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Faut-il craindre le regard d'autrui ?

Publié le 19/03/2016

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Faut-il craindre le regard d’autrui ? Lorsque l’on se sent regardé, on est mal à l’aise, toutefois on n’apprécierait guère que personne prête attention à nous. Alors, faut-il craindre le regard d’autrui ? Avons-nous donc à avoir peur, à redouter les yeux que pose sans cesse sur moi cet alter ego, cet autre moi qui est autre que moi ? Pourquoi donc ? Se pourrait-il vraiment qu'il soit malveillant, dérangeant, opprimant même ? Infernal ? Serait-il une menace, un danger ? Au demeurant, la peur du regard d'autrui est une expérience souvent quotidienne Mais est-ce là une attitude bien raisonnable, vraiment justifiée ? Est-ce irrémédiablement sur le mode de la crainte qu'il nous faut envisager ce regard ? C’est une question essentielle pour comprendre nos relations avec les autres. Est-ce une obligation ou est-ce nécessaire d’avoir peur ou de se méfier du regard des autres ? Qui sont ces « autres », cet « autrui » ? : Un alter ego, un semblable mais aussi quelqu’un différent de moi. S’interroger ainsi sur la crainte du regard des autres, c’est se demander si nous sommes sensibles, au point de le redouter, au pouvoir moral qu’exercent sur nous nos semblables du fait qu’ils nous observent et nous jugent. Le regard peut-être bienveillant ou non, neutre, sombre ou non, positif ou négatif… En nous demandant s’il faut craindre ce regard, nous serons amenés à déterminer si une telle crainte est non seulement inéluctable mais aussi si elle est souhaitable. Sommes-nous soumis de fait, comme malgré nous, à ce regard et est-il bon moralement de ne pas nous y soustraire ? Nous ressentons de fait comme une menace le regard des autres ; Sartre l’a montré dans l’Être et le Néant et dans Huit-Clos alors que, peut-être, nous devrions l’éprouver moins comme une menace que comme une chance, ainsi que le suggère, par exemple, la relation de Robinson et Vendredi dans Robinson Crusoe. En sachant que si le regard des autres est à craindre, nous saurons donc la nature et le degré de notre dépendance à son égard. Nous saurons ainsi s’il vaut mieux fuir ou même mépriser le regard des autres ou, au contraire, l’apprécier et le rechercher, en acceptant de l’affronter ? Pour savoir s’il faut craindre le regard d’autrui, nous rechercherons d’abord les raisons que chacun pourrait avoir de craindre le regard des autres. Nous nous demanderons ensuite les raisons que chacun pourrait avoir de ne pas le craindre. Nous pourrons alors étudier enfin comment assumer l’obligation morale de craindre le regard d’autrui quand il nous formule une demande qui nous apparaît comme un impératif moral. Premièrement, quelles sont les raisons pour lesquelles nous devrions craindre le regard des autres ? "L'enfer, c'est les autres", c'est sur cette phrase pour le moins frappante et catégorique que s'achève Huis Clos, la célèbre pièce de Sartre. Ainsi pourrions-nous donc supposer, a priori, que nos rapports avec les autres seraient toujours cruels, empoisonnés, infernaux ? Dans la perception immédiate, autrui m’apparaît comme un regard qui pèse sur moi et qui est autre que moi. Le regard pourrait être source de violence : la présence d'autrui, qui est pourtant un autre moi-même, peut être ainsi parfois beaucoup plus dérangeante que celle des choses qui peuvent me laisser indifférent. Le regard de l’autre posé sur moi me trouble. Il m’inquiète, il m’attire ou me repousse. S’il n’y a personne pour me voir, si je suis seul, je peux être tenté de commettre des actes délictueux. Si je trouve par terre un portefeuille, je peux m’en saisir plutôt que de le déposer au commissariat. Un autre que moi aurait probablement adopté une même conduite. Mais imaginons que je sois vu, alors un sentiment de honte m’envahit. L’autre est là et je ne peux pas faire ce que je veux. Tel est le sens des célèbres analyses de Sartre dans L’Être et le Néant sur autrui. Imaginons que par jalousie, par intérêt, par vice, j’en sois venu à coller mon oreille contre une porte pour vérifier qu’aucune trahison ne se fait envers moi. Je me crois seul et à ce moment là, je n’ai pas conscience du caractère indiscret et inconvenant de mon attitude. Ma conscience colle à mes actes, elle est irréfléchie et quelqu’un m’a vu alors tout d’un coup j’ai honte. L’autre me regarde. Je suis gêné par son regard, il a contrôle sur moi, il m’a surpris. Du coup, je ne suis plus sous son regard qu’une chose honteuse. Dans la honte, l’autre me vole ma liberté et je me sens prisonnier, coupable, englué dans l’aliénation de la présence écrasante d’autrui. Je comprends qu’il est un autre moi-même, qu’il constitue comme moi une conscience, parce que dans son regard je perçois un jugement car on dit que le regard est le miroir de l'âme. Il me permet d’accéder à un niveau de conscience morale, dans la mesure où il favorise une distinction entre ce qui est permis et ce qui est défendu. Le cogito sartrien devient : non pas le « je pense, donc je suis », mais : « on me regarde, donc je suis ». Je suis sa chose, il me vole ma liberté et me réduit à ce regard qu’il a surpris et dans lequel je suis pétrifié. Puis, autrui par son regard constitue un obstacle à ma liberté et installe donc une conflictualité. Autrui semble avoir le pouvoir de menacer ce qui constitue notre intégrité, par le simple effet d’un regard. La relation entre dominant et dominé est instaurée. Pour sortir de cette humiliation du sentiment d’être une chose sous le regard de l’autre, je ne trouve plus alors qu’une issue, lui lancer à mon tour un regard insolent pour l’obliger à baisser les yeux. Si j’y parviens, il devient le dominé, tandis que je suis alors le dominant. La situation de conflit est là, tendue, empreinte d’une hostilité réciproque. En ce sens nous pouvons nous demander si la crainte ne devient pas une réaction naturelle nécessaire pour se protéger du regard d’autrui. La crainte, en effet, est un sentiment, d’appréhension qui inhibe nos actions. C’est un état de conflit perpétuel de l'homme car cet état de nature est caractérisé par ce qu'Hobbes appelle la liberté naturelle ou par le droit naturel ; il s'agit de la faculté d'accomplir, pour un individu, tout ce qui est en sa puissance aussi loin que s'étend cette puissance tant qu'il ne rencontre pas d'obstacle extérieur. Dans l'état de nature, les droits naturels de chacun s'opposent et cet état de nature est conflictuel. Le regard somme l’autre de répondre à ma demande, et elle me soumet à l’autre en me dévalant sur le plan de l’objet. Or, cette demande est en même temps une violence première qui s'introduit dans la relation. C'est un état d'insécurité, de crainte dans l'état de nature, tout le monde vit au jour le jour sous la pression de la crainte, de la mort violente donné par autrui. Cette thèse a été exprimée par Hegel dans La phénoménologie de l’esprit avec la dialectique du maître et de l'esclave. Avant Sartre, Hegel met en relief le fait que, à la différence de l’animal qui n’aspire généralement qu’à la conservation de soi et à la satisfaction de besoins élémentaires, l’homme manifeste un désir de reconnaissance. Au commencement de l’histoire humaine, Hegel imagine une lutte des consciences à l’origine de la différenciation entre le maître et l’esclave. Le maître est celui qui a su prendre le risque de perdre sa vie pour asseoir son autorité. Témoignant en cela de son détachement à l’égard de l’instinct de conservation animal, il s’est libéré de l’ordre de la matérialité et de la nécessité. L’esclave est celui qui s’est laissé soumettre. Il est dépendant du maître. Mais paradoxalement par l’intermédiaire de son travail, l’esclave prend conscience de lui-même en imprimant sur le monde extérieur la marque de son intériorité. N’étant plus confronté au monde extérieur, le maître tend en revanche à perdre conscience de lui-même. Il accroît son réseau de dépendances et perd son autosuffisance. Nous avons analysé dans ce premier moment pour quelles raisons nous devrions craindre le regard d’autrui. Elles sont plusieurs : autrui est étranger à moi et son regard me juge et me met mal à l’aise, ce qui installe une relation conflictuelle dès le début de la rencontre avec cet alter-ego. Mais se pose alors le problème de savoir s’il est légitime de fonder ainsi nos rapports avec autrui sur la peur. Ensuite, autrui peut aussi m’être bénéfique et ne pas être malveillant ou porteur de jugement. Il y a des raisons pour lesquelles je peux ne pas le craindre. J’ai des raisons de craindre le regard d’autrui, mais en rester là, ne serait-ce pas admettre que le rapport à l’autre est simple lutte d’ego repliés sur eux-mêmes ? Le regard de l’autre ne peut-il pas être un soutien ? La crainte est-elle une réaction nécessaire et naturelle pour nous protéger du regard de l’autre, ou est-elle une réaction dangereuse qui met en péril nos rapports avec autrui ? Autrui est l’intermédiaire indispensable par lequel j’existe sur le mode objectif et me connais. C’est à travers autrui que je peux atteindre un savoir sur moi-même. La formule de Sartre « Autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même » indique suffisamment qu’autrui n’est pas seulement celui qui me fige et m’aliène, mais aussi celui qui me libère en m’arrachant au repli frileux où croit pouvoir trouver refuge la conscience solitaire. Le retrait ou le refus de communiquer sont d’ailleurs illusoires. Même absent, autrui habite ma solitude parce qu’il est ce par quoi se constitue indéfiniment mon rapport à moi-même et a monde. Le sujet n’existe que soutenu par le regard qui le fait exister dans une forme. Autrement dit, seul avec moi-même, j’ai si peu le sentiment d’exister qu’il faut que l’on me regarde, que l’on me considère, que je me sente reconnu par un autre pour que j’éprouve ce sentiment. J’exige cette reconnaissance car elle me fait exister. En quoi le regard d’autrui me concerne ? Qu’est ce que le regard peut m’apporter ? Ce regard d’autrui m’amène à une conscience de moi-même. Si je me retrouve radicalement seul, sans aucun lien social, je risque vite de perdre la conscience de mon individualité et ma conscience morale peut s’égarer. Le regard des autres permet de m'affirmer et de me reconnaître moi-même comme sujet. En effet, l'accès à la conscience du soi passe par le regard des autres. De plus, grâce au regard d'autrui, je me sens considéré et j'ai la sensation d'exister. L'estime de soi est donc fonction de l'estime des autres. Nous pouvons donc dire qu'autrui m'aider, mais outre cela, autrui peut être nécessaire à la constitution de mon être en tant que tel. Il semble difficile de prendre conscience de soi dans la solitude. En effet, comme le fait remarquer Hegel, sans la rencontre avec autrui, le moi resterai enfoncé dans l'être de la vie, un peu à la manière d'un animal. De son côté, Sartre pense qu'autrui ne représente pas un quelconque obstacle s'opposant à mes projets, il ne peut pas non plus simplement m'aider ; il est une médiation nécessaire entre moi immédiat et le moi qui accède à la pleine et entière conscience de soi. Par ailleurs, les relations proches comme les relations familiales, amicales ou amoureuses sont des connexions qui intègrent un regard extérieur positif et constructif pour moi-même. Quand sont présentes à la fois la sympathie et la bienveillance et qu’elles sont réciproques, nous sommes dans l’amitié. L’ami est celui qui tout à la fois aime et veut sincèrement le bien de l’autre. En un mot, l’amitié est une vertu. Selon Aristote dans L’Ethique à Nicomaque, il existe trois types d’amitié ; l’amitié sympathique, utile et parfaite mais la plus important est « l’amitié parfaite » ou « vertueuse ». Donc, appelons amitié parfaite, celle dans laquelle ce qui est aimé, c’est le bien. L’ami est celui à qui je veux du bien et qui me veut du bien. Cette dimension morale est très importante. On ne peut pas appeler ami celui qui vous encouragerait à la dépravation pour vous faire plaisir. L’ami est celui qui a souci de votre bien et qui saura parfois vous remettre en question pour vous sortir de votre égarement. La complaisance dans le plaisir n’a rien à voir avec le souci du bien. C’est un des regards de l’ami qui est donné ici, puisqu’il nous remet en question sans nous juger ou nous prendre comme inférieur. Aussi, « vouloir le bien de ses amis pour leur propre personne, c’est atteindre au sommet de l’amitié». A partir du moment, où l’amitié se constitue dans le bien, on ne peut en aucun cas craindre le regard d’un ami. L’amitié demande du temps pour se connaître, du temps à consacrer à l’autre. Aristote distingue à ce titre les passions et les vertus. Une passion est une inclination naturelle qui dépend d’une force de la nature, une vertu dépend d’un vouloir, d’une bonne volonté humaine. L’amitié est vertu et non passion. La sympathie peut s’éprouver passivement, mais l’amitié se veut, elle s’entretient, demande que l’on accorde du temps à l’autre. L’amour est basé sur le même principe. Il n’y manque que la transformation de la sympathie en amour pour avoir cette relation. La personne qui vous aime vous protègera. Quand l’amour est réellement présent, il y a du respect, car il l'enveloppe. Quand on aime, on respecte celui que l’on aime dans la chaleur de l’affection. L’amour est le don du soi du cœur qui n’attend pas de retour, qui n’exige pas la réciprocité, le don qui trouve sa joie dans le seul fait de se donner. Ici, la situation est même : quelqu’un qui vous aime et qui veut votre bien ne doit pas être craint ! Comment avoir peur d’une personne qui vous porte de l’amour ? Prenons l’exemple des parents, des frères et sœurs, le lien familial et le lien du sang qui nous connecte fait que nous nous aimons le plus souvent. Des parents auront toujours de l’amour paternel ou maternel pour leurs enfants, c’est naturel. Un amour naturel familial ne peut vous faire du mal. La bienveillance est toujours présente dans ces relations. Nous avons étudié dans ce deuxième temps les raisons pour lesquelles nous ne devrions pas craindre les autres et leur regard, cela passe par l’amitié et les relations proches, et le fait qu’autrui me fait prendre conscience de mon existence. Néanmoins, le regard d’autrui m’appelle à accomplir un devoir moral. Enfin, l’obligation morale de craindre le regard d’autrui est importante quand il nous formule une demande qui nous apparaît comme un impératif moral. Alors, dans Totalité et Infini, E. Levinas montre que le visage d'autrui nous invite à une considération morale hautement divine, et qu’il est une manifestation de l’altérité. En effet, le visage nu est l'indice pour moi de l'Autre infini, absolu, et me commande de ne pas lui faire de mal. En outre, autrui porteur de demande à mon égard. Le regard d’autrui m’implore, m’appelle. Il se réfère à moi. Le regard d’autrui fait aussi appel à ma générosité. Il m’interpelle pour l’aider, pour faire une action en vers lui comme les personnes en danger qui ne parle pas ou autre. Ainsi, le visage d'autrui porte en lui ces prescriptions inconditionnées, que sont le « tu ne tueras point » etc. Chacun est donc infiniment responsable par rapport à l'autre, à sa fragilité. Le visage ouvre sur l’altérité, il désigne la présence d’un être n’entrant pas dans la sphère de mon intimité. Ce visage est un langage d’avant les mots, il peut nous faire passer des émotions, des sentiments et des problèmes comme la colère, la joie, la pauvreté, la faim, la droiture. Le visage d’autrui est nu pour Levinas, car il est la surface même de son intériorité, nous montrant sa fragilité. Donc, pour Levinas, le fait qu'autrui soit au fondement même de mon être, soit la condition nécessaire de ma propre constitution, m'oblige à respecter autrui. Pour lui, le visage d'autrui s’impose à moi et porte l'interdiction de la violence, le "tu ne tueras point", il m’arrache à l’indifférence. Autrui est donc, avant tout, celui qui fait naître en moi l'exigence éthique. En effet, tant que l'homme ne vit sans connaître l'homme, il ne peut pas faire la différence entre ce qui lui appartient, le monde et ce qui n'est pas lui. Levinas affirme que le règne du même est le règne de la guerre. L'irruption d'autrui dans mon monde, me confronte avec ce que je ne peux maîtriser. Autrui me résistera toujours. Même sous la menace, il peut user de sa liberté et refuser de me donner ce que je lui demande. Autrui est donc ce qui interrompt l'illusion de puissance et la violence de l'individu. S'ouvrir à autrui est donc un gage d'humilité, la prise de conscience que je ne suis pas le centre du monde, que je ne suis unique et seul au monde. Quand je suis persuadé que tous mes désirs seront assouvis selon le principe de plaisir, c'est à travers ce que les autres m’accordent ou m’interdisent que je prends conscience qu’il ne m’est pas tout permis de faire, en quelque sorte, que je ne suis pas le maître du monde. Respecter autrui, c'est alors le poser comme limite à mon droit naturel d'user de toutes choses et des autres à mon profit. Autrui me destitue de mon amour-propre et de l'égocentrisme. Pour finir, la volonté de faire le bien pour autrui est une forme de respect et d’humanité. « Être bienfaisant, quand on le peut, est un devoir » nous expose E. Kant dans Les Fondements de la Métaphysique des Mœurs. Être bienfaisant c’est faire le bien pour les autres, c’est être altruiste, charitable. Un devoir est quelque chose qui doit être fait obligatoirement, c’est une obligation imposée par la morale, la loi, un règlement, ou des conventions sociales. La morale a à voir avec le souci d’autrui. Il s’agit de se désintéresser de soi-même afin de se soucier de l’autre ; elle sous-entend alors une certaine forme de recul par rapport à nos instincts, pulsions, penchants naturels ; la morale s’oppose alors à la nature, et nous permet de devenir des sujets libres et responsables de leurs actes. Alors, une action moralement bonne est celle qui est accomplie en conformité avec les règles, les lois morales (ici, le bien). Pour Kant, le critère de légalité ne suffit pas, il ne rend pas compte des cas dans lesquels on pourrait avoir une action extérieurement conforme à la morale et à la loi, mais pas intérieurement. On retrouve ici une distinction entre droit et morale, entre légalité des actions et moralité des actions. On pourrait très bien ne pas tuer par peur d’aller en prison, donc par intérêt. On peut porter secours à son prochain non pour faire le bien mais pour la gloire ou par crainte : être reconnu comme un héros, avoir peur d’être accusé pour non-assistance à personne en danger. Ici, il faut traiter autrui comme soi-même, cela veut dire qu’il ne faut pas prendre autrui comme un moyen, comme quelque chose d’utile à soi mais comme une fin : on agit pour autrui, pour son bien et pas pour nous servir nous. On voit bien, à travers ces exemples, en quoi le critère de la conformité avec ce qui est bien ne suffit pas à rendre notre action morale : une action peut en effet avoir l’apparence extérieure de la moralité, mais pas intérieurement. Il faut avoir l’intention d’agir par devoir. Ce qui importe ici est la pureté de l’intention, la conformité intérieure à la règle morale, et non seulement extérieure. Une action accomplie par devoir tire sa valeur morale, non pas du but qui doit être atteint par elle, mais de la maxime d’après laquelle elle est décidée. Agir par pur devoir consiste alors à se conduire uniquement d’après une maxime et sans égard à aucun des objets de la faculté de désirer. Pour conclure, Il faut affronter le regard des autres plutôt que de le craindre, car le regard de l'autre est omniprésent, qu'on le veuille ou non. Autrui porte une critique sur nous, cependant celle-ci n'est pas toujours négative et peut aussi nous aider à nous construire. Il faut accepter et passer au-delà du jugement d'autrui ; ce qui revient à se battre pour la reconnaissance de sa propre conscience comprise comme individualité. Autrui est à la fois celui dont le regard me réifie tout en restant cet autre qui me constitue tout entier. La relation entre moi et autrui ne se résume pas uniquement à la crainte, à la peur, mais elle est également basée sur un sentiment moral, universel qui est le respect car autrui constitue l'épaisseur et la richesse de mon monde, qui est aussi le sien. Ce qui frappe lorsqu’on considère le genre humain, c’est à la fois l’universalité de ses caractères (légitime prétention à la reconnaissance d’une égale dignité) et l’extrême diversité des cultures qu’il recouvre (diversité des mœurs, des pratiques, des religions, etc.). L’histoire des hommes est traversée par cette douloureuse contradiction entre l’exigence éthique de la reconnaissance d’une unité du genre humain et le droit à la différence.

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