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RACINE ; Phèdre: La confession de Phèdre à OEnone (Acte 1, SC. 3, v. 269-306)

Publié le 30/07/2014

Extrait du document

racine

La confession

de Phèdre à OEnone

(Acte 1, SC. 3, v. 269-306)

(SITUATION)

À ce moment de la pièce, nos informations se résument à ceci : le

roi Thésée, époux de Phèdre et père d'Hippolyte, est absent

depuis une longue période. Son fils, amoureux malgré lui d'Aricie

la captive et transgressant en cela l'interdiction paternelle, veut

partir pour le rechercher, et surtout pour fuir un amour qu'il se

reproche. Phèdre de son côté a été présentée comme une femme

hostile à son beau-fils et minée par un mal mystérieux.

Première apparition de Phèdre (acte 1, scène 3). Phèdre

entre en scène épuisée et chancelante. Cédant aux interrogations

pressantes d'OEnone, sa nourrice, sa confidente dévouée, elle vient

de lui avouer une passion coupable pour Hippolyte ; elle aborde

alors le récit des premiers moments de son amour.

L'expression redoublée de la passion. La lecture des

répliques qui précèdent notre TEXTE 2 (tout le début de la scène 3,

v. 153 à 268) montre que l'histoire de Phèdre a trouvé son reflet

anticipé dans celle d'Hippolyte. On remarque en effet une série de

concordances :

- Même relation affective entre les personnages, celle d'Hippolyte

avec son précepteur, celle de Phèdre avec sa nourrice ; dans les

deux cas règne un rapport d'intimité qui autorise les confidences.

- Même demande d'éclaircissements, d'abord de la part de

Théramène à Hippolyte sur son départ, ensuite, de façon plus

insistante, d'OEnone à Phèdre sur les motifs de son désespoir.

- Même réticence chez l'un et l'autre à exposer le fond de ses sentiments

; chez Phèdre surtout, la retenue de la parole est poussée

à un point extrême.

- Et même dévoilement de la passion, indirect pour Hippolyte,

complet et précis pour Phèdre.

Le choix du point de départ. La tragédie commence alors

que la passion de l'héroïne a déjà connu l'essentiel de son développement

dans le temps ; elle semble même toucher à son épilogue

pour Phèdre qui dit son désir de mourir. Racine n'est pas le

peintre des longues évolutions, il inaugure l'action non pas en

remontant à sa source, la naissance de l'amour, qui fait l'objet d'un

récit rétrospectif, mais en saisissant le drame au moment où il est

prêt à se nouer ; il en raconte alors le paroxysme et les péripéties

aiguës, qui conduisent au dénouement.

(TEXTE)

PHÈDRE

Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d'Égée

270 Sous les lois de l'hymen je m'étais engagée,

Mon repos, mon bonheur semblait être affermi,

Athènes me montra mon superbe ennemi.

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;

Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue;

275 Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;

Je sentis tout mon corps et transir et brûler;

Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,

D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.

Par des voeux assidus je crus les détourner :

280 Je lui bâtis un temple et pris soin de l'orner ;

De victimes moi-même à toute heure entourée,

Je cherchais dans leur flanc ma raison égarée.

D'un incurable amour remèdes impuissants l

En vain sur les autels ma main brûlait l'encens:

285 Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse,

J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,

Même aux pieds des autels que je faisais fumer,

J'offrais tout à ce Dieu que je n'osais nommer.

Je l'évitais partout. Ô comble de misère!

290 Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.

Contre moi-même enfin j'osai me révolter:

J'excitai mon courage à le persécuter.

Pour bannir l'ennemi dont j'étais idolâtre,

J'affectai les chagrins d'une injuste marâtre ;

295 Je pressai son exil, et mes cris éternels

L'arrachèrent du sein et des bras paternels.

Je respirais, OEnone ; et depuis son absence,

Mes jours moins agités coulaient dans l'innocence.

Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,

300 De son fatal hymen je cultivais les fruits.

Vaines précautions ! Cruelle destinée !

Par mon époux lui-même à Trézène amenée,

J'ai revu l'ennemi que j'avais éloigné:

Ma blessure trop vive aussitôt a saigné,

305 Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée :

C'est Vénus toute entière à sa proie attachée.

(THÈMES DE COMMENTAIRE)

L'enjeu du texte

L'auteur poursuit ici un objectif d'analyse psychologique: il entreprend

d'évoquer l'histoire d'une passion qui soit aussi vraisemblable

que possible, qui reproduise la figure habituelle d'un cheminement

affectif. Ces mouvements ordinaires du coeur,

remémorés selon la chronologie, apportent une sorte de schéma

explicatif en quatre phases exemplaires : la rencontre, la lutte, l' éloignement,

la rechute.

Des rapprochements avec deux autres oeuvres

racine

« -Même réticence chez l'un et l'autre à exposer le fond de ses sen­ timents ; chez Phèdre surtout, la retenue de la parole est poussée à un point extrême.

- Et même dévoilement de la passion, indirect pour Hippolyte, complet et précis pour Phèdre.

Le choix du point de départ.

La tragédie commence alors que la passion de l'héroïne a déjà connu l'essentiel de son déve­ loppement dans le temps ; elle semble même toucher à son épi­ logue pour Phèdre qui dit son désir de mourir.

Racine n'est pas le peintre des longues évolutions, il inaugure l'action non pas en remontant à sa source, la naissance de l'amour, qui fait l'objet d'un récit rétrospectif, mais en saisissant le drame au moment où il est prêt à se nouer ; il en raconte alors le paroxysme et les péripéties aiguës, qui conduisent au dénouement.

(TEXTE) PHÈDRE Mon mal vient de plus loin.

À peine au fils d'Égée 270 Sous les lois de l'hymen je m'étais engagée, Mon repos, mon bonheur semblait être affermi, Athènes me montra mon superbe ennemi.

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ; Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue; 275 Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ; Je sentis tout mon corps et transir et brûler; Je reconnus Vénus et ses feux redoutables, D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.

Par des vœux assidus je crus les détourner : 280 Je lui bâtis un temple et pris soin de l'orner ; De victimes moi-même à toute heure entourée, Je cherchais dans leur flanc ma raison égarée.

D'un incurable amour remèdes impuissants l En vain sur les autels ma main brûlait l'encens: 285 Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse, J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,. »

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