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Corrigé de l'explication de texte de Baruch SPINOZA. Traité théologico-politique

Publié le 06/11/2011

Extrait du document

spinoza

« On pense que l’esclave est celui qui agit par commandement et l’homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n’est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c’est le pire esclavage, et la liberté n’est qu’à celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison. Quant à l’action par commandement, c’est-à-dire l’obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur- le-champ un esclavage, c’est la raison déterminante de l’action qui le fait. Si la fin de l’action n’est pas l’utilité de l’agent lui-même, mais de celui qui commande, alors l’agent est un esclave, inutile à lui-même ; au contraire, dans un Etat et sous un commandement pour lesquels la loi suprême est le salut de tout le peuple, non de celui qui commande, celui qui obéit en tout au souverain ne doit pas être dit un esclave inutile à lui-même, mais un sujet. Ainsi cet Etat est le plus libre, dont les lois sont fondées en droite Raison, car dans cet Etat chacun, dès qu’il le veut, peut être libre, c’est-à-dire vivre de son entier consentement sous la conduite de la Raison «.

Baruch SPINOZA. Traité théologico-politique.

Eléments d'introduction

·         Thème: la liberté

·         Thèmes associés: la raison, l'Etat.

·         Thèse: La liberté consiste à obéir à une loi raisonnable. Elle est tout entière dans l'autonomie de la raison qui obéit volontairement à sa propre loi et non dans la licence des passions.

·         Problème: En quel sens peut-on à la fois obéir et être libre ? La liberté ne suppose-t-elle pas, comme on le croit habituellement,  une indépendance absolue par rapport à toute autorité qui viendrait la limiter ? Comment peut-on donc soutenir que la liberté nécessite d'obéir à un ordre alors qu'on pense plutôt que la liberté ne doit pas avoir de limites ?

·         Plan

spinoza

« 2 spontanées de sa nature animale qui visent leur satisfaction en vue d'un plaisir sensuel immédiat, est le contraire même de la liberté et le "pire esclavage"? Il y a deux raisons à cette affirmation.

La première tient au fait que l'homme qui ne cultive que le plaisir par la satisfaction continuelle de ses désirs finit par ne plus être maître de lui-même mais esclave de ses passions, de ses appétits.

Être dépendant de ses passions, c'est être incapable d'y résister et de les contrarier, c'est être tout entier à la merci des humeurs imprévisibles de son caractère et des caprices de ses désirs, c'est être absolument déterminé par notre nature parce que nous ignorons ce qui lui convient vraiment.

L'homme qui tombe ainsi dans la satisfaction excessive des désirs est bien convaincu qu'en assouvissant ses envies au maximum il est le plus libre possible, mais en réalité il ne fait que s'emprisonner lui-même en se condamnant à être son propre esclave.

Il se croit libre tout en s'enfermant lentement dans une prison dont il est lui-même l'artisan, la prison de la passion.

Prisonnier de lui-même, captif de la tyrannie des désirs qui le font agir sans qu'il soit capable de les maîtriser, il est incapable de raisonner sa nature et ses tendances impulsives.

Toutes les expériences addictives le prouvent par exemple de toute évidence: en proie à une addiction, on devient incapable d'y résister, et même quand on prend conscience de sa puissance et de la dépendance qu'elle a occasionnée.

L'alcoolique voudrait bien s'arrêter de boire tellement il souffre désormais de l'alcool, mais il en est incapable: la passion a pris le pas sur la raison et c'est le désir qui fait désormais autorité dans son âme en lui dictant ses actes.

Il a ainsi perdu une des facultés qui font la dignité d'un homme, à savoir l'intelligence de sa raison qui lui donne le pouvoir d'agir dans son propre intérêt. D'où la seconde raison de la thèse de Spinoza: la dépendance aux passions est nuisible à l'homme.

En plus d'être un esclavage, elle est le pire qui soit tellement elle abandonne l'homme au vice et au mal, le déshumanisant progressivement jusqu'à l'abêtir et le rendre incapable de résister à ses pulsions, similaire à un animal exclusivement motivé par ses besoins.

On voit bien que l'excès des désirs, s'il procure d'abord du plaisir, se transforme finalement en souffrance et en servitude.

Il nuit au corps et à l'esprit, détruisant les facultés physiques et mentales, devenant par ailleurs souvent le motif de la perversion morale ou du crime. Combien d'actes malveillants ont été commis sous l'empire de la passion ? Et ne parle-t-on pas d'ailleurs des "crimes passionnels" ? Dans ces états-là, l'homme finit par perdre le contrôle de sa raison et de lui-même. Devenant inconscient, il ne sait plus clairement ce qu'il fait et prend le risque de devenir dangereux pour lui- même et pour autrui.

Ses actes lui sont nuisibles et il n'est pas capable de faire un usage utile de sa raison qui puisse augmenter sa puissance.

C'est donc parce que la licence des passions rend l'homme mauvais et esclave de ses désirs qu'elle est la négation même de la liberté. 2.

Être libre, c'est obéir volontairement à la Raison. C'est pourquoi Spinoza affirme que la liberté authentique tient dans l'obéissance à la raison, faculté par laquelle nous pouvons connaître ce qui utile à notre nature d'homme.

La lucidité de la raison s'oppose à l'inconscience et à l'irréflexion de l'appétit, qui finit par nuire à l'homme s'il gouverne sa conduite.

La pleine liberté suppose la combinaison de deux forces: le choix de la volonté qui est "l'entier consentement" du sujet, et l'intelligence de la raison qui est la connaissance claire et distincte de qui nous est utile.

Chez Spinoza, intelligence et volonté ne font finalement qu'un, car celui qui connaît sa nature tend nécessairement à son propre bien.

Nul être ne recherchant naturellement son propre mal, il peut arriver qu'il confondre ce qui lui est nuisible avec ce qui lui est utile par défaut de compréhension.

Tout homme étant naturellement enclin à persévérer dans son être pour augmenter sa puissance et gagner en sécurité, confort et bien-être, la raison est la faculté de connaître à partir de laquelle nous pouvons savoir ce qui nous est utile.

Si l'homme tend naturellement à bien vivre, Spinoza suppose que la connaissance claire du bien détermine nécessairement la justesse de l'action, renouant par là avec un argument de type socratique selon lequel la connaissance de la vertu rend nécessairement vertueux.

L'homme ne peut ainsi jamais agir contre lui-même s'il sait vraiment où est son bien.

On objectera alors qu'il ne suffit pas de savoir où est le bien pour le faire, en prenant pour preuves l'imbécilité ou la criminalité humaine.

Je sais clairement que fumer m'est nuisible, et pourtant je le fais.

Suivant Spinoza, il faut alors répondre que si l'on continue à agir contre soi, c'est qu'on n'a pas encore assez clairement compris ce qui est bon pour nous.

Qu'il soit alors permis de douter que la connaissance du bien et du mal est suffisante pour déterminer la volonté.

Aristote affirme par exemple que c'est l'habitude du bien qui nous fait devenir bon et non pas seulement sa science.

Il ne suffit pas de savoir où est le bien pour le faire, mais il faut le faire pour effectivement tendre au bien-être.

Quoiqu'il en soit, l'homme libre n'obéit pas à une volonté ignorante, déréglée et irrationnelle, mais il s'oblige à respecter les règles de la raison qu'il a spontanément choisies de suivre.

Pour être pleinement libre, il faut savoir choisir ce qui nous convient, connaissance qui nous est donnée par l'usage de la raison, en décidant de vivre sous son autorité.

Autrement. »

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