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A quoi bon penser ?

Publié le 14/09/2011

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Cette question de l’utilité de l’activité intellectuelle désintéressée pourrait être transférée dans d’autres champs de l’activité humaine. Il n’est pas de doute qu’il est indispensable à la survie de l’espèce et sa propre survie d’exercer une activité économique dont le résultat est l’obtention d’un gain susceptible d’être converti en éléments matériels répondant à ses besoins de survie et aux besoins de la communauté humaine. Il convient d’aborder la pensée pure, « toutes choses étant égales par ailleurs «, pour emprunter la formule des économistes, c'est-à-dire en faisant abstraction du reste. Dans « la république «, Platon délimitait par la sociologie la problématique des utilités. Des trois classes qui composaient la cité, celle des gens d’affaires, des auxiliaires et la classe délibérante, le goût de la philosophie était réservé aux hommes qui avaient avec elle un digne commerce.

« réflexion consiste effectivement en rechercher en quoi il y a du bon à penser parce que c’est ce qui donne à croire,et en quoi nous avons besoin de croyances afin de mieux vivre.

Cette réflexion, j’en perçois la suite du déroulement,car il ne suffit pas de croire pour penser valablement.

Notre croyance peut nous conduire au désespoir de l’infini,lorsque l’imaginaire nous a détachés des « nécessaires contingences matérielles ».

Kierkegaard en avait ressenti letrouble, tout en étant conscient du fait que l’implication d’une subjectivité ontologique détermine le statutphilosophique de toute cogitation. 4.

C’est donc en étant ce que je suis que je puis penser.

Et c’est ce qui m’appelle à être qui me donne à penser.Au-delà de cette conscience ontologique, il n’en demeure pas moins que la pensée satisfaisante met en jeu cetteattitude mentale spécifique à l’animal humain qui est la raison.

Que cette attitude soit le produit d’une aptitudebiologique n’a pas d’importance pour ce « travailleur du cerveau » qu’est le penseur, car si le cerveau est le supportvivant des réflexions, il n’est pas le seul, et la qualité des réflexions n’est pas seulement un processus biodégradableet rechargeable au gré des circonstances de fait.

Je tâcherai ici effectuer une sorte synthèse d’éléments obtenuspar mes lectures aléatoires, et mes écritures spontanées, autour de ces trois étapes successives, que l’on peutainsi. A – La croyance est une modalité de la penséeB – L’existence est la condition pour pouvoir penserC – Le raisonnement est nécessaire pour bien penser 5.

Ces trois angles de réflexion, à première vue, ne répondent directement pas à la question liminaire de « l’à quoibon penser » ? Ils tentent à première vue seulement de mettre en lumière le « comment » d’une penséesatisfaisante pour l’esprit, partant de l’hypothèse que la satisfaction spirituelle est bonne en soi.

Si la recherche dubonheur est le but d’une vie heureuse, l’activité spéculative de pensée pure en tant que telle n’apporte a prioriaucune certitude immédiate de l’acquisition du bonheur commun.

S’interroger sur l’utilité de la cogitation, c’est enfinale réfléchir sur l’essentiel de l’existence en soi et pour soi, dans le détachement des contingences matérielles,autant qu’il est possible, ou plus précisément dépasser les contingences matérielles pour obtenir des satisfactionsd’une nature différente.

Il serait aisé de simplifier cette réflexion en s’adonnant à de l’anthropologie pratique,autrement dit en intégrant la pensée dans un modèle culturaliste, telle cette théorie des médiations linguistiques decet ancien maître original.

Non point que cette vision, dont j’ai, comme de nombreux étudiants, subi l’influence, soitnégligeable, puisqu’elle est étayée sur une épistémologie de l’isomorphisme de toutes pratiques vivantes de laculture, mais elle m’était apparue, au fil du temps, quelque peu vaine dans la superbe de son rejet a priori de toutesles autres productions culturelles, et surtout dans son absence de référence claire et précise aux théoriespsychanalytiques dont elle empruntait la méthode, bien qu’elle eût été d’un probable secours en thérapeutique desmaladies du langage.

« L’à quoi bon penser » n’est pas l’apanage des professionnels en charge des anomalies de lapensée humaine, si tant est qu’une pensée puisse être normale, ou des travailleurs sociaux au sens large du terme(intermédiaires des services, éducateurs, etc.), même si ceux-ci sont certainement les mieux placés pour juger del’importance des fonctionnements et dysfonctionnements mentaux.

Il s’agit souvent de détecter les signes d’une« autre manifestation » des idées au-delà des pratiques conventionnelles de la conversation, partant de seséchecs, plus souvent subis que délibérés, de ses non-dits et de ses redites, afin de donner sens aux manifestationsordinaires du langage, et plus spécialement aux manifestations de sa décomposition. 6.

La critique moralisatrice de l’idéalisme contemplatif et des constructions intellectuelles pures et sophistiquées nesaurait être évitée.

A quoi bon penser une métaphysique dès lors que l’injustice sonne à votre porte ? N’y a-t-il pasmieux à faire ? Dans sa recherche d’une vie heureuse, Sénèque assumait cette contradiction dont le chargeaient lescyniques.

« Pourquoi celui-là est-il un adepte de la philosophie et vit-il dans une telle opulence ? Pourquoi dit-il lesrichesses matérielles méprisables et en a-t-il ? Il juge sa vie méprisable et pourtant il vit.

(…) Et si rien ne l’enempêche, il prolonge son existence et au sein d’une vieillesse avancée, il garde tranquillement sa verdeur ? » Laréponse de Sénèque est connue : « non animum illas sed in domum recipit, nec respuit possessas sed continet etmajorem virtuti suae materiam sumministrari vult », le sage n’aime pas les richesses, il les préfère ; il ne les accueillepas dans son cœur mais dans sa maison ; il ne rejette pas celles qu’ils possèdent, il les domine et veut qu’ellefournissent à sa vertu une plus ample matière » (De beata vita, XXI, 3).

L’idéal du sacrifice était absent de cettefaçon de penser dite « stoïcienne ».

Combien de raccourcis scolaires ont pu en décrire l’inverse dans descomparaisons succinctes entre épicurisme et stoïcisme ? Un jour viendra peut-être, où l’importance de la philosophieméritera plus qu’une dissertation de baccalauréat.

Car ce n’est certainement pas délibérément que le sage sedépouille de toute richesse matérielle, c’est parce qu’il y est contraint par les circonstances, et sa sagesse consisteà l’accepter sans crainte.

En se préparant au pire, le sage reçoit le meilleur.

Le stoïcisme n’est pas masochisme.

Lechristianisme est allé plus loin par une morale de la générosité du don de soi.

Comme si l’idéal de la sainteté prenaitles devants de la vertu la plus sage.

Quoiqu’il en soit, dans ces deux formes de sagesse, stoïcienne et chrétienne, lapensée demeure orientée vers le gouvernement de l’action.

Elle n’est pas purement réflexive.

La pensée n’a d’autrefinalité que l’agir mieux pour l’honnête homme, à défaut de réparer les dysfonctionnements mentaux des malheureux.Ce propos n’est pas de revenir sur les critiques de la généalogie des différentes morales, qui nous écarteraitconsidérablement dans une perspective historique qui n’est pas du ressort de cette réflexion. 7.

Cette question de l’utilité de l’activité intellectuelle désintéressée pourrait être transférée dans d’autres champsde l’activité humaine.

Il n’est pas de doute qu’il est indispensable à la survie de l’espèce et sa propre survied’exercer une activité économique dont le résultat est l’obtention d’un gain susceptible d’être converti en élémentsmatériels répondant à ses besoins de survie et aux besoins de la communauté humaine.

Il convient d’aborder lapensée pure, « toutes choses étant égales par ailleurs », pour emprunter la formule des économistes, c'est-à-dire. »

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