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La liberté d'expression peut-elle être sans limites ?

Publié le 29/08/2004

Extrait du document

-          Cependant,  la liberté d'expression peut provoquer des crimes qui n'auraient peut-être pas eu lieu sans elle. Il apparaît ainsi dangereux qu'une société tolère qu'on diffuse des appels au meurtre dans ses journaux. On peut ainsi très bien imaginer que les paroles influent sur l'esprit et qu'elles poussent les esprits faibles dans certaines directions :  Socrate n'a-t-il pas été condamné à mort pour « corruption de la jeunesse « ? -          Considérer également que les paroles ne font pas de mal, c'est s'aveugler au sujet de ce qu'un mal peut être : il n'y a pas que le mal physique qui constitue un crime, mais également le mal moral. Que la calomnie puisse être relayée par la presse est ainsi problématique. -          Ce faisant, la liberté d'expression pose problème, car elle existe principalement pour contrer l'arbitraire du pouvoir, or, si on choisit de la limiter, ce sera nécessairement le pouvoir qui la limitera. Aussi il semble difficile d'encourager une telle limitation, car ce serait comme rendre le plein pouvoir à la puissance en place. -          Il apparaît donc qu'il n'y a que deux alternatives : soit tolérer une liberté d'expression absolue, soit renoncer à la liberté d'expression. -          Le problème consistera donc plutôt à évaluer les bénéfices et les désavantages que l'on peut tirer de l'une ou l'autre proposition, et de choisir laquelle des deux est la meilleure.   Problématisation : La liberté d'expression semble bien inoffensive.

 

Analyse du sujet :

 

-          Il semble de prime abord qu’il n’y ait aucune raison de poser des limites à la liberté d’expression, car parler ne cause aucun tort. La liberté d’expression véhicule des idées et des paroles mais ne commet pas de crimes.

-          Cependant,  la liberté d’expression peut provoquer des crimes qui n’auraient peut-être pas eu lieu sans elle. Il apparaît ainsi dangereux qu’une société tolère qu’on diffuse des appels au meurtre dans ses journaux. On peut ainsi très bien imaginer que les paroles influent sur l’esprit et qu’elles poussent les esprits faibles dans certaines directions : Socrate n’a-t-il pas été condamné à mort pour « corruption de la jeunesse « ?

-          Considérer également que les paroles ne font pas de mal, c’est s’aveugler au sujet de ce qu’un mal peut être : il n’y a pas que le mal physique qui constitue un crime, mais également le mal moral. Que la calomnie puisse être relayée par la presse est ainsi problématique.

-          Ce faisant, la liberté d’expression pose problème, car elle existe principalement pour contrer l’arbitraire du pouvoir, or, si on choisit de la limiter, ce sera nécessairement le pouvoir qui la limitera. Aussi il semble difficile d’encourager une telle limitation, car ce serait comme rendre le plein pouvoir à la puissance en place.

-          Il apparaît donc qu’il n’y a que deux alternatives : soit tolérer une liberté d’expression absolue, soit renoncer à la liberté d’expression.

-          Le problème consistera donc plutôt à évaluer les bénéfices et les désavantages que l’on peut tirer de l’une ou l’autre proposition, et de choisir laquelle des deux est la meilleure.

 

Problématisation :

La liberté d’expression semble bien inoffensive. Toutefois, croire cela c’est peut-être oublier que l’expression est à la source de toutes les actions des hommes, et que mis à part dans le cas de la folie, les crimes commencent toujours par des pensées, sinon par des « idées tordues «. Ne faudrait-il donc pas empêcher que de telles idées germent dans les esprits fragiles ? Toutefois, peut-il exister une liberté d’expression limitée ? Comment garder le contrôle sur les censeurs s’il n’est pas possible de parler d’eux ? Les maux engendrés par la liberté d’expression sont-ils si grands que l’on doive se priver des bienfaits de cette liberté ?

 

« - Platon est un philosophe qui nous présente de bonnes raisons de limiter la liberté d'expression.

Il expose ces raisons dans ses Lois , une de ses oeuvres tardives. - Il part de l'hypothèse selon laquelle ce qui doit toujours dominer dans un individu, c'est la raison.

Celle-ci est comme un fil d'or dans l'âme des êtres humains qui ne seraient que desmarionnettes pour les dieux.

Platon décrit cette métaphore ainsi : « [les] passions sont en nouscomme des nerfs et des fils qui, se mouvant en sens opposé les uns aux autres, nous tirent etnous retirent vers des actions opposées ; et c'est là que se trouve la démarcation entre la vertuet le vice.

Car la raison nous dit qu'il ne faut jamais suivre qu'un de ces fils, sans l'abandonner enaucune occasion, et résister aux autres.

Et ce fil n'est autre que le fil d'or et sacré de la raison,appelé la loi commune de l'État.

Les autres fils sont de fer et raides ; celui-là est souple, parcequ'il est d'or, tandis que les autres sont de toute sorte d'espèces.

» (Platon, Lois , 645a) - Nous voyons donc par cela que non seulement le plus sacré dans un individu, c'est la raison, mais qui plus est, nous constatons également que pour que cette raison prévale, il faut que l'Étaty concourre. - Les lois qui régulent la cité ont donc pour but de forger également les individus qui la composent, et c'est pourquoi elles doivent donner des prescriptions très précises sur ce quel'individu doit et ne doit pas faire.

Les lois doivent renforcer le fil d'or présent en chaque êtrehumain car l'État a un rôle d'éducateur à l'égard du peuple et il doit se comporter comme un pèreavec ses enfants. - C'est pourquoi les lois doivent interdire certaines formes d'expression, car celles-ci pourraient dégrader la raison des individus.

Or, détruire la raison chez un homme, c'est détruire chez lui toutepossibilité de connaître la vraie liberté. - Platon donne à ce sujet l'exemple de la musique et de la danse.

Dans le second livre des lois , il expose sa thèse selon laquelle c'est dans les choeurs de danse et les chants institués àl'occasion des fêtes que les citoyens développent le sens de l'ordre et de l'harmonie qu'ils ont reçude la nature et qu'ils suppléent ainsi aux lacunes de leur éducation morale.

En effet, la danse et lamusique, à l'aide du rythme et de l'harmonie, expriment une certaine harmonie du corps qui renvoieà l'ordre de l'âme. - Ce faisant, puisqu'il y a corrélation entre l'harmonie musicale et l'ordre de l'âme, il faut veiller à encourager certaines mélodies et à en interdire d'autres, car de mauvaises harmoniesfabriqueront de mauvaises âmes, seule la musique vraiment belle pouvant conduire à la vertu etéduquer les hommes.

Des censeurs doivent donc avaliser ou prohiber les mélodies composées parles artistes. - C'est pourquoi Platon dénonce les dérives qui eurent lieu à Athènes : il écrit à ce sujet que les artistes : « ravalèrent inconsciemment la musique et poussèrent la sottise jusqu'à croire qu'ellen'avait pas de valeur intrinsèque et que le plaisir de celui qui la goûte, qu'il soit bon ou méchant,est la règle la plus sûre pour en bien juger.

En composant des poèmes suivant cette idée et en yajoutant des paroles conformes, ils inspirèrent à la multitude le mépris des usages et l'audace dejuger comme si elle en était capable.

» (Platon, Lois , 700d) Ainsi la raison déclina-t-elle, et les artistes, esclaves de la multitude, allèrent toujours plus avant dans leur détérioration de l'artmusical.

« L'aristocratie céda la place dans la ville à une méchante théatrocratie » ajoute Platon(Platon, Lois , 701a). - De cette liberté excessive découle ainsi l'instauration de la démocratie, ce « bazar aux constitutions » comme il l'écrit dans la République (en 557d).

Sans autorité légiférant d'après la raison, ce sont alors les sophistes qui prennent le pouvoir et il s'en suit la tyrannie dans laquelleaucune liberté n'est plus possible. - Platon a pris l'exemple de la musique pour justifier la censure, mais on aurait pu en prendre d'autres, en invoquant notamment le fait que certains discours corrompent la jeunesse, ou quecertains comportements ostentatoires encouragent le vice.

Aussi peut-on penser que la libertéd'expression doit parfois être limitée pour permettre l'usage de la liberté fondée en raison. Mais c'est lorsqu'on laisse le peuple s'exprimer qu'il s'éduque le mieux et par lui-même. - Le point de vue platonicien est cependant largement critiquable.

On peut notamment en trouver une critique parfaitement valable chez Kant, dans son opuscule Qu'est-ce que les Lumières ?. »

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