Pour être raisonnable, devrions nous faire taire nos désirs?
Publié le 03/03/2005
Extrait du document
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Socrate esquisse là un idéal moral classique, que l'on retrouve dans toute l'histoire de la pensée occidentale.
Lebonheur est bien le fruit d'une satisfaction des désirs ; mais pour y parvenir, le sage sait qu'il est plus sûr de limiterses désirs, puisque plusieurs sont nuisibles ou source d'inquiétude.
Ce thème est présent en particulier :
- chez les épicuriens : le bonheur, plaisir stable, exclut la satisfaction, trop incertaine, des désirs ni naturels ninécessaires (ambition, vanité) et des désirs naturels mais non nécessaire (bien manger, désirs sexuels, etc.) ; lesage vise l'apaisement des désirs naturels et nécessaires, son hédonisme est ascétique ;
Aussi Epicure distingue-t-il :• Les désirs naturels et nécessaires au bien-être du corps et de l'âme, quis'appliquent aux objets susceptibles de supprimer la douleur, tels la boissonqui étanche la soif ou la pain qui calme la faim.• Les désirs naturels et non nécessaires.
Les objets de ces derniers sont, parexemple, les mets délicats qui permettent de varier le plaisir.
Ces désirs nesont naturels que pour autant qu'ils ne se transforment pas en débauche.Ainsi, le désir sexuel est naturel à condition qu'il ne devienne pas « un appétitviolent des plaisirs sexuels assorti de fureur et de tourment ».• Les désirs ni naturels ni nécessaires qu'il faut refouler si l'on veut connaîtrela sérénité (désirs de gloire, de richesse, d'immortalité, ambition...).
Ces désirssont de « vaines opinions » qui trouvent leur origine dans la crainte de lamort, notamment.
Epicure nous invite donc à mettre fin à tous les plaisirs non naturels et nonnécessaires qui occasionnent le plus souvent des désagréments, desfrustrations, qui freinent l'accès à l'ataraxie (absence de trouble ou dedouleur).
- chez les stoïciens : « Ne demande pas, conseille Épictète, que les chosesarrives comme tu les désires, mais désire qu'elles arrivent comme ellesarrivent, et tu couleras des jours heureux» (Pensées, XIV).
La source de tout bien et de tout mal que nous pouvons éprouver réside strictement dans notre propre volonté.
Nulautre que soi n'est maître de ce qui nous importe réellement, et nous n'avons pas à nous soucier des choses surlesquelles nous n'avons aucune prise et où d'autres sont les maîtres.
Les obstacles ou les contraintes que nousrencontrons sont hors de nous, tandis qu'en nous résident certaines choses, qui nous sont absolument propres,libres de toute contrainte et de tout obstacle, et sur lesquelles nul ne peut agir.
Il s'agit dès lors de veiller sur cebien propre, et de ne pas désirer celui des autres ; d'être fidèle et constant à soi-même, ce que nul ne peut nousempêcher de faire.
Si chacun est ainsi l'artisan de son propre bonheur, chacun est aussi l'artisan de son propremalheur en s'échappant de soi-même et en abandonnant son bien propre, pour tenter de posséder le bien d'autrui.Le malheur réside donc dans l'hétéronomie : lorsque nous recevons de l'extérieur une loi à laquelle nous obéissons etnous soumettons.
Nul ne nous oblige à croire ce que l'on peut dire de nous, en bien ou en mal : car dans un casnous devenons dépendants de la versatilité du jugement d'autrui, dans l'autre nous finissons par donner plus deraison à autrui qu'à nous-mêmes.
Enfin, à l'égard des opinions communes comme des théories des philosophes, oumême de nos propres opinions, il faut savoir garder une distance identique à celle qui est requise dans l'habileté dujeu, c'est-à-dire qu'il faut savoir cesser de jouer en temps voulu.
Dans toutes les affaires importantes de la vie, nulne nous oblige en effet que notre propre volonté.
Ainsi le sage, être raisonnable par excellence, souhaiterait-il satisfaire tousses désirs, mais en désirant le moins possible.
Aux troubles de la jouissance,à ses ambiguïtés, il préfère l'absence de passion, un bonheur sans inquiétude, l'ataraxie.
3.
La raison ne saurait ni approuver ni condamner les désirs.
»
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