ART ET BEAUTÉ : La question de l’esthétique.
Publié le 24/01/2004
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ART ET BEAUTÉ : La question de l’esthétique.
Pourquoi parler ici d’ « esthétique « ? Le mot vient du grec « aisthèsis « signifiant sensation, appréhension sensible, par les sens.
Or, précisément la beauté est affaire de sensibilité, d’émotions, de goût. L’esthétique concerne donc la façon dont la sensibilité humaine est affectée par des objets, fussent-ils naturels (un coucher de soleil) ou crées (une oeuvre). Elle ne considère pas l’objet dans sa réalité objective (rationnelle), mais la subjectivité en rapport avec lui. Qu’est-ce qui me fait dire qu’une oeuvre est belle ?
Lorsque je dis « c’est beau «, je prononce un jugement de valeur. Ce jugement de goût n’est pas un jugement de connaissance (il n’est pas fondé en objectivité mais en subjectivité). Ce jugement ne détermine pas son objet, il ne m’apprend rien sur lui. Il me renseigne seulement sur le sujet - en rapport avec l’objet - qui le prononce. Il exprime le plaisir esthétique que j’éprouve à contempler tel objet. En disant « c’est beau «, je dis que ma perception est heureuse, que « cela me plaît «. Ce jugement de goût est dit « réfléchissant « car il concerne en priorité le fonctionnement de l’esprit du sujet. C’est MOI qui juge beau ce coucher de soleil : la beauté n’est pas contenue DANS l’objet, je la lui attribue. Je la qualifie de « belle « ou « laide « d’ailleurs.
PROBLÉMATIQUE :
Le jugement de goût est-il seulement subjectif comme nous venons de l’expliquer, ou est-il fondé sur l’objet ?
Notons que le mot « goût « se met à signifier la faculté de juger le beau à la fin du XVIIe siècle. Auparavant ce terme ne désignait que l’un des cinq sens.
Le paradoxe est le suivant : nous disons « C’est beau «, comme si la beauté était dans l’objet, et nous ajoutons souvent : « à chacun ses goûts «, comme si la beauté n’était que dans le sujet individuel.
Il faudra examiner deux questions :
· La beauté est-elle dans l’objet ?
· Si elle ne l’est pas, le jugement de goût peut-il être universel ?

«
A) Les critères objectifs du beau.
Les goûts sont -ils d'une nature telle qu'aucune discussion a fortiori aucun accord sur eux n'est
possible ? Les goûts sont -ils, dans leur subjectivité intrinsèque, indiscutables ?
De fait les jug ements de goût sont divers, et il semble impossible de les ramener à l’unité.
L’un aime
le jazz, l’autre ne jure que par le classique.
Notons que le goût de l’un est le plus souvent le dégoût
de l’autre.
« Des goûts et des couleurs, on ne discute pas » dit l’adage.
Or, force est de constater qu’il
n’est rien que l’on discute davantage…
Mais, considérons les choses sous un autre angle.
Le consensus n’est -il pas lui aussi étonnant ? Après
tout, n’y a -t -il pas moins de désaccord sur la grandeur de Sophocle, su r la beauté d’un ciel étoilé que
sur la théorie du big -bang ? Tous les connaisseurs s’accordent sur la grandeur de Mozart et le
classicisme laborieux de Salieri (http://fr.wikipedia.org/wiki/Anto nio_Salieri
).
Cet accord surprenant
des esprits n’est -il pas l’indice de l’objectivité du
beau ? Nous pouvons nous accorder donc que la
beauté est quelque chose que nous saisissons
dans l’objet.
Il revient à l’esthétique de la Renaissance et du
XVIIe, appelée classique d’avoir dégagé les règles
de production du bel objet.
Trois principes fondent cette esthétique
classique * :
1) Le rationalisme ( Descartes) = suprématie de la raison.
Peindre le beau, c’est peindre le vrai.
2) Imitation de la nat ure = formes parfaites des corps par exemple.
3) Imitation de l’Antiquité.
L’inspiration en est platonicienne.
S’inspirant de la théorie platonicienne du beau **, l’esthétique
classique considère le beau comme une réalité qui existe par soi.
Le beau existe « en soi » (Voir les
Idée s de Beau et de Vrai dans l’allégorie de la Caverne , Livre VII de La « République » ), et une fleur
ou une oe uvre d’art sont belles parce que la beauté est présente en elles.
Elles ne sont pas belles
pour nous mais en elles -mêm es.
Elles ne sont pas belles parce que nous les trouvons belles ; nous les
trouvons belles parce qu’elles sont belles.
Quelles sont alors les propriétés de ce qui est beau ? Là
encore la conception platonicienne du beau inspire la réponse à cette question …/…
*Esthétique classique en France de 1660 à 1690 = Corneille, Racine, Molière, La Fontaine, Boileau,
Bossuet, madame de Sévigné, Nicolas Poussin (cf.
ci -contre : L'Enlèvement des Sabines, musée du
Louvre), l’architecte Mansart, etc.)
** (attention : absolument pas de sa critique de l’art bien que celle -ci en raison de son ambiguïté ait
permis la réconciliation de l’art et du beau opé rée par l’esthétique classique)..
»
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