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Pourquoi le retour des mythes ?

Publié le 18/09/2018

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mythes

 

Le retour des mythes antiques constitue l'un des faits majeurs de l'histoire du théâtre français dans la première moitié du xxe siècle. Il convient d'autant plus de l'expliquer que le phénomène cesse après 1950. L'actualité politque des année 1920-1945, la capacité des mythes à susciter la réflexion et l'émotion tragique, enfin la facilité avec laquelle ils appellent le merveilleux poétique en sont les principales raisons.

LE MYTHE,

 

ÉCHO DE L'ACTUALITÉ

 

Il n'est pas indifférent que ce retour des mythes antiques se produise durant l'entre-deux-guerres et pendant l'Occupation. L'espoir d'une paix enfin durable que soulève la victoire de 1918 s'amenuise à mesure que s'installent en Europe des dictatures fascistes. En Italie, Mussolini accède au pouvoir en 1929; Hitler devient le maître de l'Allemagne en 1933. L'«axe Rome-Berlin», en 1936, consacre l'alliance officielle des deux pays. La même année éclate la guerre civile d'Espagne, opposant les républicains aux troupes du général Franco, soutenu par Hitler et Mussolini. L'après-guerre de 1918 ressemble de plus en plus à un avantguerre.

mythes

« nées de l'actualité.

Les dramaturges s'en servent comme des paraboles1 histori que s : à travers la fable millénair e transparaissent les inqu iétudes du présent.

La guerre de Troie n'aur a pas lieu : en dépit de ce titre, chacun sait depuis Homèr e2, et Gir audoux le premier, que la gue rre de Troie a eu lieu.

Mais par ce titre provocate ur, Gir audoux dit ses espoir s et ses appréhe nsions.

Il ve ut en cor e croir e à la pos sibil ité de con jurer le conflit qui me nace.

Mais il y croit à peine, comme le prouve le dénouement de la pièce3.

L'avant-guerre de Troie évoq ue l' avant-guerre de 1940.

Le mythe fonctionne comme un signal d'alarme.

Le choix du mythe d'Électre obéit à un e intention simi­ lair e.

Gir audoux s'interroge.

Faut-il sauver la paix à tout prix, comme le suggère Égisthe, quitte à remettre à plus tard - c' est-à-d ire peut-être à jamais -la défense des opprimés et le règne de la justice ? Ou convie nt-il, comme le préco nise É lectre, de faire triompher la jus tice, quitte à laisser détruire Argos4 ? En 1937, la question cesse d'être abstraite.

Le n1yt he coiTIITie n11asque pour dé jouer la censur e 2 septembre 1939 : déclaration de guerre de l'Ang leterre et de la France à l'Allemagne nazie; mai 1940 : la France est env ahie et occupée.

Le pire s'est ré alisé.

Le temps n'est plu s au x interrogations, mais à la lut te contre l'occupant.

To utefois, comment faire quand la publ ication de tout li vre et la création de tout spectacle doivent obtenir l'a uto­ risation préalable de la censur e allemande ? Appeler ouver­ tement à la résistance, c'est au minimum encourir le risque de l'interdic tion.

Le mythe apparaît alors comme un moyen de déjouer la ce nsur e.

Parce qu'il renvoie par définition à des temps an ciens, il semble intemporel, désuet et sans rapport avec 1.

Une parabole est un récit qui fait image.

Elle illustre sous la forme d'une fable une situation, une idée, un comportement.

2.

Homèr e décrit précisément dans 1'1/iade le siège et la chute de Tr oie; voir aussi p.

18, note 4.

3.

«La parole est au poète grec >>, c'est-è-dire è Homèr e et è 1'1/i ade, dit Cassandre è la fin de la pièce.

4.

Pour plus de détails, voir chap itre 10, «L 'absu rde>>, p.

90.. »

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