Devoir de Philosophie

Les historiens ne se bornent-ils pas à raconter des histoires ?

Publié le 20/10/2012

Extrait du document

 

            L’historien n’est-il pas un romancier qui s’ignore ? Si l’histoire est la connaissance du passé humain et si le passé est dépassé, n’est-ce pas dire que tout historien est condamné à inventer le passé humain ? L’histoire comme science n’est-elle pas un roman vrai, une fable authentique ? Il est vrai que le mot ‘histoire’ est polysémique. Il signifie, en son sens grec historia, enquête, recherche ; puis récit ; enfin histoire. Comment l’historien peut-il, par son étude de l’histoire-réalité, rattraper ce qui a vraiment eu lieu dans le passé ? Comment dire la réalité passée qui n’est plus autrement que par le recours à la fiction ? Ces questions pour surprenantes soient-elles reçoivent leur légitimité lorsque l’on cherche à dissocier le récit historique du roman historique. En effet, comment dissocier un manuel d’histoire d’un roman historique relatant les mêmes faits ? L’histoire est-elle un pur roman ou un savoir indispensable accédant à la scientificité des sciences humaines ? Il est donc nécessaire de questionner les conditions de possibilité pour l’histoire de se présenter comme science. L’enjeu philosophique ne porte pas seulement sur le travail effectif des historiens, il engage l’être de l’homme comme être historique, c’est-à-dire implique une redéfinition de l’homme en son humanité. 

« données brutes : ils sont construits par l’historien.

Ceci dit, comment s’élabore la méthode supposée scientifique de l’historien ? Sous peine de verser dans élucubration imaginair e, l’historien professionnel, pour accéder à une connaissance vraie des faits, travaille sur tous les matériaux à sa portée : textes qui sont d’ailleurs déjà eux -mêmes historiques, interprétations subjectives, objets, monuments, etc.

Il use alors d’une ‘mé thode critique’, pour reprendre l’expression de Langlois et de Seignobos, in Introduction aux études historiques.

Celle-ci est d’abord ‘externe’ portant sur l’intégrité et l’authenticité des documents ; l’historien s’assure qu’il n’est pas en présence d’un faux, d’une contrefaçon ou d’une interpolation.

Cette critique ‘externe’ se complète par une critique ‘interne’ qui vise à sonder la sincérité des documents, à mesurer la concordance entre les diverses sources, de tester la vraisemblance des témoignages, etc.

Cette méthodologique pour vérace est-elle n’en demeure pas moins fondée sur des partis pris et des postulats qui affectent gravement la nature et l’extension des champs d’études.

Certes, l’historien ne se borne pas à raconter des histoires, comme s’il les trouvait toutes faites dans l’histoire.

Il faut ici démonter une vue naïve qui s’imaginerait qu’il y aurait d’abord l’Histoire, c’est- à-dire une série réelle d’événements, et que l’histoire comme connaissance établirait une représentation de l’Histoir e.

De vrai, c’est plutôt l’inverse qui répond au travail historique : c’est en écrivant l’histoire que l’historien construit la réalité historique.

N’est -ce pas dire que l’histoire est une pure fiction ? Si une double distance sépare l’historien de l’histo ire, celle des faits réels aux sources relatives aux faits, celle des sources à la construction de l’histoire, ne faut -il pas conclure que l’histoire n’est qu’une manière de nous raconter des histoires ? Une berceuse pour justifier un certain passé (Inquisition, colonisation, etc.) ! Une fois de plus la différence apparaît mince entre le récit historique et le roman historique.

Lorsque le romancier M.

Tournier décrit, dans Gilles et Jeanne, la rencontre ‘possible’ entre Gilles de Rée et Jeanne d’Arc en comp létant par une vue fictive les faits proprement historiques, comment sans le savoir le lecteur pourrait -il dissocier la part imaginaire de la part réelle ? Que l’on lise Les Sorcières de Michelet.

En raison de la minutie des détails, de sa manière de décri re, tout se passe comme si notre historien avait vraiment vécu les faits.

Si l’histoire n’est pas ‘ la résurrection intégrale du passé ’ (Michelet), elle n’est pas davantage une pure mythologie.

Incontestablement, une dimension fictionnelle s’insinue dans tout travail historique, ce qui ne signifie pas que la connaissance historique soit pure imagination.

Mais alors quelles conceptions de l’histoire guident le travail de l’historien ? Si l’historien n’invente pas la réalité qu’il raconte, comment peut -il dé gager une synthèse historique ? Comment l’historien, somme toute, travaille -t- il ? Pour que l’œuvre de l’historien ne soit pas simple fiction créée par la subjectivité de l’historien, il faut soumettre le choix, les hypothèses, les orientations de l’histoire à l’épreuve des faits.

L’historien ne se contente pas de raconter, car il doit toujours vérifier ce qu’il avance.

Se lève une circularité par laquelle l’histoire se soustrait au mythe : l’historien élabore les faits, mais en retour les faits sanctionnent cette élaboration.

Sans cette réciprocité, on substitue à l’histoire des histoires qu’on se raconte.

L’histoire n’est plus pure épopée romanesque Ce va -et -vient permanent est la matière même du travail de l’historien.

L’historien s’oriente selon différentes approches pour lesquelles ‘raconter des histoires’ n’est qu’une manière de faire de l’histoire.

Si le travail de l’historien se plie à la vérification, il est conduit par l’idée qu’il se forge de ce qu’il cherche dans l’histoire.

Or, cette approche n’est pas unique.

Il existe une multiplicité de faire de l’histoire, les manières d’écrire l’histoire ont elles - mêmes une histoire ! Et ‘raconter des histoires’ n’est pas la plus judicieuse et pertinente.

Faut -il privilégier l’histoire dite ‘événementielle’ au détriment de l’histoire ‘structurale’ ? Par exemple,. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles