17).. »

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