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Sommes-nous responsables de nos désirs ?

Publié le 02/02/2004

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Dans l'expérience que nous avons de nos désirs, nous croyons tellement les subir que nous ne nous en sentons pas toujours responsables, surtout au plus fort de leur domination. Aussi le problème de notre responsabilité se pose-t-il, notamment lorsque nous sommes amenés par nos désirs à commettre des actions répréhensibles. Cette éventuelle absence de responsabilité tiendrait à l'obscurité du sujet à lui-même, qui ne se connaît pas et qui ne connaît pas l'influence des causes extérieures sur lui. Mais si le désir est motivé, s'il est de l'ordre du fait, son accomplissement relève toujours, lui, de notre responsabilité éthique. * Axes de réflexion :I. Le désir est l'épreuve du sujet obscur à lui-même. Le désir vient au sujet d'une manière que celui-ci ne maîtrise pas : il n'est donc pas responsable de certains mouvements qu'il tend à accomplir, soit en vertu de son histoire, soit en vertu de sa nature même d'être humain. Freud expose ainsi la manière dont tout désir dépend en définitive de nos expériences passées, qui ont façonné notre libido en particulier au cours d'une histoire infantile qui nous détermine encore à l'âge adulte, jusque dans nos désirs les plus élevés moralement. Le rêve est peut-être l'exemple qui montre le mieux que nous ne sommes pas responsables de nos désirs, car ceux-ci ne se forment pas à un niveau conscient du psychisme, mais dans le ça, réservoir des pulsions. Nous désirons sans savoir pourquoi et surtout sans le vouloir, nous n'en sommes donc pas responsables.

Pour définir si l'homme est responsable de ses désirs, nous allons d'abord donner la définition du désir. Selon Spinoza  « le désir est l'essence de l'homme «, «  l'appétit avec conscience de lui-même «. Plus simplement le désir est le fait de vouloir posséder quelque chose en vue d'en tirer du plaisir, cette chose peut être matérielle ou non. Le terme responsable, veut dire ici, le devoir de répondre de ses actes et de ses pensés devant sa conscience. A la suite de cette brève définition, nous pouvons nous poser les questions suivantes : peut-on pleinement nous tenir responsable de nos désirs ? Doit-on se tenir responsable de ses conséquences ? Pour répondre à cette problématique, nous allons dans un premier temps voir que nos désirs nous appartiennent, puis, nous montrerons que nul ne peux être tenu comme responsable de nos désirs, et pour finir nous expliquerons la différence entre le désir et l'acte du désir.

  • I. Le désir est l'épreuve du sujet obscur à lui-même.
  • II. Le désir est l'action de causes extérieures sur nous.
  • III. Être libre, c'est être responsable de ses désirs.

« Le symptôme est donc un compromis entre le désir inconscient et inavouable que je subis, et les normesconscientes et morales que j'accepte.

« Le moi n'est pas maître dans sa propre maison » signifie que je n'ai pas conscience et que je ne maîtrise pas, ne contrôle pas une bonne part de ce qui se passe en moi-même, ce conflit,ce symptôme. L'hypothèse de l'inconscient est donc qu'une bonne partie de ce qui se passe en moi (dans mon âme, ma psyché) nem'est pas connu, m'échappe, et cependant influe sur moi.

C'est ainsi qu'il faut comprendre notre passage : lapsychanalyse se propose de « montrer au moi qu'il n'est seulement pas maître dans sa propre maison, qu'il en est réduit à se contenter de renseignements vagues et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience,dans sa vie psychique ».

La plupart des choses qui se passent dans l'âme échappent à la conscience. Pour Freud , on a surestimé le rôle de la conscience dans la vie de l'âme, et ainsi on s'est privé des moyens : ¨ De comprendre bon nombre de phénomènes comme les lapsus et les rêves ; ¨ De soigner un certain nombre de maladies, qui ne peuvent s'expliquer que par le conflit psychique qui agite lepatient. Adopter l'hypothèse de l'inconscient permet de comprendre et de guérir, c'est un gain de sens et de pouvoir.

Le butde la psychanalyse est alors de faire en sorte que l'individu, au lieu de subir les forces qu'il ignore et ne contrôle pas, puisse recouvrer sa liberté. En effet, la psychanalyse découvre que « Je est un autre » pour reprendre Rimbaud .

Il y a en moi un autre , un ensemble de forces, un inconscient qui me pousse à agir malgré moi.

Je subis un conflit dont je n'ai pas conscience,qui est souvent la trace d'un choc vécu durant l'enfance.

En ce sens je suis un être passif et agi, qui n'a ni lecontrôle de lui-même, ni de son passé, un être scindé.

Le but de la cure est de faire en sorte que je prenneconscience de ce conflit, que je reprenne la maîtrise de mon histoire.

Au lieu de subir ce que je ne connais pas, jechoisirai en toute conscience.

Au lieu de la « politique de l'autruche » de l'inconscient, il y aura le choix d'un sujet maître de lui-même. Enfin, notre passage est important en ce que Freud y explique les résistances à la psychanalyse.

« Dans le cours des siècles, la science a infligé à l'égoïsme naïf de l'humanité deux graves démentis ».

Avec Copernic , elle a montré à l'homme qu'in n'était pas au centre de l'univers.

Avec Darwin , elle est en train de montrer que l'homme est un animal comme les autres, qu'il y a en lui une origine animale. Ces deux sciences ont blessé l'orgueil humain, ont montré à l'homme que son sentiment de supériorité était naïf eterroné.

C'est pourquoi les thèses de Copernic valut un procès à Galilée , devant l'Inquisition en 1633.

C'est pourquoi les thèses de Darwin sont jugées à l'époque scandaleuse.

Les hommes refusent ce qui les blesse et y opposent une farouche résistance.

Or, continue Freud : « Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu'il n'est seulement pasmaître dans sa propre maison. » L'individu est pluriel : il n'est pas seulement une conscience maîtresse d'elle-même ; il subit un inconscient qui lepousse à agir malgré lui.

Redécouvrir et explorer cette zone d'ombre en nous, cette force qui nous rend passif, cedéchirement de l'homme reste le principal acquis de la psychanalyse. On peut radicaliser cette obscurité à soi-même en invoquant, dans une tout autre perspective, les traditionsplatonicienne et chrétienne.

Le désir est une sorte de trouble, voire une maladie que le corps inflige à l'âme, et dontelle ne peut se défaire que par la philosophie (Platon) ou par le recours à la grâce divine (saint Augustin).Nous ne sommes donc pas responsables de nos désirs, mais il peut alors sembler paradoxal que les dernièresperspectives évoquées, contrairement à la psychanalyse, n'échappent pas à un moralisme éthique qui condamneplus ou moins clairement le sujet pour ses désirs. II.

Le désir est l'action de causes extérieures sur nous. Il faudrait alors, pour être conséquent, dire que nous ne sommes pas responsables de nos désirs, parce qu'ils sont lerésultat de causes extérieures qui agissent sur nous sans que nous en ayons conscience.C'est ce que montre Marcuse, qui prolonge la réflexion de Freud par une analyse des moyens que met en oeuvre lasociété pour réprimer le désir sexuel et inculquer d'autres formes de désirs afin que les forces des individusconvergent vers le travail.

Il s'agit là, par une surrépression, d'imposer le principe de rendement contre le principe deplaisir.

Les individus ne sont donc pas responsables de leurs désirs car ils vivent dans l'aliénation.René Girard montre que cette structure sociale se retrouve au niveau individuel dans la nature mimétique du désir :nos désirs ne viennent pas tant d'un mouvement personnel vers un objet que de l'imitation d'un rival qui nous indiquece qu'il faut désirer.Pour Spinoza, le « désir aveugle » est également la servitude aux causes extérieures.

La condition naturelle deshommes est de ne pas être responsables de leurs désirs, mais leur tâche est de le devenir par l'usage de la raison.Le thème de la libération reste donc malgré tout présent, ce qui signifie bien que si certains désirs nous sontimposés, nous gardons toujours la possibilité – et dès lors la responsabilité – de nous en arracher pour devenir libres.. »

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