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Une connaissance métaphysique est-elle possible ?

Publié le 16/01/2004

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C'est l'expérience sensible qui est mensongère, qui constitue un monde d'apparences trompeuses que la raison doit dépasser pour découvrir l'Être, tel qu'il est en soi. Leur métaphysique est une ontologie, une connaissance de l'Être.Le mythe de la caverne, chez Platon, symbolise la conversion de l'âme à la métaphysique. Les hommes sont d'abord semblables à des prisonniers, enchaînés dans une caverne, le dos tourné vers l'ouverture, les yeux fixés sur la paroi. Ils ne voient rien de ce qui se passe au dehors, ils ont pour tout spectacle les ombres mouvantes sur la muraille, qu'ils prennent pour des choses réelles. Mais supposons qu'un de ces prisonniers soit brusquement arraché à la caverne et transporté à l'extérieur, en pleine lumière. D'abord ébloui, il s'accoutume petit à petit au monde ensoleillé qui symbolise les idées éternelles, patrie du philosophe... Avant de tomber dans la prison du corps l'esprit pouvait contempler les Idées sans effort : après la chute, les Idées lumineuses, antérieures à notre expérience terrestre, demeurent intérieures à notre esprit comme un souvenir nostalgique et un peu confus, mais que nous sommes capables d'évoquer grâce à l'initiation philosophique, au progrès dialectique qui arrache « l'oeil de l'âme » au bourbier des sens.Socrate invitait ses disciples à définir la vertu, le courage, la science, c'est-à-dire à chercher des concepts abstraits et généraux. Pour Platon ces concepts de notre esprit ne sont que le reflet d'Idées éternelles existant en soi.

« Au lieu de chercher à découvrir des causes dans l'Univers, il invente une cause de l'Univers. Si chez Kant l'espace et le temps, cadres subjectifs de toute perception,nous masquent à jamais le fond des choses, d'après Marx c'est encore latemporalité, le devenir qui ruine toute possibilité de métaphysique.

En effetalors que les systèmes métaphysiques prétendent exprimer des réalitéséternelles, ils ne reflètent à leur insu, et d'une manière déguisée, que lesconditions de la vie économique et de la lutte des classes à leur époque.

Parexemple la distinction de l'Idée et du sensible chez Platon exprimeraitseulement la division de la société antique en hommes libres, voués au loisircontemplatif, et en esclaves assujettis à la matière.

A la métaphysique desvérités soi-disant éternelles, Marx entend substituer sous le nom dedialectique une science de l'histoire.De même Comte condamne les abstractions de la métaphysique, disciplinepurement verbale ; pour lui la science positive se contente d'établir lesrelations constantes entre les phénomènes qui se suivent dans l'expérience,sans spéculer sur les « causes » premières, ni disserter sur le mystère del'univers.

Cependant ces attaques contre la métaphysique ne peuvent venir à bout —Kant le savait déjà — de l'inquiétude métaphysique chez l'homme.

Lescritiques kantiennes n'ont pas empêché le développement des métaphysiquespost-kantiennes ; les systèmes de Fichte, de Schelling, de Hegel en sont la preuve.

Les critiques marxistes ou positivistes n'ont pas davantage mis fin à la métaphysique.

Le XXe siècle avecBergson, Heidegger, Sartre a lui aussi connu l'essor des doctrines métaphysiques.

Si la diversité des systèmessouligne l'incertitude de la connaissance métaphysique, leur persistance au cours de l'histoire témoigne de la vitalitédes préoccupations métaphysiques.Il est vrai que la science s'est imposée dans son domaine : elle exprime ses propositions dans une langue précise quiest de plus en plus la langue des mathématiques ; elle les vérifie par des méthodes sans cesse plus rigoureuses ; iln'en est pas moins vrai que la science est incapable non seulement de résoudre mais bien de poser les grandesquestions métaphysiques sur lesquelles l'homme ne cesse de s'interroger.

Car la science, disait très justementNietzsche, n'est qu'un « essai de créer pour tous les phénomènes un langage chiffré commun qui permette decalculer, donc de dominer plus aisément la nature ».

Au-delà des prises de la science, la métaphysique demeurecomme discipline réflexive capable d'éveiller notre conscience aux questions fondamentales ; d'abord la question dusujet pensant que la science ignore car pour elle l'homme lui-même est un objet, soumis au déterminisme, explicablepar ce qui l'entoure ; mais le point de vue scientifique est ici radicalement insuffisant, car alors même que jeconsidère comme objet mon corps, mon caractère, mes idées, mes sentiments, il y a quelque chose qui échappe àl'objet, à savoir la pensée que j'ai de l'objet au moment même où j'en parle ; il n'y a d'objet que pour un sujet et lesujet pensant n'est pas lui-même objectivable puisqu'il est ce devant quoi il y a des objets.

Le sujet pensant estdonc typiquement, dans le langage de Gabriel Marcel, un « mystère » métaphysique et non un problème scientifique.Le sujet est ce que je « suis » et que je ne peux donc pas « avoir » devant moi, séparé de moi, comme une chosequ'il me suffirait d'explorer patiemment (ob-jet est l'équivalent latin du grec problème, ce qui est « jeté devant »,étalé dans la dimension de l'extériorité).

On pourrait montrer de même que la science ne peut porter que desjugements de réalité, que les jugements de valeur lui échappent.

Enfin la science ne saurait poser la question del'Être en général.

La science en découvrant les lois de la nature explique si l'on veut pourquoi telle chose s'estproduite plutôt que telle autre, mais elle ne pourra jamais rendre compte de la question essentielle, tellementimpliquée dans toute question qu'il nous arrive aisément de l'oublier : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt querien ? » Sans doute à de telles questions la philosophie n'apporte pas de solution.

Du moins les réponses qu'ellepropose — et qui changent dans chaque système — sont-elles beaucoup moins intéressantes que la façon de poserles questions.

Car il faut bien comprendre que l'existence même de la métaphysique apporte un démenti à cette idéede Marx selon laquelle l'humanité ne se poserait que « les problèmes qu'elle peut résoudre ».

Ceci est vrai peut-êtrepour des problèmes techniques et scientifiques qui se résolvent par des démarches opératoires et qui ne se posenten général clairement que lorsque les conditions conceptuelles et techniques de ces démarches sont réalisées.

Maisla philosophie, discipline paradoxale, parcourt à l'envers les chemins du savoir ; au lieu d'aller de la question à laréponse, la métaphysique va de la réponse à la question et transforme en questions nouvelles toutes les réponses.Ainsi, il n'est pas de connaissance métaphysique, mais une interrogation métaphysique qui depuis Socrate ne cessede hanter la conscience inquiète des hommes.. »

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