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Peut-on voir le meilleur et faire le pire ?

Publié le 27/12/2005

Extrait du document

Analyse:

 

- Voir ne signifie pas ici recevoir une sensation par l’intermédiaire du sens de la vue, mais plutôt une opération de l’entendement: connaître, juger. Cette opération est d’abord interne à la conscience et d‘ordre purement théorique: l’entendement juge du meilleur sans qu’aucune action ne s’en suive nécessairement.

- Faire est au contraire une opération qui implique une extériorité par rapport à la conscience: « faire « signifie agir dans le monde et modifier la configuration des choses extérieures. Ce passage à l’acte hors de la conscience nécessite une faculté différente de l’entendement: la volonté est cette faculté qui permet à une représentation de se matérialiser dans un acte. Par l’entendement je connais le meilleur, par la volonté je cherche à le réaliser effectivement.

- Apparemment, le faire (opération de la volonté) est donc indépendant du voir (opération de l’entendement). Je peux par exemple juger que le soleil se lèvera demain sans que cela ne débouche sur aucun acte, je peux également voir que quelqu’un fait erreur sans pour autant aller le corriger. Le jugement n’emporte donc pas nécessairement la volonté: il peut très bien ne rester qu’un constat interne à la conscience et ne déboucher sur aucun acte effectif.

- Cependant, le jugement portant sur le « meilleur « constitue un cas particulier et exceptionnel. En effet, le « meilleur « comme le « pire « ne sont pas seulement objet de connaissance, ils ont intrinsèquement une connotation pratique: le meilleur est ce que je recherche et le pire est ce que je fuis. On peut alors ce demander si, dans ce cas particulier, le « voir « ne déterminerait pas le « faire « au sens où je ne pourrais pas connaître le meilleur sans agir en ce sens, ni connaître le pire sans le fuir. C’est cette mise en rapport de deux sphères hétérogènes (la sphère théorique de l’entendement et la sphère pratique de la volonté) qu’interroge le sujet.

 

Problématique:  

Lorsque notre entendement a jugé du meilleur (à entendre au sens de « meilleure action à accomplir «), alors la volonté est-elle encore libre d’adhérer à une autre option, ou bien est-elle déterminée par le meilleur? Dans le premier cas, il convient de se demander quelle autre valeur est susceptible de motiver la volonté. Dans le second cas, nous devons nous interroger sur la conception de la liberté qui sous-tend cette détermination de la volonté vers le Bien.

 

« dans ce contexte qu'est employée la formule du sujet.

Elle renvoie à une parole de Médée dans la tragédie deSophocle: « Video meliora proboque deteriora sequor » (je vois le meilleur et je l'approuve, mais je fais le pire).

Ilfaut replacer cette citation dans son contexte afin de l'interpréter: Médée est amoureuse de Jason, elle a desenfants de lui et celui-ci à présent la rejette.

Elle décide alors de tuer ses enfants, acte dont rend compte notreformule.

Le sens de la citation peut alors être compris ainsi: Médée sait qu'il est mauvais de tuer ses enfants, nonseulement en général mais elle-même en particulier approuve ce jugement, c'est donc la passion (l'amour, lajalousie, la vengeance) qui la pousse à commettre ce crime.

Sa volonté n'a pas été assez forte pour résister auxpassions.- Il est donc possible de rendre compte de ce type de situation à l'aide du « combat » que décrit Descartes auparagraphe 47 des Passions de l'âme.

En effet, celui-ci montre qu'au moment d'agir, il existe dans l'âme différents mobiles qui s'affrontent: les désirs et les passions (expression du corps et de l'influence des objets extérieurs surmoi) et la volonté (expression de mon âme raisonnable).

La valeur de notre âme dépend du vainqueur de ce combat(§48).

Lorsque les passions triomphent, je n'agis pas librement: ma volonté a céder devant l'influence des corpsextérieurs.

J'ai alors une « âme faible ».

Au contraire la force d'âme consiste à toujours agir selon sa propre volonté,c'est-à-dire à agir librement.

Transition: Je peux voir le meilleur et faire le pire, mais cette situation n'est que l'expression de la faiblesse de mon âme.

Est-elle alors toujours le résultat d'un échec de la volonté? Ne peut-on pas au contraire penser une manière « positive »de voir le meilleur et de faire le pire? III) Je peux voir le meilleur et faire le pire lorsque ma volonté cherche à affirmer son libre-arbitre et sonindépendance par rapport aux représentations de l'entendement: - Contrairement au désir ou à la passion, la volonté cherche le Bien.

Cependant, cette notion est ambiguë, etplusieurs objets sont susceptibles de constituer un bien.

Ainsi, lorsque je vois le meilleur, l'entendement fournit à lavolonté la représentation d'un bien: il s'agit dans ce cas de l' action la plus raisonnable à accomplir étant donnée lasituation.

Cependant, un autre type de bien est susceptible de concurrencer celui-ci: la volonté peut considérerqu'il est bien qu'elle prouve, par une décision parfaitement arbitraire, qu'elle n'est pas soumise aux jugements del'entendement, qu'elle possède un libre arbitre et qu'elle peut, en dernière instance, refuser d'opter pour le meilleur.Ainsi, dans la lettre au Père Mesland du 9 Février 1645 Descartes envisage la possibilité pour une volonté de rejeterle bien que lui présente l'entendement « si elle considère que c'est un plus grand bien d'affirmer par là son librearbitre ».

C'est cette affirmation du libre-arbitre qui pousse, par exemple, le personnage de Lafcadio dans les Caves du Vatican de Gide , à pousser sans aucun motif un vieillard hors d'un train.

La volonté se pose alors elle-même comme sa propre fin et refuse tout motif qui lui est extérieur: reste alors la simple affirmation du libre-arbitre.- Nous avons qualifié cette position de « positive » dans la transition, mais il faut davantage préciser le sens de cejugement.

En effet, il s'agit d'une positivité du pont de vue de la volonté au sens où son acte ne résulte plus de sonéchec, mais au contraire de la pure affirmation d'elle-même et de son indépendance.

Mais cela ne préjuge en aucuncas de la valeur morale d'un tel acte: en effet, on peut se demander quelle positivité morale nous pouvons assignerau fait d'agir purement gratuitement.. »

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