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Bergson et l'intelligence

Publié le 11/01/2004

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bergson
Notre intelligence, telle que l'évolution de la vie l'a modelée, a pour fonction essentielle d'éclairer notre conduite, de préparer notre action sur les choses, de prévoir, pour une situation donnée, les événements favorables ou défavorables qui pourront s'ensuivre. Elle isole donc instinctivement, dans une situation, ce qui ressemble au déjà connu : elle cherche le même, afin de pouvoir appliquer son principe que "le même produit le même". En cela consiste la prévision de l'avenir par le sens commun. La science porte cette opération au plus haut degré possible d'exactitude et de précision, mais elle n'en altère pas le caractère essentiel. Comme la connaissance usuelle, la science ne retient des choses que l'aspect "répétition". Si le tout est original, elle s'arrange pour l'analyser en éléments ou en aspects qui soient "à peu près" la reproduction du passé. Elle ne peut opérer que sur ce qui est censé se répéter, c'est-à-dire sur ce qui est soustrait, par hypothèse, à l'action de la durée. Ce qu'il y a d'irréductible et d'irréversible dans les moments successifs d'une histoire lui échappe. Il faut, pour se représenter cette irréductibilité et cette irréversibilité, rompre avec des habitudes scientifiques qui répondent aux exigences fondamentales de la pensée, faire violence à l'esprit, remonter la pente naturelle de l'intelligence. Mais là est précisément le rôle de la philosophie.

Ce texte de Bergson proposé au candidat se situe dans une réflexion sur le statut de la science.    Il a pour thème de dégager avec précision les raisons qui font de ce statut un statut relatif.    Son problème est le suivant : qu'est- ce qui, dans la nature du réel , est insaisissable pour la démarche scientifique, et quelles restrictions ou limites en résulte-t-il quant à la nature de cette connaissance ?    La thèse qui répond à ce problème affirme le caractère "original", et donc unique, de toute donnée réelle soumise à "l'action de la durée ".    La science, issue de notre intelligence, n'atteint que la surface, ou ce qui est toujours "le même" , dans le réel.    L'enjeu du texte est de cerner le sens qu'il faut donner à la relativité de la science : vraie dans son ordre, elle appelle cependant nécessairement, comme son complément, la philosophie, seule apte à dépasser les fonctions limitées de l'intelligence pour atteindre la durée profonde du réel.

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« Dans le premier moment, qui va jusqu'à "la prévision de l'avenir par le sens commun", il importait de relever le termede "fonction" : C'est en effet le terme que Bergson attribue à la notion principale, celle "d'intelligence", et c'est aussi ce terme quisynthétise toute la suite de ce premier moment. Quelle est cette fonction ? : "Prévoir" (idée répétée dans le terme de "prévision"). Non pas prévoir l'avenir en général, mais en fonction de l'utilité que l'homme peut en retirer ("favorables oudéfavorables"). Cette prévision n'est pas contemplative, mais pragmatique : elle est essentiellement liée à notre "action", qu'ellerend possible, en l'"éclairant". L'action, soucieuse d'efficacité et prise par l'urgence, impose à l'esprit une tournure simplificatrice, qui caractérisel'intelligence : saisir, dans la diversité troublante des situations nouvelles, l'élément commun par quoi ellesressemblent aux précédentes : connaître le nouveau par le "déjà connu". Le deuxième moment du texte (jusqu'à l'"action de la durée") montre les limites, et donc la relativité de la science. Le terme essentiel est souligné : la science s'en tient à la "répétition", ce qui permet de comprendre, à l'opposé, quela "durée", nature profonde des "choses", ne se répète jamais. La durée est "histoire" : série continue d'évènements singuliers, irréductibles les uns aux autres. Le troisième moment décrit la violence qu'il faut imposer à l'esprit, réduit à l'intelligence, pour l'élever à la saisie de ladurée. Le travail de la philosophie est donc double.

D'abord réformer l'esprit en luttant contre les habitudes qu'il a prisesdans son application scientifique, ensuite, saisir la durée même. Le premier aspect est critique : faire prendre conscience à la science qu'elle est un produit de la vie, et de sonévolution temporelle, pour faire sentir à l'esprit les racines qu'il a dans la durée universelle. Le second aspect est positif : c'est la mise en oeuvre de l'acte proprement philosophique, qui n'est pas nommé dansle texte, et que Bergson appelle intuition . III - REFERENCES UTILES A l'opposé de l'interprétation pragmatiste de la science, on pouvait convoquer la Critique de la Raison Pure de Kant,où les concepts de la connaissance sont définis comme des propriétés de l'entendement, qui ne peuvent pas êtredérivés de l'expérience ("déduction transcendantale des catégories"). IV - LES FAUSSES PISTES Faire de la connaissance scientifique la seule connaissance possible, ou bien considérer que Bergson invalide lascience au profit de la philosophie, étaient deux erreurs symétriques qu'il fallait éviter. BERGSON (Henri-Louis) .

Né et mort à Paris (1859-1941). Il fit ses études au lycée Condorcet et à l'École normale supérieure.

Il fut reçu à l'agrégation de philosophie en 1881.Il fut professeur de philosophie aux lycées d'Angers et de Clermont-Ferrand.

Docteur ès lettres en 1881, il enseignasuccessivement, à Paris, au collège Rollin, puis au lycée Henri IV, et, à partir de 1898, à l'École normale.

Titulaire,. »

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