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Phèdre, Jean Racine, Acte II scène 5 : Vers 634 - 711 (commentaire)

Publié le 04/04/2011

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Dans un second temps, Phèdre fait preuve d'une certaine grandeur, notamment par la distance lucide qu'elle adopte par rapport à elle-même, dans un souci d'objectivité. En effet, dès le vers 672, elle dresse un bilan de la situation comme l‘introduisent l'interjection « Eh bien ! « et la conjonction de coordination « donc « ; ainsi elle prend du recul. Ce détachement est confirmé par le passage à la troisième personne du vers 672 où elle se désigne par « Phèdre « et par l'emplacement de ce nom à la césure. 

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« Phèdre se qualifie elle-même par la périphrase « ce monstre affreux », ce qui montre qu'elle ne se sent plus digne dustatut humain.

Elle met en avant sa morale sévère par l'oxymore « supplice si doux » au vers 708 qui atteste querien ne saura être à la hauteur de son crime moral.

Cette tirade rend donc compte des valeurs nobles de Phèdre quitient à respecter la morale et ne se laisse pas d'autre échappatoire que de mourir. Ainsi l'héroïne conserve sa dignité et porte un regard critique sur elle-même ; elle condamne fortement la passion quil'anime.

Si elle se sent en faute, elle laisse cependant entrevoir qu'elle est le « jouet » de la fatalité. Phèdre apparaît enfin comme un personnage tragique qui n'est pas libre de ses actes.

Elle dénonce d'abord lesdieux, qui lui auraient imposé cet amour.

En effet, la responsabilité des divinités est mise en avant par lecomplément du nom « vengeances célestes » : Phèdre doit payer pour le passé de ses ancêtres.

Elle répète legroupe nominal « les dieux…ces dieux…ces dieux » dont la position en début de vers puis à la césure, et latransposition de l'article défini au déterminant démonstratif expriment sa colère et sa passivité sur la situation :Phèdre se considère comme la marionnette des dieux.

En venant vers Hippolyte, elle avait l'intention de lui demanderde ne point haïr son fils mais ce n'est pas ce qu'elle fait comme l'indique la tournure d'intention au vers 695 « je tevenais…faibles projets », son champ d'action est limité.

Elle emploie notamment la tournure restrictive « je ne t'aipas pu parler que » au vers 698.

Non seulement Phèdre ne contrôle pas ses actions mais encore les dieux lamanipulent.

La métaphore du vers 680 « ont allumé ce feux fatal » reflète le feu qui dévore et détruit, et cette idéeest appuyée par l'allitération en [f] qui suggère la consumation intérieure.

De plus, le « feu fatal » illustre l'amourque Phèdre éprouve pour Hippolyte, voulu par la destinée comme le laisse deviner l'étymologie du mot fatal, en latin« fatum » : destin.

Elle est donc sous l'empire d'une passion destructrice contre laquelle elle ne peut lutter.

Phèdrese révolte contre sa situation passive d' « objet infortuné » des dieux.Pour finir, le combat de Phèdre est perdu d'avance.

En effet, elle dénonce un rapport de force disproportionné auxvers 681/682 par les termes antithétiques « gloire cruelle » et « faible mortelle ».

Cette disproportion est renforcéepar l'opposition « ces dieux // mortelle », il est impossible pour Phèdre de lutter contre la puissance divine.

Tout lessépare : les dieux sont tout puissants alors qu'elle n'est qu'une faible mortelle.

La situation inextricable estnotamment mise en avant par le parallélisme de construction, le rythme irrégulier et les antithèses du vers 688 « tume haïssais plus, je ne t'aimais pas moins ».

Par ailleurs, Phèdre présente son amour toujours croissant avec l'emploide l'adverbe de quantité « encor ».

Le groupe nominal « nouveaux charmes » qui vient du latin « carmen », ajouteune dimension magique à la situation, insurmontable pour une « mortelle ».

Enfin Phèdre, fille de Minos et Pasiphaéporte la malédiction en elle, « dans mon sang…tout mon sang » comme en témoignent les adjectifs possessifs et ledéterminant « tout » à valeur absolu.

Elle est donc maudite et doit payer pour la faute de ses ancêtres. Pour conclure, Racine a mis en scène un personnage tragique passionnant qui attise la terreur et la compassion duspectateur.

Il a suscité notre intérêt en décrivant non seulement la violence de la passion et ses méfaits mais aussila capacité de Phèdre à rester objective en se condamnant.

Cependant Racine expose le rôle de la fatalité, ce quiplace le spectateur en témoin d'un combat inégal.

Ainsi, il éprouve de la pitié pour Phèdre qui ne peut se défaire desa passion dévastatrice que par la mort.

Le dramaturge cherche donc à mettre en évidence les ravages de lapassion ; la tragédie a une visée moralisatrice et la richesse des sentiments évoqués donne à l'œuvre une valeurprofondément humaine.. »

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