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Que pensez-vous de cette affirmation: "l'homme est un être de désir" ?

Publié le 10/01/2004

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L'homme devant accomplir sa nature d'être raisonnable ne saurait donc être soumis à la juridiction commune de la nature. Il disposerait de la faculté de se donner librement des règles et de transcender la nature qui, elle, est soumise à des lois. Il pourrait donc s'arracher à ses désirs et n'agir que mû par la raison. Or, c'est précisément cette croyance au pouvoir de l'homme sur lui-même et sur la nature que Spinoza, un siècle plus tôt, considérait comme l'erreur qui empêche les hommes de parvenir à une connaissance vraie de la nature et d'eux-mêmes.Spinoza identifie « Dieu » et « Nature ». Dieu n'est pas transcendant mais immanent (intérieur à ce monde). Il n'y a donc pas d'arrière-monde. Autrement dit, ce monde-ci, qui est la Nature entière, est le seul qui existe et qui puisse exister. Il est éternel (sans commencement ni fin) et cause de soi (sans autre relation qu'à soi-même). C'est pourquoi tout ce qui existe, existe nécessairement.

« Définition I des Affections).

Ce n'est donc plus l'intelligence ou la raison qui définissent l'homme, mais l'effort(conatus) que chaque être déploie dans l'existence pour persévérer dans son être.

Or cette force d'exister, étanttoujours orientée vers l'obtention d'un bien, se donne concrètement comme désir.

Il ne s'agit donc pas, pourSpinoza, de combattre les désirs.

L'essence de l'homme étant le désir, lutter contre l'affectivité serait vouloir ladestruction même de l'homme.

Il s'agit, au contraire, de faire en sorte que le désir, qui est toujours dans saprofondeur désir d'un accroissement de la puissance d'exister, puisse se réaliser pleinement.

Car ce sont l'ignorance,l'aliénation du désir, qui sont source de servitude et de malheur, et non pas le désir comme tel.S'aliéner, c'est laisser s'insinuer, en l'intériorité de son désir, la puissance de quelque chose de radicalement autreque soi.

Lorsque le désir admet en lui et contre lui une extériorité croissante, il n'est alors plus seule cause de cequ'il désire.

Il s'ensuit une diminution de la puissance d'exister et la tristesse.

C'est par l'imagination que le désir peutêtre entraîné dans des actions inadéquates dont il ne sera pas la seule cause.

Il convient donc que le désir seréfléchisse lui-même, autrement dit accède à la conscience de lui-même comme force et désir d'une joie réelle.

Seulle désir même de la joie permet de se libérer de la conscience imaginaire et déchirée. A.

Action et passion Nous agissons vraiment, nous sommes « actifs », lorsque nous sommes par nous-mêmes la cause de nos actes etde nos sentiments.

Nous sommes au contraire « passifs » quand nos actes, nos sentiments ne s'expliquent pas par nous, mais par descauses extérieures.

Or, comme toute partie de la nature, nous subissons nécessairement l'action de causes extérieures.

Nous sommesdonc nécessairement en proie aux passions : elles sont les affections du corps et les sentiments de l'âme, dont nousne sommes pas la cause, et qui nous poussent à certains actes. B.

Joie et tristesse, les deux passions fondamentales Mais il y a passion et passion.

Toute passion n'est pas mauvaise : si les choses extérieures ont un effet positif surmoi, augmentent ma perfection, ma puissance, j'éprouve une joie.

Si elles restreignent ma puissance, ma capacitéde penser et d'agir, j'éprouve une tristesse.

Toute joie, signe d'un perfectionnement, est bonne, toute tristesse,signe d'un amoindrissement, est mauvaise.

Le sage s'efforce donc de favoriser les passions joyeuses et de chasserles passions tristes.

Toute passion dans l'âme est passion dans le corps, et toute action dans l'un est aussi action dans l'autre.

Il estdonc absurde de penser que l'âme pourrait se perfectionner au détriment du corps. Ainsi, pour Spinoza, toutes les entreprises morales d'annihilation ou demaîtrise du désir par la raison sont illusoires.

La raison n'est pas unepuissance et seul le désir de la joie, qui est le plus puissant de tous les désirs,peut permettre à l'homme de se libérer de l'imagination désirante qui estsource de superstition, d'aveuglement et donc d'asservissement.

Spinoza vamême plus loin en affirmant que c'est le désir qui est à l'origine du désirable :autrement dit, c'est parce que nous poursuivons une fin qu'elle se constituecomme valeur, et non parce que nous reconnaîtrions un bien que nous ledésirerions.

Il y a là un renversement total de la position traditionnelle.

C'estle désir qui fonde les valeurs.

La vertu véritable coïncide avec la libertéd'esprit et la vie heureuse. LE « CONATUS » OU EFFORT DE L'ÊTRE. Rien ne va au néant.

Le nihilisme est absurde : « Nulle chose ne peut êtredétruite, sinon par une cause extérieure » (Éthique, III, P.

4).L'essence d'une chose est une manifestation limitée de l'essence de la Causede soi, qui est puissance infinie : « Tant que nous considérons seulement lachose elle-même, et non les causes extérieures, nous ne pouvons rien trouveren elle qui puisse la détruire » (ibid.).De là découle la proposition 6, justement célèbre: « De par son être, chaque chose s'efforce de persévérer dans son être » L'être est désir d'être. « Cet effort, rapporté à l'esprit seul, s'appelle volonté ; mais quand il se rapporte à la fois à l'esprit et au corps, ils'appelle tendance (appetitus) ; la tendance n'est donc rien d'autre que l'essence même de l'homme ; de cetteessence découlent nécessairement les actes qui servent à sa conservation; et ainsi l'homme est déterminé à lesfaire.

De plus, entre la tendance et le désir (cupiditas) il n'y a nulle différence, sinon que le désir se rapportegénéralement aux hommes dans la mesure où ils sont conscients de leurs tendances et c'est pourquoi on peutdonner la définition suivante : Le désir est la tendance accompagnée de la conscience de cette même tendance.Ainsi il est établi que nous faisons effort en vue de quelque chose, la voulons, tendons vers elle, la désirons, nonpas parce que nous jugeons qu'elle est bonne : au contraire, nous jugeons qu'une chose est bonne parce que nousfaisons effort pour l'avoir, la voulons, tendons vers elle et la désirons.

» (Éthique, III, P.

9, Sc.).

Ainsi le désir,reconnu par toute la philosophie comme le dynamisme immanent à la nature, exprime directement l'essence de l'êtrefini, ou puissance finie.. »

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