Alain: Politique et morale
Publié le 10/01/2004
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La problématique s'élabore à partir de la notion d'opinion publique. Celle-ci est-elle l'opinion de tous les citoyens? D'une majorité d'entre eux ? Quel est donc le "public" qui serait l'auteur d'une opinion générale ? Ce problème débouche, dans le dernier paragraphe, sur un autre, concernant directement la pratique du pouvoir politique. Qui gouverne ? Les gouvernants ou cette opinion publique dont personne n'est véritablement l'auteur ? On en vient même à se demander, avec ALAIN, si l'Etat peut être tenu pour une entité responsable. Ne risque-t-il pas toujours, au contraire de sombrer dans la folie de la "dictature d'opinion" ?

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Chacun agit ainsi, passivement, de bonne foi, et, ajoute ALAIN, par une "espèce de sagesse".
Il est en effetraisonnable de penser que, concernant les affaires publiques, l'individu seul ne soit pas le plus avisé, ni le plusclairvoyant.
ARISTOTE notait déjà qu'en matière politique, l'avis collectif était plus raisonnable que l'avis d'un seul, fût-il unexpert.
C'est donc fort raisonnablement que chacun se laisse imposer une pensée dont il n'est paspersonnellement l'auteur.
2 - Une illustration de l'analyse précédente.
Le second paragraphe illustre, sur le mode descriptif, le contenu conceptuel du premier, en nous montrant unpays entier consultant cette fantomatique opinion publique.
ALAIN, au passage, laisse entendre que la presse nourrit en grande partie cette illusion qu'est l'opinionpublique.Ainsi, tous interrogent le pays, c'est-à-dire personne, et ne font pas confiance en leur jugement.
3 - L'enjeu politique d'une telle description.
Le dernier paragraphe est le plus inquiétant, puisqu'il nous brosse le tableau d'un état fantôme, gouvernéfollement par l'opinion publique.
En effet, les gouvernants eux-mêmes, en tant qu'individus, se tournent aussi vers l'opinion publique.
Dans cejeu de miroir entre le public anonyme et les gouvernants, les plus folles conceptions peuvent naître, comme ladécision de faire la guerre, sans que personne puisse en répondre.
Le paradoxe final est effrayant : l'Etat peut agir follement, sans que personne individuellement n'ait cesséd'être raisonnable.
ALAIN conclut fortement sur ce qui lui semble être la cause d'un si grand mal :le manque de fermeté ; l'absence ou l'insuffisance de courage qu'il faut pour penser et juger par soi-même entoute circonstance.
B - UNE REFLEXION CRITIQUE SUR LE POUVOIR EN DEMOCRATIE
1 - La responsabilité du citoyen
Ce texte ne manque pas d'intéresser le citoyen que nous sommes.
Il nous rappelle d'abord tous à notreresponsabilité individuelle : même en politique, surtout en politique, ne renonçons jamais à notre propre facultéde juger.
Dans le cas inverse, l'Etat se retrouve sans rênes, pris dans la logique folle de la "dictature d'opinion".
Point de dictature plus douce : car chacun consent à s'en remettre à elle ; pas de plus dangereuse aussi, carce suivisme est en politique le meilleur allié des projets les plus aberrants, voire, des plus barbares.
2 - Un problème crucial pour la démocratie
Le problème intéresse au plus haut point une réflexion sur la démocratie.
Ce type de pouvoir doit en effet consulter le peuple, et recourir en conséquence au débat public.
Mais, en même temps, comment faire pour que cette consultation ne donne pas lieu à la dérive pointée parALAIN : un gouvernement gouverné par l'opinion publique ?
ALAIN ne donne aucune réponse institutionnelle.
Il rappelle chacun à sa responsabilité de citoyen, la premièreétant de penser par soi-même.
Le jugement est la condition de la démocratie.
Dés qu'on y renonce, elle meurt.
V - QUELQUES RÉFÉRENCES POSSIBLES
ARISTOTE, La politique, Livre III, chapitre 11 et 13 :ARISTOTE y montre la supériorité du jugement collectif sur le jugement individuel..
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