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Les vérités métaphysiques sont-elles démontrables ?

Publié le 27/02/2008

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La métaphysique est la discipline qui s'occupe des premiers principes, c'est-à-dire de l'être dans ce qu'il a de plus général (c'est-à-dire ce qu'ont en commun toutes les choses qui sont) et d'autres objets non accessibles aux sens tels l'âme, Dieu ou le monde. Or, à part la vérification empirique par les sens, le seul autre mode de découverte et de justification de la vérité d'un discours est la démonstration. S'il y a des vérités métaphysiques, elles semblent donc nécessairement démontrables. C'est ce qui apparaît lorsqu'on regarde quelques exemples de ces vérités comme « je suis, or le monde comprend tout ce qui est, donc je fais partie du monde » qui ont des formes syllogistiques, c'est-à-dire démonstratives.   Le problème que l'on peut opposer à cette conception est que la démonstration, qui lie des hypothèses à une conclusion par une déduction rigoureuse, dépend entièrement de la vérité de ces hypothèses : elle ne fait que transmettre la vérité des prémisses du raisonnement à sa conclusion, mais ne crée pas de vérité. Pour qu'une démonstration soit vraie, il faut qu'il y ait au moins un axiome dont la vérité est considérée comme donnée, c'est-à-dire qu'il y ait une vérité intuitive et indémontrable. La métaphysique n'échappe pas à la règle, et semble devoir reposer en son point de départ sur une idée dont la vérité soit indémontrable.   Mais alors, la vérité peut-elle encore produire un discours acceptable par tous ? En science, on peut se reposer sur l'expérience pour faire admettre à tout un chacun une proposition que l'on tiendra pour un axiome, mais la métaphysique ne peut partir de l'expérience puisque ses objets n'en relève pas. La métaphysique ne repose-t-elle alors que sur un acte de foi ? S'agirait-il encore d'un discours capable d'être « vrai » ou « faux » ?   Le paradoxe est ainsi que les vérités métaphysiques ne peuvent être que démontrables pour être des vérités, mais en même temps ne peuvent être uniquement démontrables, et semblent appeler un élément intuitif et indémontrable. Cela pose le problème du statut et du sens de la vérité métaphysique : est-elle comparable à la vérité scientifique ? Peut-elle réellement être appelée « vérité » ? L'enjeu de cette question est de déterminer la valeur et l'utilité du discours métaphysique.

« analyse, qu'on donnât les définitions de tous les termes qui en sont capables, et qu'on démontrât ou donnât lemoyen de démontrer tous les axiomes qui ne sont point primitifs sans distinguer l'opinion que les hommes en ont, et sans se soucier s'ils y donnent leur consentement ou non.

» Faire reposer les axiomes de tout raisonnement sur uneexpérience de la vérité, comme le fait Descartes, est dangereux, car on ne saurait alors si cet accord sur l'évidencen'est que l'effet d'une illusion commune à tous les hommes (leur « consentement ») reposant sur l' « opinion » qu'ilss'en font.

Ces axiomes primitifs, eux, ne feraient appel aucunement à leur opinion car ne reposeraient que sur leprincipe logique de contradiction qui est la règle de toute démonstration et affirme que « A n'est pas non-A.

» Or sil'on dit que « A est A » est une proposition fausse, on dit que « A est non-A » ce qui viole ce principe.

Il est doncpossible de fonder toutes les démonstrations sur un principe lui-même démontrable.C./ Mais cela veut-il dire pour autant que la métaphysique est une discipline dont les propositions sont démontrablesrigoureusement à partir de premiers principes que sont les propositions identiques, les axiomes primitifs ? Non, carles définitions que la métaphysique prend de ses objets (l'âme, Dieu, l'Univers, etc.) ne sont pas déductibles pourl'instant, même si Leibniz affirme qu'elles pourront l'être un jour, des axiomes primitifs.

Il en résulte qu'enmétaphysique on ne peut faire de démonstrations parfaitement rigoureuses.

Ainsi, dans la Lettre à Lady Masham , Leibniz lui avoue qu'il n'y a aucune preuve de la vérité de son hypothèse métaphysique, mais qu'elle est la plusprobable, car la seule qui soit non contradictoire.

Les vérités métaphysiques sont donc démontrables dans leurensemble en droit, car rien n'échappe à la démonstration, pas même les premiers principes, mais de fait cela estimpossible pour l'instant.

Or on peut douter que cette impossibilité de fait ne cache pas en réalité une impossibilité de droit.

Est-il réellementpossible de démontrer quoi que ce soit sur des objets qui n'ont aucun rapport à l'expérience, c'est-à-dire qui nesont même pas représentables par imagination ? III./ L'incapacité à démontrer sans intuition conduit à une disqualification des vérités métaphysiques.

A./ Lorsque je ne fais que déduire une proposition d'une autre, je ne produis pas réellement de la vérité comme onn'a cessé de le dire : je ne fais que la transmettre.

Cela veut dire que je ne fais que ce que Kant nomme, dansl'introduction à la Critique de la raison pure , des jugements « analytiques » : « Les jugements analytiques (affirmatifs) sont ceux dans lesquels l'union du prédicat avec le sujet est conçue comme un rapport d'identité […] Ilsn'ajoutent rien par le prédicat au concept du sujet, mais ne font que le décomposer par le moyen de l'analyse enses divers éléments déjà conçus avec lui.

» Ce que montre ici Kant, c'est que les jugements analytiques nepermettent pas de connaître ce sur quoi ils portent, d'augmenter nos connaissances vraies à son sujet, mais justede l'expliquer.

On ne peut donc prendre comme fondement d'une démonstration des jugements analytiques comme leproposait Leibniz, car alors on ne ferait qu'expliquer ce que l'on s'est donné sans jamais augmenter nosconnaissances à son sujet.B./ Ainsi, comme le montre Kant dans cette même introduction : « Les jugements mathématiques sont toussynthétiques.

» La science mathématique repose certes sur des déductions, mais elle a en son fondement despropositions non pas analytiques mais synthétiques, qui lient à un sujet un prédicat qui n'est pas contenu en lui :« C'est une proposition synthétique que celle-ci : entre deux points la ligne droite est la plus courte.

En effet monconcept de droit ne contient rien qui se rapporte à la quantité ; il n'exprime qu'une qualité.

Le concept du plus court est donc une véritable addition, et il n'y a pas d'analyse qui puisse le faire sortir du concept de la ligne droite.

»J'aurais beau fouiller le plus possible le concept de droite, je n'y trouverai jamais, dans sa définition, quelque chosequi concerne sa longueur et donc, a fortiori , le fait qu'elle soit le plus court des chemins entre deux points.

Pourtant cela est assuré, et on n'a pas tire cette proposition de l'expérience (elle est a priori ) de droites liant des points. D'où vient-elle alors ? « Il faut donc ici encore recourir à l'intuition ; elle seule rend possible la synthèse.

» J'ai uneintuition de l'espace et c'est grâce à cette intuition que je peux me rendre compte de la vérité de cette proposition.Or la métaphysique cherche à produire des connaissances, des jugements qui étendent notre connaissance, mais ens'interdisant tout recours à l'intuition, puisque ses objets sont irreprésentables.

Elle ne peut donc faire de synthèsesa priori et est incapable d'emprunter ce que Kant nomme dans sa préface « la voie sûre d'une science.

» Elle reste un « champ de bataille » où chacun peut démontrer ce qu'il veut s'il se donne la définition qui l'arrange : aucuneintuition ne viendra poser des axiomes permettant de faire des démonstrations rigoureuses.

La raison pure de touteintuition en vient à produire ce que nomme Kant, dans la partie intitulée « Dialectique transcendantale », des« antinomies de la Raison pure » : pour chaque objet de la métaphysique que sont Dieu, l'âme, le monde, Kantmontre que l'on peut aussi bien soutenir une thèse qu'une autre sans que l'on puisse trancher entre les deux.C./ La métaphysique n'est donc pas une science démonstrative car elle se prive de ce qui permet lesdémonstrations : l'intuition.

Ainsi elle ne peut être dite produire des vérités, en ce qu'une vérité permet normalementde connaître une réalité, c'est-à-dire d'étendre son concept.

Est-elle pour autant inutile ? Non, elle peut employer des jugements analytiques et ainsi déployer ce qui est présent de manière implicite dans les concepts qu'emploientles sciences par exemple – c'est ce que réalise Kant lorsqu'il écrit les Premiers principes métaphysiques de la science de la nature .

La métaphysique ne peut certes produire de la vérité, mais comme elle peut, à défaut de les connaître, penser ses objets (c'est-à-dire en former une définition non-contradictoire) elle peut être productrice de clarté.

Ainsi, il semble que l'on ne peut dire que les vérités métaphysiques sont démontrables car on ne saurait direqu'elles sont des vérités.

La métaphysique n'a pas le statut de science mais uniquement de discipline accolée auxsciences, essayant de penser leurs objets sans la contrainte de l'expérience.

Il n'en résulte pas pour autant uneperte de toute valeur de la métaphysique.

En montrant ce qu'il fallait entendre rigoureusement par démonstration,nous avons montré que si la métaphysique ne pouvait démontrer quoi que ce soit, elle peut penser les objets des. »

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